Cass. 3e civ., 13 mai 2009, n° 08-16.720
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lacabarats
Rapporteur :
M. Philippot
Avocat général :
M. Bruntz
Avocats :
SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Vuitton et Ortscheidt
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 19 février 2008), que M. et Mme X... sont propriétaires de deux parcelles ; que le notaire instrumentaire a notifié à la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Languedoc-Roussillon (SAFER) l'intention de M. X... de vendre ces terres à Mme Y... ; que la société a décidé d'exercer son droit de préemption ; que M. X... ayant refusé de signer l'acte authentique de vente, la SAFER a assigné M. et Mme X... afin d'obtenir le transfert de propriété des parcelles à son profit ;
Attendu que la SAFER fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que la notification même erronée d'un projet de vente par un notaire à la SAFER vaut à elle seule offre de vente et détermine les conditions d'exercice du droit de préemption de cette dernière ; qu'il s'ensuit que le notaire investi d'une mission légale en la matière n'a pas à justifier de ses pouvoirs et que sauf à démontrer que la SAFER ne pouvait pas légitimement croire que celui-ci disposait des pouvoirs nécessaires pour engager les vendeurs, l'acceptation par celle-ci des prix et conditions notifiés rend la vente parfaite ; qu'en affirmant qu'il appartenait à la SAFER de vérifier avant toute préemption l'identité des vendeurs ainsi que leur situation matrimoniale et le consentement de chacun d'eux, la cour d'appel a violé les articles L. 412-8 et R. 143-4 du code rural ;
2°/ que la notification à une SAFER par le notaire chargé d'instrumenter, d'une vente sous condition suspensive constitue une offre de vente ; qu'en décidant qu'il incombait à la SAFER de démontrer l'existence d'un engagement ferme de M. X... de vendre le bien préempté prétendument non établi en l'espèce, après avoir constaté que le notaire lui avait notifié l'intention de vendre de M. X..., ce qui valait offre de vente ferme et définitive, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé de plus fort les articles L. 412-8 et R. 143-4 du code rural ;
3°/ que la légalité d'une préemption est appréciée d'après les conditions effectives de la rétrocession dans la mesure où la SAFER peut avoir à retenir des objectifs différents de ceux visés dans la décision de préemption ; que le juge judiciaire n'a pas le pouvoir de se prononcer sur l'opportunité de la préemption ou de la rétrocession à un candidat plutôt qu'à un autre ; qu'en considérant que le refus de M. X... acté dans le procès-verbal du 25 juin 2003 était juridiquement justifié quand celui-ci contestait l'opportunité de préempter au profit éventuel de M. Z... sans attendre que les opérations définitives de rétrocession aient eu lieu, la cour d'appel a violé les articles L. 143-2 du code rural et 1382 du code civil ;
4°/ que le droit de préemption du preneur en place ne fait échec à celui de la SAFER qu'à la condition que celui-ci soit l'acquéreur désigné par le projet de vente ; que les conditions de la préemption sont déterminées par les mentions de la déclaration d'intention d'aliéner ; qu'en affirmant que le droit de préemption de M. A..., preneur en place, faisait échec au droit de préemption de la SAFER quand les terres en cause ne devaient pas être acquises par M. A..., mais par Mme Y..., après éviction du preneur en place, la cour d'appel a violé les articles L. 143-6 et L. 412-8 du code rural ;
5°/ qu'une SAFER peut, à l'occasion de la rétrocession, retenir des objectifs différents de ceux visés dans la décision de préemption et n'est pas obligée de rétrocéder à celui dont la situation lui avait paru suffisamment significative pour justifier sa préemption ; qu'en reprochant à la SAFER un prétendu désintérêt porté à la situation du preneur en place, quand rien n'interdisait à M. A... qui avait renoncé à son bail pour permettre l'acquisition des parcelles par Mme Y..., de se porter candidat à la rétrocession de ces mêmes terres par la SAFER, la cour d'appel a violé l'article L. 143-2 du code rural ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'absence de consentement de Mme X... se révélait parfaitement à la lecture de la lettre d'information du notaire, la cour d'appel a pu déduire de ce seul motif que la SAFER ne pouvait trouver dans la démarche du notaire matière à estimer qu'il avait reçu mandat de Mme X..., ce qui faisait échec à l'application de la théorie de l'apparence contre les époux X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.