Cass. 1re civ., 3 mai 1972, n° 70-13.591
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Rapporteur :
M. Gaury
Avocat général :
M. Blondeau
Avocat :
Me Lepany
SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DIVERSES BRANCHES : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE QUE LA DAME Y..., EMPLOYEE AU VESTIAIRE DU SALON DE COIFFURE EXPLOITE PAR LA SOCIETE ELYSEES WASHINGTON COIFFURE, EN FUT CONGEDIEE PAR LETTRE DU 23 MARS 1968 ;
QU'ELLE FIT ALORS ETAT D'UN ACTE DU 9 JUILLET 1966, SIGNE DE RENE X..., AUX TERMES DUQUEL LA SOCIETE LUI AURAIT CONFIE EN GERANCE LIBRE LE VESTIAIRE DES CLIENTS DE CE SALON MOYENNANT LE VERSEMENT D'UNE SOMME DE 30 000 FRANCS, QU'ELLE JUSTIFIE AVOIR REGLEE AU MOYEN DE DEUX CHEQUES DE 20 000 ET 10 000 FRANCS ;
QUE LA DAME Y... A ASSIGNE LA SOCIETE ELYSEES WASHINGTON COIFFURE EN RESTITUTION DE CETTE SOMME ET REPARATION DU PREJUDICE QU'ELLE SOUTENAIT AVOIR SUBI ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE OPPOSABLE A LA SOCIETE L'ACTE DU 9 JUILLET 1966 SUR LE FONDEMENT D'UN MANDAT APPARENT, ALORS QUE LA MAUVAISE FOI EXCLUAIT UN TEL MANDAT, QUE, POUR RENDRE ADMISSIBLE L'EXISTENCE D'UN MANDAT APPARENT, IL FAUDRAIT, SELON LE POURVOI, QUE L'ERREUR COMMISE PAR CELUI QUI S'EN PREVAUT SOIT COMMUNE ET LEGITIME, QUE L'ARRET ATTAQUE NE SE SERAIT PRONONCE, NI SUR LE POINT DE SAVOIR SI L'ERREUR ETAIT COMMUNE, NI SUR LE CARACTERE DE LEGITIMITE TENANT A CE QUE LES CIRCONSTANCES AUTORISAIENT LE TIERS A NE PAS VERIFIER LES LIMITES DES POUVOIRS DU PRETENDU MANDATAIRE, ET QU'IL AURAIT EGALEMENT OMIS DE REPONDRE AUX CONCLUSIONS DE LA SOCIETE TENDANT A ETABLIR LA MAUVAISE FOI, OU DU MOINS LA LEGERETE ET LA NEGLIGENCE FAUTIVE DE LA DAME Y..., QUI, TOUT EN EXCIPANT D'UN CONTRAT LUI ATTRIBUANT UNE GERANCE LIBRE, AURAIT ACCEPTE SANS PROTESTER UN EMPLOI SALARIE, ET QUI, DE SURCROIT, AURAIT ETE LA PREMIERE A NE PAS EXECUTER LES OBLIGATIONS QUI LUI INCOMBAIENT EN VERTU DU CONTRAT LITIGIEUX ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL RELEVE, TANT PAR MOTIFS PROPRES QUE PAR CEUX NON CONTRAIRES DES PREMIERS JUGES QU'ELLE A ADOPTES, QUE RENE X..., AVAIT LANCE LE FONDS DE COIFFURE REPUTE QUI ETAIT SON OEUVRE, QUE, S'IL NE FAISAIT PAS PARTIE DE LA SOCIETE A RESPONSABILITE DONT SON NEVEU JEAN-MARIE X... ETAIT LE GERANT, IL Y TRAVAILLAIT DE TEMPS A AUTRE ET Y AVAIT EN TOUT CAS SES ENTREES, QUE, DANS LE TEMPS QUI A PRECEDE LE CONTRAT LITIGIEUX, DAME Y... A RECU DE RENE X... UNE LETTRE FAISANT ETAT DE PAPIERS DEVANT PERMETTRE LA REGULARISATION PROJETEE, QUE SUR CETTE LETTRE, DONT L'EN-TETE IMPRIME REUNISSAIT LES NOMS DE RENE X... ET DE JEAN-MARIE X..., SUIVIS DE LA MENTION COIFFEURS HORS CLASSE, FIGURAIT EN OUTRE, EGALEMENT IMPRIMEE, L'INDICATION DU NOM COMMERCIAL DE LA SOCIETE, QUE LE CONTRAT LITIGIEUX A ETE PASSE AU NOM DE CELLE-CI ET QUE, SUR LE RECU REMIS PAR RENE X... A LA DAME Y... DE LA SOMME DE 30 000 FRANCS QU'ELLE A VERSEE EN DEUX CHEQUES DONT L'UN DE 20 000 FRANCS A ETE TOUCHE PAR LA SOCIETE, LE CACHET DE CELLE-CI ETAIT APPOSE ;
QU'AINSI LA COUR D'APPEL A PU ESTIMER QUE LES CIRCONSTANCES PERMETTAIENT LEGITIMEMENT A DAME Y..., MODESTE EMPLOYEE SUBALTERNE, DE CROIRE QU'EN TRAITANT AVEC RENE X..., ELLE CONTRACTAIT AVEC UN MANDATAIRE DE LA SOCIETE AGISSANT DANS LES LIMITES DE SES POUVOIRS NORMAUX ET DECIDER QUE CETTE DERNIERE DEVAIT ETRE TENUE SUR LE FONDEMENT D'UN MANDAT APPARENT ;
ET ATTENDU QU'EN ENONCANT QUE LA SOCIETE ELYSEES WASHINGTON COIFFURE NE DEMONTRE A LA CHARGE DE DAME Y... AUCUNE IMPRUDENCE NI AUCUN CONCOURS FRAUDULEUX ENTRE ELLE ET RENE X..., LES JUGES DU SECOND DEGRE, QUI N'ETAIENT PAS TENUS DE SUIVRE LES PARTIES DANS LE DETAIL DE LEUR ARGUMENTATION, ONT REPONDU AUX CONCLUSIONS PRETENDUMENT DELAISSEES ;
QUE LE MOYEN DOIT DONC ETRE REJETE ;
ET SUR LE SECOND MOYEN : ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR CONDAMNE LA SOCIETE, EN PLUS DU REMBOURSEMENT DE LA SOMME DE 30 000 FRANCS, AU PAYEMENT A LA DAME Y... D'UNE SOMME DE 6 000 FRANCS A TITRE DE DOMMAGES-INTERETS, ALORS QUE SI LA FAUTE REPROCHEE A LA SOCIETE ELYSEE WASHINGTON COIFFURE POUVAIT JUSTIFIER L'OPPOSABILITE DU CONTRAT AUQUEL ELLE N'AVAIT PAS ETE PARTIE PAR APPLICATION DE LA THEORIE DE L'APPARENCE, ET PAR CONSEQUENT, SA CONDAMNATION AU REMBOURSEMENT DE LA CAUTION VERSEE EN VERTU DE CE CONTRAT, CETTE FAUTE NE POUVAIT FONDER UNE SECONDE CONDAMNATION AU VERSEMENT D'UNE INDEMNITE, SANS QUE LES JUGES DU FOND SE SOIENT EXPLIQUES A LA FOIS SUR L'EXISTENCE D'UNE FAUTE DISTINCTE DE CELLE AYANT FONDE LA PREMIERE CONDAMNATION ET SUR LA NATURE DU PREJUDICE RESTANT A REPARER ;
MAIS ATTENDU QUE LES JUGES DU SECOND DEGRE, PAR ADOPTION DES MOTIFS NON CONTRAIRES DES PREMIERS JUGES, RELEVENT QUE LE CONTRAT EN CAUSE A PREVU QU'IL ETAIT VALABLE POUR UNE DUREE DE DEUX ANS A DATER DE LA SIGNATURE ET RENOUVELABLE PAR TACITE RECONDUCTION FAUTE D'AVOIR ETE DENONCE PAR L'UNE OU L'AUTRE DES PARTIES SIX MOIS AVANT LA DATE D'EXPIRATION, QU'AINSI LA RUPTURE INTERVENUE LE 23 MARS 1968 PAR LE FAIT DE LA SOCIETE ELYSEE WASHINGTON COIFFURE, ET SANS QUE LA PREUVE D'AUCUNE FAUTE SOIT RAPPORTEE A LA CHARGE DE DAME Y..., JUSTIFIE LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTERETS DE CELLE-CI ;
QU'AINSI LES JUGES DU FOND, QUI JUSTIFIENT SUFFISAMMENT L'EXISTENCE DU PREJUDICE PAR L'EVALUATION QU'ILS EN FONT, ONT LEGALEMENT JUSTIFIE LEUR DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 10 JUIN 1970 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.