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Décisions

Cass. soc., 7 février 2018, n° 16-21.954

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Metz, du 7 juin 2016

7 juin 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en référé, que Mme Y... a été engagée par le GIE Groupe Evidences en qualité de chargée de recherche le 22 février 2010 et a démissionné par lettre du 8 juillet 2015 en précisant que le contrat de travail prendrait fin le 24 juillet 2015 ; que le 23 juillet 2015, son employeur l'a informée que le préavis à respecter était de six semaines selon l'article L. 1234-16 du code du travail, régime applicable en Alsace-Moselle, en lui précisant qu'elle cesserait de faire partie du personnel le 10 septembre 2015 au soir compte tenu de sa prise de congés payés de trois semaines ; que contestant l'interprétation de ces dispositions, la salariée a saisi le 5 août 2015 la juridiction prud'homale en référé ;

 

Sur le premier moyen :

 

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que l'obligation n'est pas sérieusement contestable, que le contrat de travail a été rompu avec effet, au 24 juillet 2015, que le préavis de démission est d'une durée de quinze jours, que la salariée n'est pas commis commercial, alors, selon le moyen :

 

1°/ que constitue une contestation sérieuse, excédant les pouvoirs du juge des référés, la contestation portant sur une question tenant au fond du litige, telle que la qualification professionnelle d'un salarié ; qu'en l'espèce, le GIE Groupe Evidences soutenait que Mme Y... était soumise à un délai de préavis de six semaines parce qu'elle avait le statut de commis commercial au sens de l'article L. 1234-16-1° du code du travail ; que le GIE Groupe Evidences soutenait encore qu'en l'état des responsabilités et de l'autonomie dont elle disposait et qu'elle revendiquait elle-même, à supposer qu'elle n'ait pas la fonction de commis commercial, elle n'en demeurait pas moins soumise à un préavis de six semaines par application de l'article L. 1234-16-3° du code du travail, prévoyant ce même préavis pour les « salariés dont la rémunération est fixe et qui sont chargés de manière permanente de la direction ou la surveillance d'une activité ou d'une partie de celle-ci, ou ceux à qui sont confiés des services techniques nécessitant une certaine qualification » ; qu'en retenant que le délai de préavis applicable était de quinze jours, au prétexte que le GIE Groupe Evidence n'aurait pas produit de pièces établissant que Mme Y... entrait dans le champ de l'article L. 1234-16 du code du travail, cependant que la qualification professionnelle de Mme Y..., contestée par le GIE Groupe Evidences, constituait une question de fond, la cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse, a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article R. 1455-5 du code du travail ;

 

2°/ qu'il n'y a pas lieu à référé en présence d'une contestation sérieuse ; qu'en l'espèce, Mme Y... et le GIE Groupe Evidences s'accordaient pour dire que Mme Y... avait d'importantes responsabilités et disposait d'une grande autonomie dans l'accomplissement de ses fonctions ; que le GIE Groupe Evidences faisait alors valoir qu'à supposer que Mme Y... n'ait pas la fonction de commis commercial, elle relevait, en l'état de ses responsabilités, de l'article L. 1234-16-3° du code du travail en tant que « salariée chargée de manière permanente de la surveillance d'une activité ou d'une partie de celle-ci (

) et à qui sont confiés des services techniques nécessitant une certaine qualification », de sorte qu'elle était en tout état de cause soumise à un préavis de six semaines ; qu'en considérant néanmoins qu'il n'existait pas de contestation sérieuse sur la qualification professionnelle de Mme Y..., et corrélativement, sur la durée du préavis applicable, faisant obstacle aux pouvoirs du juge des référés, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-5 du code du travail ;

 

Mais attendu qu'ayant constaté, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que les mentions figurant au contrat de travail de la salariée ainsi que dans la fiche emploi n'indiquaient pas un statut particulier permettant l'application de l'article L. 1234-16 du code du travail et relevé que l'employeur ne démontrait pas l'existence d'une difficulté relativement à la définition des fonctions réellement exercées par la salariée, la cour d'appel a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, que l'application à l'intéressée de la règle générale prévue à l'article L. 1234-15 du code du travail prévoyant un délai de préavis de quinze jours n'était pas sérieusement contestable ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

 

Mais sur le second moyen :

 

Vu l'article R. 1455-7 du code du travail ;

 

Attendu que la cour d'appel, en sa formation de référé, a confirmé dans les motifs et le dispositif de son arrêt l'ordonnance de référé ayant condamné la société à payer à la salariée une somme à titre de dommages et intérêts pour non remise des documents sociaux ;

 

Qu'en statuant ainsi sur des demandes de dommages-intérêts et non de provision, la cour d'appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme l'ordonnance de référé ayant condamné le GIE Groupe Evidences à verser à Mme Y... la somme de 100 euros à titre de dommages et intérêts pour non remise des documents sociaux, l'arrêt rendu le 7 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;

 

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

 

Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette les demandes ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt.