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Décisions

Cass. 1re civ., 4 mars 1997, n° 94-18.552

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Laurent-Atthalin

Avocat général :

M. Gaunet

Avocat :

Me Vuitton

Versailles, ch. réun., du 1 juin 1994

1 juin 1994

Sur le moyen unique pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1998 du Code civil ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que si une personne peut être engagée sur le fondement d'un mandat apparent, c'est à la condition que la croyance du tiers au pouvoir du prétendu mandataire soit légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne vérifier lesdits pouvoirs ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, qu'en juillet 1982 Mlle X... est entrée en relation avec un caissier principal de la compagnie Assurances générales de France (AGF), au siège de cette compagnie, pour souscrire un contrat de capitalisation moyennant le versement de sommes d'argent en espèces, ce mode de paiement étant autorisé par la loi du 11 juillet 1986 lorsque la transaction porte sur des bons au porteur; qu'en décembre de la même année, Mlle X... a remis, dans un café, en deux versements, une somme de 399 000 francs en espèces à ce caissier qui avait été licencié deux mois auparavant et qui a détourné ces fonds; que Mlle X... a assigné la compagnie AGF en remboursement des sommes qu'elle avait versées ;

Attendu que pour accueillir sa demande, la cour d'appel a retenu que la remise des fonds dans un café situé à proximité de la banque d'où Mlle X... venait de retirer des espèces ne présentait pas un caractère clandestin dans la mesure où le caissier qui était à ses yeux toujours un représentant qualifié des AGF n'a fait aucune difficulté pour recevoir les espèces et lui a délivré un reçu établi sur un papier à en-tête de la compagnie; que dans ces conditions, rien n'autorisait Mlle X... à mettre en doute l'authenticité des pouvoirs du caissier ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les circonstances des remises des fonds n'autorisaient pas Mlle X... à se dispenser de vérifier les pouvoirs du prétendu mandataire, de sorte que sa croyance aux pouvoirs de celui-ci ne présentait pas un caractère légitime, la cour a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juin 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.