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Décisions

Cass. 3e civ., 16 septembre 2009, n° 08-10.487

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

Mme Monge

Avocat général :

M. Petit

Avocats :

SCP Richard, SCP Tiffreau

Rennes, du 21 déc. 2006

21 décembre 2006

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 21 décembre 2006), que par acte sous seing privé du 22 avril 1981, M. X... et Mme X..., aux droits desquels se trouvent Mme Jeannine Y..., Mme Isabelle Z... et Mme Marie-Christine A... (les consorts Y...), ont donné à bail à M. B... des biens immobiliers composés d'une maison d'habitation, de bâtiments et de parcelles de terre d'une contenance totale de 4 800 mètres carrés ; que le 7 janvier 1997, les bailleurs ont vendu à un tiers 4 200 mètres carrés du terrain loué ; que le 16 juin 2000, a été délivré au preneur un congé avec offre de vente sur le surplus des biens loués ; que ce congé a été annulé par un jugement confirmé par un arrêt du 13 novembre 2003 qui, dans son dispositif, condamnait le preneur à payer les loyers à venir " sur la base de son bail " ; que les bailleresses ont assigné le locataire en résiliation du bail et paiement des loyers impayés ; que M. B... s'est opposé à la résiliation à ses torts en soulevant le défaut de délivrance de partie du bien loué et, reconventionnellement, a demandé remboursement des travaux effectués dans la maison et paiement de dommages intérêts pour privation de jouissance ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. B... fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation du bail à ses torts exclusifs, alors, selon le moyen, que par son arrêt du 13 novembre 2003, la cour d'appel de Rennes s'était bornée à décider qu'il ne pouvait prétendre être dispensé du paiement d'une partie du loyer, en raison du fait qu'il avait été privé de la majeure partie du terrain qui lui avait été loué, tout en soutenant, pour mettre en cause le congé, que le bail avait toujours pour objet la totalité du terrain ; qu'en revanche, la cour d'appel n'avait nullement dispensé les bailleurs de leur obligation de délivrance du bien loué ; qu'en affirmant néanmoins que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 13 novembre 2003 interdisait à M. B... de se prévaloir, pour justifier le défaut de paiement des loyers, du manquement par les bailleurs à leur obligation de délivrance du bien loué, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que dans son arrêt du 13 novembre 2003, la cour d'appel, après avoir constaté que, postérieurement à la vente, le bail n'avait été ni résilié ni modifié, avait approuvé le premier juge d'avoir dit que M. B... devait les pleins loyers depuis le 1er août 1997 et ajouté qu'il devait les loyers à venir, en l'état des relations des parties, la cour d'appel, qui a retenu, à bon droit, que M. B... ne pouvait introduire à nouveau une discussion sur son obligation au paiement des loyers sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à cet arrêt, et constaté qu'il ne contestait pas n'avoir pas exécuté cette décision, a souverainement retenu qu'il y avait là manquement grave à ses obligations justifiant le prononcé de la résiliation du bail à ses torts exclusifs ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que dans deux courriers adressés par le bailleur à M. B... se trouvait la preuve de ce que le preneur avait effectué des travaux d'amélioration dans la maison mais également de ce qu'il n'avait pas informé le bailleur de ses projets, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit qu'en l'absence de clause contraire du bail, l'accession de ces travaux devait se faire sans indemnité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 1351 du code civil ;

Attendu que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; qu'il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. B... en réparation de son préjudice de jouissance, l'arrêt retient qu'en sollicitant des dommages et intérêts équivalents à 85 % de la créance de loyers, M. B... reprend la demande de réduction de loyers qu'il avait présentée sans succès lors de la présente instance, pour la même cause et contre les mêmes parties, de sorte que sa demande se heurte à la chose jugée par l'arrêt du 13 novembre 2003 relativement à la même contestation ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. B... n'avait pas demandé réparation de son préjudice de jouissance dans la précédente instance et qu'une telle demande n'a pas le même objet qu'une demande en réduction du montant du loyer pour modification de la surface louée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. B... de sa demande en dommages intérêts pour privation de jouissance, l'arrêt rendu le 21 décembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.