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Décisions

Cass. 3e civ., 10 septembre 2020, n° 19-14.254

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Nîmes, du 28 fév. 2019

28 février 2019

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 28 février 2019), le 3 octobre 2000, la commune de Laudun l'Ardoise (la commune) a donné à bail à M. et Mme O... une parcelle de terrain nu pour exploiter un camping.

2. M. et Mme O... ont crée un camping comportant soixante dix-sept emplacements, une piscine, un bâtiment à usage de réception, un snack, un logement de fonction, un bloc sanitaire et deux ateliers.

3. Le 6 juillet 2009, la commune a notifié aux preneurs un refus de renouvellement du bail et de paiement d'une indemnité d'éviction pour motif grave et légitime. Un arrêt irrévocable du 19 septembre 2013 a jugé que le refus de renouvellement du bail pour motif grave et légitime était justifié.

4. Le 7 juillet 2015, la société Le César a pris à bail le terrain pour neuf ans à compter du 1er juillet 2015.

5. Le 1er février 2016, M. O... a assigné la société Le César en paiement de la somme de 424 000 euros correspondant aux éléments corporels et à la clientèle de son fonds de commerce, tels qu'évalués à sa demande par un expert amiable.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en ses deux dernières branches, ci-après annexé

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

7. M. O... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes sur le fondement de l'enrichissement sans cause, alors :

« 1°/ que nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui ; qu'un fonds de commerce existe dès lors qu'il est justifié qu'une clientèle, qui en constitue l'élément essentiel, y est attachée ; qu'en l'espèce, M. O... faisait valoir, « qu'en prenant les lieux au mois de juillet 2015, et en créant une SARL destinée à la reprise d'une activité déjà créée, la SARL Le César s'est enrichie puisqu'elle n'a pas eu à supporter le coût humain et financier pour l'obtention d'une clientèle valorisée à plus de 226 000 euros et pour la création d'éléments corporels valorisés à plus de 197 000 euros » ; que la cour d'appel a relevé que les résultats obtenus par M. O... sur les produits d'exploitation hors TVA s'élevaient à 2 032 euros en 2014 et à 19 004 euros en 2015 ; qu'il résultait nécessairement de ces éléments que M. O... justifiait d'une clientèle réelle et certaine au jour de la prise de possession des lieux par la SARL Le César ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1371 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et les principes régissant l'enrichissement sans cause.

2°/ que nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui ; que la cessation temporaire d'activité n'implique pas en elle-même la disparition de la clientèle ; qu'en l'espèce, M. O... faisait expressément valoir que « le camping de M. O... était le seul camping établi sur la [...] », que ce village se situait « d'une part, dans la région Languedoc-Roussillon, région très prisée en période estivale et d'autre part, près de la majorité des sites touristiques les plus populaires notamment la Roc-sur-Cèze » ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il lui était demandé, si le fonds de commerce de M. O... ne restait pas apte, compte tenu de sa situation géographique attirant un nombre important de touristes, à s'assurer, lors de sa réouverture, une clientèle saisonnière, de sorte qu'il était justifié d'une clientèle actuelle et certaine, et non future et potentielle, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1371 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et des principes régissant l'enrichissement sans cause. »

Réponse de la Cour

8. Il résulte des articles L. 145-14 et L. 145-17 du code de commerce qu'en cas de refus de renouvellement du bail pour motif grave et légitime, le locataire sortant ne peut prétendre à aucune indemnité du fait de son éviction, notamment à celle correspondant à la valeur de la clientèle attachée à l'immeuble loué.

9. La cour d'appel a relevé que la commune avait refusé à M. O... le renouvellement de son bail pour motif grave sans indemnité d'éviction et qu'un arrêt irrévocable avait jugé valable le congé.

10. Il en résulte que M. O... ne pouvait prétendre à une indemnité fondée sur l'enrichissement sans cause.

11. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués et suggéré par la défense, l'arrêt se trouve légalement justifié.

PAR CES MOTIFS, La Cour :

REJETTE le pourvoi.