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Décisions

CA Paris, 9e ch. A, 23 novembre 2005, n° 04/06120

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

M. Manuel, M. Georges, M. Juan

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Beauquis

Conseillers :

M. Morel, Mme Filippini

Avocats :

Me Chadwick, Me Sansot, Me Curt, Me Des Villettes

TGI Bobigny, du 3 juill. 2003, n° B99097…

3 juillet 2003

RAPPEL DE LA PROCEDURE :

LE JUGEMENT :

Le tribunal, par jugement contradictoire,

- a renvoyé :

. Juan M des fins de la poursuite des chefs de trafic d’influence passif, acceptation, sollicitation d’avantage par personne chargée d’une mission de service public, et de faux,

. Georges L les fins de la poursuite du chef de faux et d’usage de faux, Manuel J des fins de la poursuite du chef de corruption active, proposition ou fourniture d’avantage a une personne chargée d’une mission de service public,

 - et a débouté la commune de D de sa constitution de partie civile. L’APPEL :

Appel a été interjeté par :

La ville de D le 04 juillet 2003 contre Monsieur M Juan, Monsieur L Georges, Monsieur 1 Manuel

DEROULEMENT DES DEBATS :

A 1’audience publique du 12 octobre 2005, le président a constaté l’identité des prévenus Manuel J et Juan M Georges L était représenté par son conseil, Maitre Sansot.

Ont été entendus :

Monsieur le conseil 1 er Morel en son rapport ;

Manuel J' et Juan M en leurs observations et moyens de défense ; Maitre Des Villettes, avocat de la partie civile en sa plaidoirie ; Monsieur Guirimand, avocat général, en ses observations ;

Maitre Chadwick, Maitre Curt et Maitre Sansot, en leur plaidoirie respective ;

Le président a ensuite averti les parties que I ’arrêt serait prononcé le 23 novembre 2005.

DECISION :

Rendue après en avoir délibéré conformément a la loi.

EN LA FORME :

Considérant qu'il résulte des énonciations qui precedent que 1’ appel interjete par la ville de D , partie civile, contre Manuel J , Georges L etJuanM est intervenu dans les formes et ddlai prevus par la loi ; qu'ils sera done declare recevable;

AU FOND :

Considérant que par lettres des 19 mars et 10 mai 1999 le maire de la ville de D déposait plainte auprès de monsieur le procureur de la République de Bobigny et exposait que Juan M . ancien directeur des services techniques de la ville, avait, au cours de ses fonctions, fait réaliser des travaux luxueux dans un appartement, propriété de la commune, qui devait lui etre affecte pour un prix sous-évalué et ce, par I ’entreprise à diriger par Manuel J la contrepartie pour ce dernier consistant dans les promesses de Juan M d’user de son influence pour faire obtenir par A' des marches publics de la commune ;

Qu’il soit précisé qu’aux termes de la prévention le devis de rénovation était d’un montant de 270 000 frs alors que le cout réel des travaux effectues devait etre estime à un prix de 500 000 frs a 1 000 000 frs ;

Considérant qu’au cours de l’enquête, il apparaissait que la voie d’accès au garage de cet appartement avait été rénovée par l’entreprise B, sous la direction de

Georges L , la facture adressée à la ville de D pour un montant de 100 973,75 frs portant le libelle “reprise de nids de poule” pour les rues de la ville; qu’au vu des faits relatifs aux travaux réalisés par I ‘entreprise A Juan M; et Manuel J étaient poursuivis pour trafic d’influence ;

Qu’au vu des faits relatifs aux travaux réalisés par I ‘entreprise B              •, Georges

L’était prévenus de faux et usage de faux, Juan M pour complicité de faux ; Considérant que par jugement du 3 juillet 2003, le tribunal correctionnel de Bobigny déclarait les trois prévenus non coupables des délits vises a la prévention ; que la ville de D, partie civile, interjetait appel de cette décision ; que la cour se trouve saisie des seules dispositions civiles du jugement ;

Considérant que la partie civile fait déposer par son conseil des conclusions tendant à voir :

“Infirmer le jugement frappe d 'appel en toutes ses dispositions, “Dire que les fails commis par monsieur Juan M sont constitutifs des délits de trafic d’influence passif, au sens de I ‘article 432-11 2° du code pénal, et de complicité de faux par instruction, au sens de I ‘article 441-1 du code pénal, "Dire que les faits commis par monsieur Manuel J sont constitutifs du délit de corruption active, au sens de I ’article 433-1 du code pénal, “Déclarer la ville de D            représenté par son maire en exercice monsieur André V recevable et bien fondée en son appel, " Condamner solidairement messieurs Juan M et Manuel J de payer à la ville de Dugny d titre de dommages intérêts

-             la somme de 4 331,42 euros au titre du préjudice matériel subi par la ville,

-             la somme de 8 000 euros au titre du préjudice d 'image subi par la ville,

"Condamner en outre messieurs M ' et J sous la même solidarité, à verser d la ville de D la somme globale de 6 000 euros pour la procédure de première instance et d'appel, en application des dispositions de I ‘article 475-1 du code de procédure pénale,

"Les condamner enfin aux entiers dépens".

Considérant qu’au vu des conclusions ci-dessus il apparait qu’aucune demande n’est formulée a rencontre de Georges 1 qu’oralement le conseil de la partie civile le confirme à l’audience ;

Considérant que Manuel J fait déposer par son conseil des conclusions tendant à voir :

“Déboulera la commune de D- de ses demandes de dommages intérêts d I 'encontre de monsieur J pour des faits dont il a été relaxe par le tribunal de grande instance de Bobigny par un jugement en date du 3 juillet 2003 actuellement définitif les décisions de justice pénale ayant au civil I 'autorités de la chose jugée d I 'égard de tous en ce qui concerne I 'existence du fait incrimine en application de I ‘article 135] du code civil.

“Condamner la commune de D au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de I ‘article 75-1 du code de procédure pénale, au profit de monsieur Manuel J.

"La condamner aux entiers dépens

Que Juan M fait déposer par son conseil des conclusions tendant à voir :

"Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

"Constater que I ‘indemnisation sollicitée de monsieur M n'est pas de la compétence de la juridiction judiciaire,

"Vu les dispositions des articles 432-11, 432-17,121-6,121-7, 441-1, 441-9, 441-10 du code pénal,

"Vu la jurisprudence du tribunal des conflits et du conseil d’Etat sur la responsabilité des agents administratifs,

"En tout état de cause,

"Déclarer irrecevable et mal fondée la partie civile et la débouter en toutes ses demandes,

"Condamner la commune de D à verser une indemnité de 5 000 euros au titre de I ‘article 475-1 du code de procédure pénale”.

Considérant qu’aux termes de la prévention il n’est nullement vise que Juan M ait été dépositaire de I ‘autorité publique disposant du pouvoir de décision et d’une délégation de signature, mais l’abus d’une influence réelle ou supposée ;

Qu’il résulte des fonctions de directeur des services techniques de la ville exercées A I ’époque par le prévenu, que celui-ci apportait son concours aux décisions d’attribution de marches et dès lors disposait d’une influence sur ceux-ci,

Considérant qu’il résulte des témoignages concordants de madame Valérie B à l’époque compagne de Juan M          et mère de son enfant Benjamin, né en 1999 que

Le logement en objet était destiné à etre occupe par le couple et qu’elle en avait choisi les peintures ;

Que le projet de Juan M d’occuper cette maison est confirmé :

-par le témoignage de monsieur G le peintre chargé des travaux, -par celui de monsieur C à I ‘époque, adjoint de Juan M

-par celui de monsieur V. G secrétaire général de la mairie de C

-par celui de monsieur P adjoint au maire de D charge des travaux et bâtiments ;

Considérant que pour ce qui concerne le cout des travaux factures 270 000 frs par l’entreprise A’. ceux-ci ont fait l’objet d’une évaluation très supérieure ;

Que lors de son interrogatoire par la police judiciaire le 8 juin 1999, Manuel J déclarait avoir consenti une remise exceptionnelle : “j’ai fait cette remise car j 'espérais pouvoir travailler avec la commune. M. M et M. C Henri m ’avait dit qu’ils me contacteraient pour d ’autres chantier, mats toujours inferieurs d 300 000 frs, En général je ne réponds pas aux appels d’offre”.

Considérant que sent établis à l’encontre de Juan M. et Manuel J les éléments des délits vises à la prévention ;

Qu’en conséquence la cour, reformant les dispositions civiles du jugement les déclarera responsables des préjudices subis par la commune ;

Considérant que force est de constater que les faits incrimin.es, nonobstant le fait que Juan M et Manuel J comptaient en retirer un avantage personnel, ont consisté en une sous facturation des travaux effectivement réalisés ;

Que dans ces conditions l’existence d’un préjudice matériel direct de la partie civile n’est pas établie ;

Que néanmoins il apparait un préjudice moral, résultant de I ’atteinte à l’image des institutions municipales ;

Que chacun des prévenus sera condamne à payer à la partie civile, la somme de 1 euro a titre de dommages intérêts ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement a 1’dgard de toutes les parties.

Déclare I ’appel de la ville de D, partie civile, recevable,

Infirmant les dispositions civiles du jugement déférés,

Condamne, chacun des prévenus, Manuel J et Juan M, à payer à la ville de D partie civile, la somme d’un euro a titre de dommages intérêts.

Condamne, chacun des prévenus, Manuel J et Juan M à payer à la partie civile la somme de 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure 

Constate le désistement d’action de la partie civile a l’encontre de Georges L.