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Décisions

Cass. com., 14 février 2015, n° 13-26.524

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

Me Foussard, Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor

Paris, du 19 sept. 2013

19 septembre 2013

Sur la recevabilité du pourvoi n° Z 13-26. 524, examinée d'office, après avis donné aux parties :

Vu l'article 613 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il résultait de ce texte, dans sa rédaction applicable à la date de déclaration du pourvoi, que le délai de celui-ci ne courait à l'égard des décisions rendues par défaut, même pour les parties qui avaient comparu devant les juges du fond, qu'à compter du jour où l'opposition n'était plus recevable ;

Attendu que la société Financière du cèdre s'est pourvue en cassation, le 19 novembre 2013, contre l'arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 2013), rendu par défaut et susceptible d'opposition ; qu'il n'est pas justifié de l'expiration du délai d'opposition à la date du pourvoi ;

Que le pourvoi est irrecevable ;

Sur le pourvoi n° T 14-10. 951 :

Donne acte à la société Financière du cèdre du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société CIC Ouest ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans le but d'effectuer une opération de défiscalisation et au vu des conseils de la société Financière du cèdre et d'une notice de commercialisation conçue et réalisée par M. X... ainsi que M. Y... et la société Réalisations économiques et industrielles (la société REI), M. et Mme Z... ont investi dans une opération d'acquisition de parts de copropriété d'un navire, construit par la société Ocea et dont la gestion était confiée à un autre des initiateurs du projet, la société Marigot Shipping Company ; que l'investissement était financé par des prêts consentis par le vendeur, la société REI, et la Banque régionale de l'Ouest, devenue depuis CIC Ouest ; que M. F..., notaire membre de la société civile professionnelle F..., G..., H..., devenue SCP F..., H..., I... (la société F...) et assuré auprès de la société Covea Risks, est intervenu dans ces opérations ; qu'ayant fait l'objet de redressements de la part de l'administration fiscale qui estimait que l'opération n'était pas éligible à la défiscalisation, M. et Mme Z... ont assigné la société Financière du cèdre et la société REI pour obtenir l'annulation de l'acte d'acquisition des quirats du 26 juin 1996, la restitution des sommes acquittées et le paiement de dommages-intérêts ; que la société Financière du cèdre a formé divers appels en garantie, la société MMA Iard assurances mutuelles intervenant volontairement à l'instance en qualité d'assureur des notaires en lieu et place de la société Covea Risks ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1109 et 1116, ensemble les articles 1147, 1382 et 1991 du code civil ;

Attendu que, pour dire que la société Financière du cèdre a commis un dol à l'égard de M. et Mme Z..., l'arrêt retient que cette société était tenue d'une obligation de conseil et devait leur expliquer les enjeux et risques de l'opération, d'abord, en opérant les vérifications sur la qualité du produit, ce qu'elle n'a pas fait, faute de quoi elle aurait vu que les conditions légales de la défiscalisation n'étaient pas réunies et, ensuite, en vérifiant l'adaptation de l'investissement aux capacités financières et à la compétence requise du client ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à caractériser la dissimulation intentionnelle d'une information ayant déterminé le consentement de M. et Mme Z..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner la société Financière du cèdre, solidairement avec la société REI, à payer certaines sommes à M. et Mme Z... en réparation de leurs préjudices financier et moral, l'arrêt retient que le seul document dont la société Financière du cèdre arguait est la télécopie de la société Ocea du 20 septembre 1996 ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Financière du cèdre faisait valoir dans ses conclusions qu'à l'époque où les époux Z... avaient acquis des parts de copropriété du navire, elle s'était fait remettre un procès-verbal établi le 26 décembre 1995 par la société Ocea mentionnant que le navire avait été livré et que les documents habituels de bord avaient été délivrés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 1147 et 1382 du code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Financière du cèdre à payer diverses sommes à M. et Mme Z... en réparation du préjudice résultant des redressements fiscaux, l'arrêt retient que l'économie fiscale qu'ils envisageaient constituait la cause de l'opération effectuée, de sorte que la réparation de l'intégralité du préjudice subi implique celle résultant de la conclusion d'une convention fiscalement inefficace ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. et Mme Z... auraient pu bénéficier d'une autre opération présentant les mêmes avantages que ceux escomptés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société financière du Cèdre tendant à être garantie par la société Ocea, l'arrêt retient que la société Financière du cèdre ne saurait se prévaloir de sa propre négligence pour obtenir la garantie d'un chantier naval étranger à l'échec du montage financier en cause, cependant qu'au surplus aucune faute de la société Ocea, qui démontre au contraire avoir toujours respecté ses engagements vis-à-vis de l'armateur, n'a été établie, ni aucune collusion avec la société REI ;

Attendu qu'en statuant ainsi sans analyser, même sommairement, les éléments de preuve produits par la société Financière du cèdre pour établir les manquements reprochés à la société Ocea, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Sur le cinquième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter l'action récursoire de la société Financière du cèdre à l'encontre de la société Marigot Shipping Company ainsi que de MM. Y... et X..., l'arrêt retient que leur participation au montage de l'opération ne suffit pas à démontrer leur rôle ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses constatations, selon lesquelles la plaquette de commercialisation du programme d'investissement sur laquelle la société Financière du cèdre avait apposé son logo avait été établie, notamment, par MM. X... et Y... et la société Marigot Shipping Company, a violé le texte susvisé ;

Et sur le sixième moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Financière du cèdre à payer certaines sommes à la société Covea Risks, M. F... et la société F... en indemnisation de leur préjudice subi du fait d'une procédure abusive, l'arrêt retient que la mise en cause de la société Covea Risks résulte d'une erreur manifeste dans laquelle la société Financière du cèdre persiste sans raison ; qu'il ajoute qu'elle s'obstine à rechercher la responsabilité de M. F... et de la société F..., malgré les termes des décisions précédemment rendues, sans apporter d'autres éléments que des considérations générales ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence d'une faute commise par la société Financière du cèdre, faisant dégénérer en abus l'exercice du droit d'agir en justice, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° Z 13-26. 524 ;

Et sur le pourvoi n° T 14-10. 951 :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause M. F... et les sociétés MMA Iard assurances mutuelles, Covea Risks et F..., H..., I...