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Décisions

Cass. 3e civ., 2 juin 1993, n° 91-16.455

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

M. Chollet

Avocat général :

M. Sodini

Avocat :

SCP Delaporte et Briard

Paris, du 5 avr. 1991

5 avril 1991

Sur le premier moyen : (sans intérêt) ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article 8 du décret du 30 septembre 1953 ;

Attendu que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail ; que, toutefois, le bailleur devra, sauf exceptions prévues aux articles 9 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le refus de renouvellement ;

Attendu que pour fixer l'indemnité d'éviction due par M. Y..., propriétaire de locaux à usage commercial, à leurs locataires, les époux X..., l'arrêt attaqué (Paris, 5 avril 1991), évalue celle-ci en se référant au rapport d'expertise établi le 15 septembre 1988, avec majoration d'un coefficient d'actualisation de 10 % ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la valeur des éléments du fonds de commerce doit être appréciée à la date à laquelle les juges statuent lorsque l'éviction n'est pas encore réalisée et sans qu'il y ait lieu à réévaluation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu les articles 20 et 33 du décret du 30 septembre 1953 ;

Attendu que toutes les actions exercées en vertu du décret susvisé se prescrivent par 2 ans ; qu'aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue ; que, jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré ; que, toutefois, l'indemnité d'occupation sera déterminée en application des dispositions du titre V compte tenu de tous éléments d'appréciation ;

Attendu que pour déclarer M. Y... irrecevable en sa demande en fixation d'une indemnité d'occupation, l'arrêt retient que son action a été éteinte par l'ordonnance du 18 novembre 1986 commettant un expert, de telle sorte que l'effet interruptif de la prescription biennale, n'a pu se prolonger pendant le cours des opérations d'expertise ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription de l'action en paiement d'une indemnité d'occupation, fondée sur l'article 20 du décret du 30 septembre 1953, ne peut commencer à courir avant le jour où est définitivement consacré, dans son principe, le droit du locataire au bénéfice d'une indemnité d'éviction, la cour d'appel, qui a elle-même statué sur la contestation par M. Y... du droit à indemnité d'éviction des époux X..., a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a reconnu, au bénéfice des époux X..., le droit à une indemnité d'éviction, l'arrêt rendu le 5 avril 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.