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Décisions

Cass. 2e civ., 7 avril 2016, n° 15-12.960

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

M. Vasseur

Avocat général :

M. Mucchielli

Avocats :

Me Blondel, Me Ricard, Me Rémy-Corlay

Reims, du 2 déc. 2014

2 décembre 2014

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 2 décembre 2014), que la Caisse d'épargne et de prévoyance de Champagne Ardenne, aux droits de laquelle vient la Caisse d'épargne et de prévoyance de Lorraine Champagne Ardenne (la banque), qui avait accordé le 18 octobre 2001 à M. X... un prêt immobilier pour lequel Mme Y..., usufruitière de l'immeuble acquis au moyen du prêt, s'était constituée caution hypothécaire, a fait délivrer à ces derniers, par actes respectivement datés des 21 juin et 23 juin 2010, un commandement de payer valant saisie immobilière ; que M. X... a soulevé une fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance de la Caisse d'épargne ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action en paiement contre M. X... en exécution du prêt reçu par notaire le 18 octobre 2001, alors, selon le moyen :

1°/ que la disposition de l'alinéa 2 de l'article 642 du code de procédure civile n'est que l'expression en matière procédurale d'une règle de portée générale applicable à la notification de tous les actes juridiques ou judiciaires et qu'il en est ainsi quelle que soit la qualification du délai et quand bien même il s'agirait d'un délai de prescription ; qu'en jugeant au contraire, pour dire prescrite l'action en paiement de la Caisse d'épargne et de prévoyance Lorraine Champagne Ardenne contre M. X..., que le terme du délai de l'article L. 137-2 du code de la consommation ne peut être reporté quand bien même il survient un samedi dès lors qu'il s'agit d'un délai de prescription et non de procédure, la cour d'appel viole, par refus d'application, le texte précité, ensemble l'article 2261 du code civil et l'article 5 de la Convention européenne de Bâle du 16 mai 1972 ;

2°/ que le principe de sécurité juridique, droit protégé par la juridiction européenne au titre du droit à un procès équitable, commande une uniformisation des règles de computation des délais pour agir, quelle que soit la qualification du délai en cause ; qu'en retenant néanmoins, pour dire prescrite l'action en paiement de la banque contre M. X..., que la prorogation du terme du délai prévu par l'article 642 du code de procédure civile ne s'applique qu'aux délais dits de procédure et non aux délais de prescription, quand par ailleurs cette prorogation est appliquée aux délais préfix, la cour d'appel viole l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, ensemble les règles qui gouvernent la computation des délais ;

3°/ que si le droit à un tribunal, dont le droit d'accès concret et effectif constitue un aspect, n'est pas absolu, les conditions de recevabilité d'une action ne peuvent toutefois en restreindre l'exercice au point qu'il se trouve atteint dans sa substance même ; qu'une telle atteinte est caractérisée lorsqu'un délai de prescription expire un samedi, un dimanche ou un jour férié sans que le terme du délai soit alors prorogé jusqu'au premier jour ouvrable qui suit ; qu'en déclarant prescrite l'action de la banque contre M. X..., motif pris de l'expiration du délai de prescription le 19 juin 2010 et du commandement de payer valant saisie immobilière délivré au débiteur le 21 juin 2000, bien qu'il résulte de ses propres constatations que le 19 juin 2010 était un samedi, la cour d'appel viole, par refus d'application, l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les règles qui gouvernent la computation des délais ;

Mais attendu que la France n'ayant pas ratifié la Convention européenne sur la computation des délais conclue à Bâle le 16 mai 1972, ses juridictions ne peuvent l'appliquer ;

Et attendu qu'ayant énoncé, par motifs propres et adoptés, que les règles de computation des délais de prescription doivent être distinguées de celles régissant les délais de procédure et qu'il résulte de l'article 2229 du code civil que la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli, la cour d'appel en a exactement déduit, sans méconnaître l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, que le délai de prescription applicable à la banque n'avait pas lieu d'être prorogé au premier jour ouvrable suivant son terme ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second moyen, qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.