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Décisions

Cass. 3e civ., 22 octobre 2020, n° 19-19.542

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SCP Boullez, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Paris, du 29 mai 2019

29 mai 2019

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 mai 2019), le 21 décembre 2012, la société Aeroville a donné à bail à la société C & A France des locaux à usage commercial pour une durée de dix ans avec renonciation du preneur à la faculté de résiliation à la fin de la première période triennale, le bail comportant une clause résolutoire, "si bon semble au bailleur".

2. Le 27 juillet 2015, la société Aeroville a délivré à la société C & A France un commandement de payer visant la clause résolutoire, puis l'a assignée en référé en constatation de l'acquisition de cette clause et en paiement d'une provision.

3. Une ordonnance de référé du 27 novembre 2015 a condamné la société C & A France à payer une provision à la société Aeroville, a suspendu les effets de la clause résolutoire et accordé à la société C & A France des délais de paiement avec déchéance du terme.

4. Cette ordonnance, signifiée le 11 décembre 2015 par la société Aeroville, n'a pas été frappée d'appel.

5. Le 8 janvier 2016, la bailleresse a mis en demeure la locataire de payer les sommes dues au titre de la période comprise entre le 12 mai et le 23 novembre 2015.

6. Par lettre du 22 janvier 2016, la locataire, qui ne s'était pas acquittée de la première mensualité, a informé le bailleur qu'elle prenait acte de la résiliation définitive du bail et qu'elle restituerait les clefs le 3 mars 2016.

7. La société Aeroville a informé la société C & A France qu'elle renonçait à se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire, puis l'a assignée en exécution forcée du bail, subsidiairement, en paiement des loyers et charges jusqu'à la deuxième échéance triennale du bail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

8. La société C & A France fait grief à l'arrêt de constater que la société Aeroville a renoncé au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire, de constater que le bail s'est poursuivi entre les parties jusqu'à ce que la société Aeroville ait accepté, à compter du 1er juillet 2018, la résiliation unilatérale du bail par la société locataire, et de condamner, en conséquence, la société C & A France à payer à la société Aeroville une somme correspondant aux loyers et charges demeurés impayés entre le 4 mars 2016 et le 30 juin 2018, alors « que l'acquisition de la clause résolutoire met irrévocablement fin au bail commercial dont le bailleur ne peut plus poursuivre l'exécution forcée dès lors que le preneur n'a pas respecté l'échéancier fixé par le juge dans une ordonnance suspendant les effets de la clause résolutoire et revêtue de la force de chose jugée ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas au pouvoir du bailleur de renoncer au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire, même si elle est stipulée dans son intérêt exclusif, « si bon lui semble », dès lors que le preneur ne s'est pas libéré des arriérés de loyers et des loyers courants dans les conditions fixées par l'ordonnance suspendant les effets de la clause résolutoire ; qu'en considérant cependant qu'il était encore au pouvoir du bailleur de renoncer au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans l'intérêt exclusif du bailleur « si bon lui semble », en s'abstenant d'engager aucun acte d'exécution forcée, quand le bailleur ne pouvait pas imposer au preneur la poursuite d'un contrat qui avait pris fin automatiquement par le défaut de règlement du loyer courant exigible à terme exacte échéance dans les conditions de l'ordonnance du 27 novembre 2015, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 145-41 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance précitée, et 500 du code de procédure civile :

9. Il résulte du premier de ce texte que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre les effets d'une clause résolutoire, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice passée en force de chose jugée. La clause résolutoire est réputée n'avoir jamais produit ses effets si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

10. Dès lors que l'ordonnance de référé est passée en force de chose jugée et en l'absence de décision contraire statuant au principal, le bailleur ne peut plus, en cas de non-respect par le preneur des délais de paiement conditionnant la suspension des effets de la clause résolutoire, demander unilatéralement l'exécution du bail résilié.

11. Pour dire que le bail s'était poursuivi entre les parties en dépit de ce que la locataire n'avait pas payé les loyers courants et les mensualités sur arriérés dans les conditions fixées par l'ordonnance du 27 novembre 2015, l'arrêt retient que la locataire ne peut tirer parti d'une clause résolutoire stipulée au seul bénéfice du bailleur ni se prévaloir de son propre comportement pour prendre acte de la résiliation du bail et que, si la bailleresse a signifié l'ordonnance de référé pour faire courir les délais de paiement, ce qui ne manifestait pas son intention de poursuivre l'acquisition de la clause résolutoire, elle n'avait engagé aucun acte d'exécution forcé de sorte qu'elle conservait la liberté de poursuivre ou non, à ses risques et périls, l'exécution du titre provisoire que constituait cette ordonnance et pouvait, ainsi, renoncer au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

13. Selon ce texte, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

14. La cassation sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence la cassation des dispositions critiquées par le second moyen.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société C & A France à payer à la société Aeroville la somme de 40 543,61 euros au titre d'une indemnité forfaitaire de 10 %, l'arrêt rendu le 29 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Aeroville aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par société Aeroville et la condamne à payer à la société C & A France la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société C & A France.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR constaté que la société AEROVILLE a renoncé au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire, D'AVOIR constaté que le bail s'est poursuivi entre les parties, que la société AEROVILLE a accepté à compter du 1er juillet 2018, la résiliation unilatérale du bail par la société locataire, et D'AVOIR condamné, en conséquence, la société C & A FRANCE à payer à la société AEROVILLE, la somme de 3.435.853,66 € correspondant aux loyers et charges demeurés impayés entre le 4 mars 2016 et le 30 juin 2018 ;

AUX MOTIFS QUE la cour rappelle que le preneur ne peut tirer partie d'une clause résolutoire stipulée au bail au seul bénéfice du bailleur ; que par ailleurs, le bailleur quand bien même aurait-il délivré au preneur un commandement visant la clause résolutoire et poursuivi devant le juge des référés une action tendant à la constatation de l'acquisition de ladite clause et aurait-il obtenu à son bénéfice le prononcé d'une telle mesure, conserve la liberté de poursuivre ou non, à ses risques et périls l'exécution du titre provisoire qui lui a ainsi été délivré ; qu'en l'espèce, la clause résolutoire figurant au bail précise qu'en application de ladite clause, "le bail sera, si bon semble au bailleur, résilié de plein droit et ce même en cas de paiement ou d'exécution à l'expiration du délai ci-dessus", si bien qu'il ne fait aucun doute que cette clause a été stipulée au seul bénéfice du bailleur ; que certes, la société bailleresse a manifesté son intention de se prévaloir de cette clause en introduisant devant le juge des référés une action tendant à constater son acquisition ; que cependant, le bénéficiaire d'une décision demeure libre de l'exécuter ou non ; qu'en l'espèce, la société bailleresse a fait signifier l'ordonnance de référé, mais que seule cette ordonnance faisait courir les délais de paiement accordés, lesquels suspendaient l'acquisition de ladite clause, si bien que cette signification ne manifeste pas, de manière dépourvue d'équivoque, l'intention de la bailleresse de poursuivre l'acquisition de la clause ; que par ailleurs, le courrier adressé le 8 janvier 2016, par la société UNIBAIL RODAMCO "agissant pour le compte de la SCI AEROVILLE" contenant mise en demeure de régler sous 48 heures les factures établies entre le 12 mai 2015 et le 23 novembre 2015, demeurées impayées pour la somme de 828.414,76 euros, ne peut correspondre au courrier mentionné au dispositif de l'ordonnance, préalable à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, ce courrier ayant été délivré avant même que les délais accordés n'aient commencé à courir, le paiement de la première échéance sur l'arriéré étant fixé au 10 janvier 2016 ; que la société locataire, qui s'est abstenue de régler son loyer échu pour le 3e trimestre 2015, puis n'a pas respecté l'obligation qui lui était faite par l'ordonnance de référé de régler son loyer courant et les mensualités sur l'arriéré, à compter du 10 du mois suivant le signification de l'ordonnance, soit en l'espèce à compter du 10 janvier 2016, ne pouvait se prévaloir de son propre comportement pour prendre acte de l'acquisition de la clause résolutoire, la société bailleresse n'ayant à cette date engagé aucun acte d'exécution forcée et ayant par un courrier daté du 11 février 2016, protesté contre le départ des lieux annoncé par la société locataire à compter du 3 mars 2016 ; que dans ces conditions, la société bailleresse pouvait renoncer au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire et qu'elle l'a fait dans des délais permettant à la société locataire de revenir sur sa décision de quitter les lieux ; que le bail liant les parties s'est donc poursuivi ; que la date de prise d'effet du bail est le 15 mai 2013 et que celui-ci précisait que le preneur renonçait à la faculté de résiliation à la fin de la première période triennale et qu'il ne disposerait de son droit de résiliation qu'à la fin de la sixième année suivant la date de prise d'effet du bail ; que la décision de la société locataire de quitter les lieux et de remettre les clés, s'analyse en une décision unilatérale de résiliation, alors même que cette société ne pouvait pas mettre fin au bail avant le mois de mai 2019 ; que le bail s'étant poursuivi la société locataire restait tenue au paiement des loyers et charges échus, jusqu'à ce qu'il soit mis fin au bail par la délivrance d'un congé ou par l'acceptation par la société bailleresse de cette résiliation unilatérale de la société locataire ; qu'en l'espèce, la société bailleresse déclare expressément accepter la résiliation unilatérale du bail par la société locataire au 1er juillet 2018 ; qu'il convient à ce propos de souligner que le temps nécessaire à la relocation est sans incidence, puisque la société bailleresse mise devant le fait accompli par la société locataire, n'était pas tenue de relouer les locaux avant le terme du bail, à défaut d'un congé régulièrement délivré par la société locataire ; qu'en conséquence, il y a lieu de condamner la société C & A FRANCE à payer à la société AEROVILLE la somme de 3.435.853,66 euros T.T.C., montant des loyers et charges dus pour la période écoulée entre le 4 mars 2016 et le 30 juin 2018 ;

1. ALORS QU'il n'est plus au pouvoir du bailleur de renoncer à l'application de la clause résolutoire, même si elle est stipulée dans son intérêt exclusif, « si bon lui semble », après avoir saisi le juge des référés, afin qu'il en constate l'acquisition ; qu'en décidant, à l'inverse, qu'il était au pouvoir du bailleur de renoncer à l'application de la clause résolutoire dont il avait sollicité du juge des référés qu'il en constate l'acquisition tant qu'il n'avait pas procédé à son exécution forcée, après avoir rappelé que la clause résolutoire était stipulée dans l'intérêt exclusif du bailleur « si bon lui semble » et qu'il conservait la liberté de poursuivre ou non à ses risques et périls l'exécution du titre provisoire qui lui avait ainsi été délivré, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure applicable au litige et l'article 503 du code de procédure civile ;

2. ALORS si tel n'est pas le cas QU'à supposer que le bailleur n'ait pas renoncé à se prévaloir de la clause résolutoire stipulée « si bon lui semble » par la saisine du juge des référés pour qu'il en constate l'acquisition, il n'est plus en son pouvoir de renoncer à son application en poursuivant l'exécution forcée du bail, une fois qu'il a été statué sur l'acquisition de la clause résolutoire par une décision passée en force de chose jugée, peu important que le juge des référés ait suspendu les effets à la condition que le preneur s'acquitte de l'arriéré de loyers et des loyers courants aux dates qu'il fixe ; qu'en décidant que la signification par le bailleur de l'ordonnance du 27 novembre 2015 était équivoque en raison des délais de paiement consentis à la société C & A FRANCE dans l'ordonnance et qu'elle n'emportait pas renonciation de sa part à se prévaloir de l'application de la clause résolutoire dès lors que cette signification, quand elle était passée en force de chose jugée, au jour où le bailleur a renoncé à la clause résolutoire, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure applicable au litige, et les articles 500 et 501 du code de procédure civile ;

3. ALORS si tel n'est pas non plus le cas QUE l'acquisition de la clause résolutoire met irrévocablement fin au bail commercial dont le bailleur ne peut plus poursuivre l'exécution forcée dès lors que le preneur n'a pas respecté l'échéancier fixé par le juge dans une ordonnance suspendant les effets de la clause résolutoire et revêtue de la force de chose jugée ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas au pouvoir du bailleur de renoncer au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire, même si elle est stipulée dans son intérêt exclusif, « si bon lui semble », dès lors que le preneur ne s'est pas libéré des arriérés de loyers et des loyers courants dans les conditions fixées par l'ordonnance suspendant les effets de la clause résolutoire ; qu'en considérant cependant qu'il était encore au pouvoir du bailleur de renoncer au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans l'intérêt exclusif du bailleur « si bon lui semble », en s'abstenant d'engager aucun acte d'exécution forcée, quand le bailleur ne pouvait pas imposer au preneur la poursuite d'un contrat qui avait pris fin automatiquement par le défaut de règlement du loyer courant exigible à terme exacte échéance dans les conditions de l'ordonnance du 27 novembre 2015, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure applicable au litige ;

4. ALORS QUE le juge doit respecter le principe du contradictoire ; qu'en relevant de sa propre initiative le moyen tiré de ce que la société AEROVILLE n'a pas envoyé de mise en demeure préalable à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire dans les conditions fixées par l'ordonnance du 27 novembre 2015 suspendant les effets de la clause résolutoire pour avoir été délivrée avant même que les délais accordés n'aient commencé à courir, le paiement de la première échéance sur l'arriéré étant fixé au 10 janvier 2016, la cour d'appel qui n'a pas invité les parties à débattre de ce moyen relevé d'office, a méconnu les exigences de l'article 16 du code de procédure civile ;

5. ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ; qu'il ressort des termes clairs et précis de l'ordonnance du 10 janvier 2016 qu'« à défaut de paiement d'une seule mensualité sur arriéré ou du paiement du loyer courant au terme exact, et huit jours après l'envoi d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception, le solde de la dette deviendra immédiate exigible et la clause résolutoire sera acquise » ; qu'il s'ensuit que le loyer courant est exigible à terme exact, à la différence des versements mensuels sur arriéré qui sont exigibles à la date du 10 de chaque mois ; qu'en affirmant que la mise en demeure du 8 janvier 2016 n'entrait pas dans les prévisions de l'ordonnance du 27 novembre 2015 pour avoir été envoyée deux jours avant la date du 10 janvier 2016, du moment que l'ordonnance de référé du 27 novembre 2015 imposait à la société C & A FRANCE de s'acquitter du loyer courant et des mensualités sur arriéré à cette date, quand le loyer courant était exigible au terme exact, à la différence de chaque versement mensuel sur arriéré, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'ordonnance du 27 novembre 2015, en violation de l'article 4 du code de procédure civile et du principe précité ;

6. ALORS QU'aux termes de l'ordonnance de référé du 27 novembre 2015, « à défaut de paiement d'une seule mensualité sur arriéré ou du paiement du loyer au terme courant au terme exact, et huit jours après l'envoi d'une mise en demeure adressée par lettre recommandé avec accusé de réception, le solde de la dette deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire sera acquise » ; que la mise en demeure étant un acte réceptice, elle ne produit effet qu'à la condition qu'elle ait été portée à la connaissance de son destinataire ; qu'en se déterminant en considération de la date d'envoi de la mise en demeure, antérieurement à la date du terme de la première échéance fixée deux jours plus tard au 10 janvier 2016, pour dénier tout effet à la mise en demeure envoyée deux jours avant la date de paiement de la première échéance sur arriérés, la cour d'appel qui n'a pas vérifié que la première échéance était exigible à la date de réception de la mise en demeure par la société C & A FRANCE, a violé les articles 1134, 1184 et 1351 du code civil dans leur rédaction antérieure applicable en l'espèce, ensemble l'article L. 145-41 du code de commerce ;

7. ALORS QUE même délivrée pour une date prématurée, la mise en demeure prend effet à la date à laquelle elle aurait dû être envoyée ; qu'il s'ensuit qu'à le supposé prématuré, le courrier adressé le 8 janvier 2016 n'avait pas moins vocation à prendre effet le 10 janvier suivant, date à laquelle la première échéance était exigible ; qu'en se déterminant sur la seule considération de la date d'envoi du premier courrier, antérieurement à la date d'exigibilité de la première échéance, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure applicable en l'espèce ;

8. ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; que la cour d'appel qui retient, d'une part, que la société AEROVILLE n'a pas mis en demeure la société C & A FRANCE dans les termes de l'ordonnance de référé du 27 novembre 2015 pour voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, à défaut de lui avoir envoyé un premier courrier après l'échéance du terme marquant l'exigibilité du premier des vingt-quatre versements (arrêt attaqué, p. 6, 6ème alinéa), et qui constate, de l'autre, que la société AEROVILLE a renoncé au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire, ce qui implique nécessairement qu'elle était effectivement intervenue, en dépit de l'envoi prématuré d'une mise en demeure, s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

9. ALORS si tel n'est pas le cas QU'en décidant que la société AEROVILLE n'avait pas mis en demeure la société C & A FRANCE dans les termes de l'ordonnance de référé du 27 novembre 2015 pour voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, à défaut de lui avoir envoyé un premier courrier après l'échéance du terme marquant l'exigibilité du premier des vingt-quatre versements (arrêt attaqué, p. 6, 6ème alinéa), tout en relevant que la clause résolutoire eut été acquise si la société AEROVILLE n'y avait pas renoncé, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société C & A FRANCE à rembourser à la société AEROVILLE la somme de 276.000 € T.T.C.
au titre de la participation du bailleur aux travaux du preneur ;

AUX MOTIFS QUE la société AEROVILLE sollicite la condamnation de la société C & A FRANCE à lui payer la somme de 276.000 € T.T.C. représentant sa participation aux travaux immobiliers du preneur et l'infirmation, sur ce point, du jugement entrepris qui l'a déboutée de ce chef de demande ; que la société C & A FRANCE conclut à la confirmation du jugement entrepris qui a débouté la société bailleresse de cette demande ; que l'article 8 du bail, stipule que "Le Bailleur participera au financement des travaux strictement immobiliers du Preneur à hauteur d'un montant forfaitaire maximum global de 230.000 € HT (...). Si nonobstant les stipulations du bail relatives à la période ferme de celui-ci du présent bail, le Preneur entendait libérer les locaux loués avant la date convenue, à quelque titre que ce soit, le Preneur devra rembourser au Bailleur le montant de cette participation, cette dernière ayant été consentie en contrepartie de la période ferme du bail" ; que le présent bail a pris fin en raison de sa résiliation unilatérale par le preneur acceptée par le bailleur au cours de la période ferme pour laquelle le bail avait été conclu ; que, dans ces conditions, en application de la clause le bailleur est bien fondé à solliciter le remboursement des sommes engagées à ce titre et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point ;

ALORS QU'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à venir sur le premier moyen de cassation emportera l'annulation des dispositions visées par le second moyen de cassation, dès lors que l'acquisition de la clause résolutoire s'oppose au remboursement du prix des travaux payés par le bailleur, lequel est subordonné à la condition que le preneur entende libérer les locaux loués avant la date convenue, à quelque titre que ce soit, en application de l'article 8 du bail.