CA Paris, Pôle 5 ch. 3, 5 juillet 2017, n° 15/16820
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Areas Vie (Sté)
Défendeur :
Joaillerie Arax (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Thaunat
Conseillers :
Mme Fremont, Mme Rey
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 22 juillet 1999, la société AREAS VIE a donné à bail en renouvellement à la société ARAX JOAILLERIE des locaux commerciaux situés [...] 8ème, pour une durée de 9 ans, afin d'y exercer l'activité suivante «la fabrication, la réparation, l'importation et l'exportation, l'achat la vente en gros, en demi-gros et détail de joaillerie, bijouterie, orfèvrerie, horlogerie, bijouterie fantaisie et articles de Paris et également l'achat et la vente d'occasion de tous articles énumérés ci-dessus».
Par acte d'huissier de justice du 13 décembre 2007, la société AREAS VIE a fait signifier à sa locataire un congé avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction à effet au 30 juin 2008.
Par acte d'huissier de justice du 19 mars 2008, la société AREAS VIE a fait citer la société ARAX JOAILLERIE aux fins de fixation des indemnités d'éviction et d'occupation.
Par jugement du 2 décembre 2008, M. François R. a été désigné en qualité d'expert avec pour mission de donner son avis sur le montant de ces indemnités.
Ce dernier a déposé son rapport d'expertise le 13 janvier 2011 puis un complément d'expertise le 29 janvier 2013, concluant à une indemnité d'éviction dans l'hypothèse d'un transfert de fonds de 92.000'€ à titre principal outre 46.500'€ au titre des indemnités accessoires, et dans l'hypothèse d'une perte de fonds de 333.000'€ à titre principal outre 70.500'€ au titre des indemnités accessoires. Il a proposé de fixer à la somme de 35.640'€ par an le montant de l'indemnité d'occupation due depuis le 1er'juillet 2008.
Par jugement du 7 avril 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :
- Dit que par l'effet du congé comportant refus de renouvellement signifié le 13 décembre 2007, le bail a pris fin le 30 juin 2008,
- Dit que l'éviction entraîne la perte du fonds exploité par la société joaillerie Arax dans les locaux appartenant à la société Areas Vie situés à [...].
- Débouté la société Areas Vie de sa demande de déchéance du droit à indemnité d'éviction
- Fixé à la somme de 468.403,26 Euros le montant de l'indemnité d'éviction toutes causes confondues due par la société Areas Vie à la société Joaillerie Arax outre les frais de licenciement qui seront payés sur justificatifs,
- Dit que la société Joaillerie Arax est redevable à l'égard de la société Areas Vie d'une indemnité d'occupation à compter du 1er juillet 2008,
- Fixé le montant de cette indemnité d'occupation à la somme annuelle de 28.512 Euros, outre les taxes et charges,
- Dit que la compensation entre le montant de l'indemnité d'éviction et de l'indemnité d'occupation s'opérera de plein droit,
- Condamné la société Joaillerie Arax à payer à la société Areas Vie la somme de 419,72'€ au titre du coût des commandements.
- Condamné la société Joaillerie Arax à payer à la société Areas Vie la somme de 4 465 € au titre de la clause pénale.
- Condamné la société Areas Vie à payer à la société Joaillerie Arax la somme de 6.000 euros an titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné la société Areas Vie aux entiers dépens,
- Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.
La société AREAS VIE a interjeté appel du jugement par déclaration du 3'août 2015.
Dans ses dernières conclusions, signifiées le 18 avril 2017, la société AREAS VIE demande à la cour de :
Infirmer le jugement attaqué, et statuant à nouveau,
1°) A titre Principal : Déchéance du droit à l'indemnité d'éviction
-Constater que la société JOAILLERIE ARAX a laissé impayées plusieurs échéances d'indemnité d'occupation qui ont contraint AREAS VIE à former un incident devant le Juge de la mise en état ;
- dire et juger que ces infractions renouvelées aux clauses du bail constituent un motif grave et légitime ;
En conséquence :
- dire et juger que la société JOAILLERIE ARAX est déchue du droit au paiement de l'indemnité d'éviction ;
- ordonner l'expulsion sans délai de la société JOAILLERIE ARAX et de tous occupants de son chef ;
2°) A titre subsidiaire :
Sur l'indemnité d'éviction principale
- Constater que le résultat d'exploitation moyen des trois derniers exercices comptables de JOAILLERIE ARAX est négatif (' 3 531,33 €) ;
-Dire et juger qu'en l'absence de valeur du fonds de commerce, l'indemnité d'éviction est égale à la valeur du droit au bail ;
- Fixer à 76 600 € la valeur de droit au bail ;
Sur les indemnités accessoires
-Evaluer les frais de remploi à la somme de 4 578 € ;
-Débouter JOAILLERIE ARAX de sa demande concernant les frais de déménagement et la prise en charge des agencements futurs ;
-A titre subsidiaire, dire et juger que les frais de déménagement et d'agencements seront indemnisés sur la base de factures produites ;
-Dire et juger que le coût des éventuels licenciements ne pourra être indemnisé que sur justificatifs, dans la limite de l'indemnité conventionnelle de licenciement, à l'exclusion du préavis et des congés payés ;
3°) En toute hypothèse :
-Fixer à la somme de 48 400 € par an en principal le montant de l'indemnité d'occupation due par JOAILLERIE ARAX depuis le 30 juin 2008 ;
-Dire et juger que l'indemnité d'occupation sera révisée en fonction de la variation de l'indice INSEE du coût de la construction, l'indice de référence étant celui du 1er trimestre 2008, et condamner JOAILLERIE ARAX au paiement de celle- ci,
-Dire et juger que les intérêts légaux courront sur les rappels d'indemnité d'occupation, à compter de chaque échéance contractuelle depuis la date d'effet du congé ;
4°) Confirmer le jugement pour le surplus
- Condamner la société JOAILLERIE ARAX au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner JOAILLERIE ARAX aux entiers dépens et admettre la SCP G. B., avocats, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions, signifiées le 25 avril 2017, la société JOAILLERIE ARAX demande à la cour de :
Débouter la société AREAS VIE de sa demande principale en déchéance du droit au paiement de l'indemnité d'éviction,
Sur l'indemnité d'éviction principale
Constater l'absence de tout débat contradictoire sur les comptes des exercices 2010 et 2011, compte tenu de la mission limitée confiée à l'Expert par l'Ordonnance du 10 avril 2012 ;
- Vu la nécessaire prise en compte des exercices 2012 et 2013 ;
- Vu la valeur de droit au bail de 300.000 euros;
- Vu la valeur du fonds de commerce de 600.000 euros
- Vu les indemnités accessoires de 120.000 euros
Fixer l'indemnité d'éviction due par la société AREAS VIE à la société JOAILLERIE ARAX à la somme de 720.000 euros.
En conséquence, condamner la société AREAS VIE au paiement de ladite somme de 720.000 euros
- Fixer à la somme de 35.200 euros le montant de l'indemnité d'occupation due par la société JOAILLERIE ARAX depuis le 30 juin 2008 sous déduction des sommes versées par cette dernière à titre provisionnel ;
Subsidiairement, désigner à nouveau M. R. pour qu'il prenne en compte les résultats 2011, 2012 et 2013 ;
- débouter la société AREAS VIE de sa demande relative aux intérêts légaux, au coût de deux commandements de payer et à la compensation judiciaire des sommes respectivement dues par les parties ;
- Condamner la société AREAS VIE au paiement de la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner la société AREAS VIE aux entiers dépens et admettre Maître Michel G., avocat, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 mai 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la déchéance du droit à indemnité d'éviction :
Le refus de renouvellement signifié par le bailleur a ouvert droit au profit du locataire, d'une part en vertu de l'article L145-14 code de commerce à une indemnité d'éviction et d'autre part, selon l'article L145-28 du même code, au maintien dans les lieux du preneur jusqu'au paiement de cette indemnité, ainsi qu'au paiement au propriétaire d'une indemnité d'occupation à compter du 1er'juillet 2008, jusqu'à la libération des lieux.
En l'espèce, la bailleresse soutient que la société locataire serait déchue de son droit au paiement d'une indemnité d'éviction au motif qu'elle a multiplié les incidents de paiement de l'indemnité d'occupation.
Ainsi que l'ont retenu à juste titre les premiers juges, la société locataire a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire en 1997 puis par jugement du 24 février 1999, le tribunal de commerce de Paris a arrêté son plan de continuation pour une durée de onze ans. Ainsi la société locataire a été placée dans une situation où, outre les charges courantes, elle devait régler les échéances du plan ce qui entraînait une trésorerie tendue puisque le passif étant supérieur à 5 millions de francs, elle devait payer chaque année environ 500.000 francs soit un peu moins de 100.000'€.
Si des retards se sont produits, pour les échéances des 2ème, 3ème et 4ème trimestre 2009, 3ème'trimestre 2010 et 1er'trimestre 2011 la société locataire a toujours régularisé sa situation et réussi à rembourser la totalité des créanciers de son plan. Les pièces produites aux débats par la locataire montent qu'elle a eu des difficultés à respecter son plan mais que finalement celui-ci a bien été exécuté. Celui ci a été prorogé pour une durée de trois mois jusqu'au 20 janvier 2011.
Compte tenu de ces éléments, de la régularisation rapide des impayés, la faute commise consistant à ne pas avoir payé à la date exacte le montant de l'indemnité d'occupation, ne constitue pas une faute suffisamment grave pour entraîner la déchéance du droit à l'indemnité d'éviction. En conséquence, la bailleresse doit être déboutée de sa demande de déchéance du droit à paiement de l'indemnité d'éviction et le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef.
En revanche, la société ARAX doit conserver à sa charge le coût du commandement du 5 novembre 2009 soit 228,34'€ et celui du 10 décembre 2010 soit 191,38'€, ainsi que la clause pénale de 10% stipulée au bail soit 4465'€.
Sur le montant de l'indemnité d'éviction :
Les locaux sont situés [...], à proximité immédiate de la [...]. L'expert indique que le 8ème arrondissement est traditionnellement un arrondissement de bureaux que le début de la [...], se caractérise par une commercialité de quartier, c'est à dire modéré en semaine et dérisoire le week-end. L'expert note qu'à part un Monoprix et un commerce Picard, il n'existe pas d'enseigne de notoriété et qu'il n'y a pas de concurrence à proximité dans le domaine concerné de bijouterie horlogerie, ni de synergie avec les commerces proches.
Les locaux pris à bail se trouvent dans un immeuble de style haussmanien, élevé sur sous sol, en un rez-de-chaussée, quatre étages droits, un cinquième étage en retrait et un sixième étage aménagé sous combles.
L'expert indique que les locaux se résument en fait à un grand atelier avec une boutique banale d'accompagnement en façade. Les locaux sont en état d'usage, bien entretenus, mais pas réellement modernes. La surface de réception de clientèle est bien aménagée (moquette, lustre sous belle hauteur sous plafond, vitrines anciennes etc.). Le matériel et l'agencement sont simples: petit outillage à main, pinces, meules, bac étanches à chimie, paillasse. Le tout peu volumineux mais en bon état d'usage et d'entretien. La surface pondérée de 88m²P proposée par l'expert, n'est pas discutée par les parties.
Selon l'expert, il s'agit d'un commerce de joaillerie uniquement. C'est une activité de création dans la mesure où M. Arax dessine et fabrique les pièces qu'il commercialise. Ainsi seulement 15% de la production n'est pas fabriquée sur [...] grande majorité de la production vendue l'est dans une gamme de prix qui oscille entre 500 et 15.000'€. Les acquéreurs sont des chalands et des habitués vu l'ancienneté de l'établissement.
Sur l'indemnité principale :
Aux termes des dispositions de l'article L.145-14 du code de commerce, l'indemnité d'éviction doit être égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement; elle comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.
Cette indemnité ne peut en tout état de cause être inférieure à la valeur du droit au bail.
Le droit au bail est le capital correspondant à l'intérêt d'être situé à un emplacement donné pour exercer une activité donnée moyennant un loyer donné. Plus d'emplacement est bon, la destination contractuelle large et le loyer modéré, plus la valeur du droit au bail est élevé. Cette valorisation s'effectue par la capitalisation de la différence entre la valeur locative de marché des locaux et le loyer effectivement acquitté ou qui aurait été acquitté en cas de renouvellement de bail.
L'expert judiciaire a relevé des références variant de 298'€ le m² pour un commerce de prêt à porter [...] à 952'€ le m² pour un bar à cocktail [...], les références des renouvellement amiable déplafonnés variant entre 348'€ le m² pour un commerce d'articles de musique [...] en avril 2009 à 630'€, pour un traiteur [...]. A juste titre l'expert a écarté les références données par le preneur faute de certitude quant aux pondérations à appliquer. Dès le lors la valeur locative sans pas de porte doit être fixée à la somme de 550'€ le m².
La surface pondérée du local litigieux, qui n'est pas discutée par les parties est de 88'm². Le loyer à la date du refus de renouvellement au 30 juin 2008 s'élève à 33.083,47'€.
Dans ces conditions, le différentiel s'élève à la somme de 15.131,53'€.
Compte tenu de la commercialité très moyenne du secteur, qui n'a aucun rapport avec la [...], le coefficient de 6 proposé par l'expert doit être retenu.
Il s'ensuit que la valeur du droit au bail a été correctement apprécié par l'expert judiciaire à la somme de 92.000€.
L'avis de l'expert selon lequel l'éviction entraînera la perte du fonds n'est pas sérieusement démenti par la bailleresse sur laquelle l'article L145-14 de commerce fait reposer la charge de la preuve que le préjudice subi par le preneur évincé serait moindre.
L'expert a qualifié le fonds exploité par le locataire de fonds de travail au sens où il ne revêt pas le caractère d'un investissement spéculatif mais procure à ce dernier l'essentiel de ses revenus.
En matière de fonds de travail, il est d'usage d'appliquer un pourcentage au chiffre d'affaires moyen des trois derniers exercices. En l'espèce la société locataire verse aux débats ses liasses fiscales pour les années 2011, 2012 et 2013. Ses chiffres d'affaires se sont élevés à 533.752'€, 573.989'€ et 571.103 €, soit un chiffre d'affaires moyen de 559.614,66€. Un chiffre d'affaires est cependant réalisé dans la boutique de Deauville qu'il convient de déduire dans les proportions retenues par l'expert, faute de précisions comptables sur ce point, s'agissant pour Deauville d'une toute petite boutique, laquelle est assimilée à une vitrine, extrêmement bien située.
Dès lors, le chiffre d'affaires moyen s'élève à 559.614,66'€ x 0,85 = 475.672,46'€.
Compte tenu de l'activité actuelle de joaillerie, du peu d'aménagement et d'équipement, de la faible rentabilité, du faible réseau commercial, de la faible proportion de surface de vente au regard des surfaces arrières en nature d'atelier, de la faible valorisation du droit au bail, le pourcentage de 50% doit être retenu. La valeur du fonds est dans ces conditions de 475.672,46'€ x 50% soit 237.836,23'€ arrondie à 237.900'€.
Sur les indemnités accessoires :
Le fait que l'indemnité d'éviction prenne le caractère d'une indemnité de remplacement ne fait pas obstacle à l'appréciation des indemnités dites accessoires que subit le preneur évincé du fait de l'éviction.
Sur les frais de remploi :
Ces frais sont destinés à permettre au locataire évincé de faire face aux frais qu'il devra débourser à l'occasion de l'achat d'un fonds de commerce d'une valeur équivalente à celui dont il est évincé et comprennent notamment les droits de mutation à payer et les frais d'agence et de rédaction d'acte.
La proposition de l'expert de les chiffrer à 10% de la valeur du fonds est conforme aux usages et doit être approuvée. Dans ces conditions, ils s'élèvent à la somme de 23.790'€.
Sur les frais de déménagement :
Le bailleur conteste la prise en charge des frais de déménagement. La cour relève que l'expert constate que la bijouterie possède trois coffres-fort dont l'un en sous sol. Dès lors, compte tenu de cette spécificité c'est à juste titre que l'expert a proposé une somme de 10.000'€ à ce titre qui doit être retenue.
Sur les frais d'agencement futurs :
Le bailleur s'oppose à la prise en charge de ces frais. Le preneur sollicite une somme supérieure à celle accordée par les premiers juges.
Il est constant que le bailleur doit participer aux frais d'agencement futur. En l'espèce, l'expert relève sans être contredit, que la surface de réception de clientèle des locaux évincés est luxueusement aménagée avec une moquette épaisse, des boiseries et des aménagements de présentoirs. L'atelier dispose d'une paillasse carrelée. Il note par ailleurs à juste titre qu'il faut prendre en compte les aménagements spécifiques relatifs à l'activité exercéesoit l'installation de verres feuilletés en devanture. Dans ces conditions la participation forfaitaire à la réinstallation proposée par l'expert de 15.000'€ est justifiée.
Sur le trouble commercial :
La société AREAS ne conteste pas l'indemnité allouée par le tribunal soit la somme de 8000'€ qu'il y a lieu de retenir.
Sur les frais divers :
Ils correspondent aux formalités au registre du commerce, aux consultations juridiques et aux frais divers estimés forfaitairement à la somme de 2500'€ et aux frais de mailing clients et fournisseurs, au changement des cartes de visite et de papier à en-tête estimé forfaitairement à la somme de 2000'€. Ces sommes accordés par les premiers juges, ne sont pas contestées par le bailleur. Il convient de les retenir.
Sur les frais de licenciement :
Les frais de licenciement seront payés sur justificatifs. Ces frais de licenciement comprendront outre l'indemnité conventionnelle ou légale de licenciement, les indemnités de préavis et de congés payés, contrairement à ce que soutient le bailleur, le licenciement ayant pour origine l'éviction du preneur et le bailleur devant lui rembourser tous les frais qui en découlent.
Les indemnités accessoires sont en conséquence constituées de la somme des différentes indemnités précitées soit la somme totale de (23.790'€ +10.000'€ + 15.000€ + 8000'€ + 4.500'€) soit 61.290'€ outre les frais de licenciement.
Sur l'indemnité d'occupation :
En application de l'article L145-28 du code de commerce, le locataire évincé qui se maintient dans les lieux est redevable d'une indemnité d'occupation jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction calculée d'après la valeur locative, tout en corrigeant cette dernière de tous éléments d'appréciation. La bailleresse sollicite la fixation de cette indemnité à la somme de 48.000'€, alors que la société locataire demande qu'elle soit fixée à la somme de 35.200'€.
La cour rappelle que l'indemnité d'occupation doit être fixée non pas au regard de la valeur locative de marché mais au regard des conditions spécifiques de la situation des parties. En l'espèce, la bailleresse depuis la date d'effet du congé jusqu'à la libération par la société locataire n'a eu à procéder à aucun investissement en vue de la mise sur le marché des lieux loués contrairement à la situation qui aurait été la sienne dans le cas d'une nouvelle location, et n'a eu à faire face à aucun frais de transaction ou de négociation et ne subit aucune vacance de locaux. En outre, la possibilité d'un paiement par compensation avec l'indemnité d'éviction supprime tout risque d'impayé. C'est la raison pour laquelle il convient de suivre l'avis de l'expert quant à la fixation à la somme de 450'€ le mètre carré de l'indemnité d'occupation. Pour 88m²P, l'indemnité s'élève à la somme de 39.600'€.
Cependant, il convient de tenir compte de la précarité des conditions d'occupation de la société locataire depuis la date du congé et les difficultés qui en résulte pour l'exploitation du fonds. Un abattement de 10% conforme aux usages sera retenu. Dès lors, l'indemnité d'occupation doit être fixée à la somme de 35.640'€ et le jugement doit être infirmé sur ce point.
Le bail contenant une clause d'échelle mobile triennale, l'indemnité d'occupation sera révisée conformément aux stipulations prévues au bail.
Les conditions de la compensation entre ces créances réciproques étant réunies, il convient de l'ordonner.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant des indemnités d'éviction et d'occupation,
Fixe à la somme de 299.190'€ le montant de l'indemnité d'éviction toutes causes confondues due par la société AREAS VIE à la société JOAILLERIE ARAX outre les frais de licenciement (indemnité conventionnelle ou légale de licenciement, indemnité de préavis et indemnité de congés payés) qui seront payés sur justificatifs,
Fixe le montant de l'indemnité d'occupation à la somme annuelle de 35.640'€ outre les taxes et les charges à compter du 1er juillet 2008,
Dit que l'indemnité d'occupation sera révisée conformément au bail à chaque période triennale en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction, à la hausse ou à la baisse,
Dit que les intérêts au taux légal sur le rappel des indemnités d'occupation courront à compter du présent arrêt,
Y ajoutant,
Condamne la société AREAS VIE à payer à la société JOAILLERIE ARAX une somme de 5000'€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société AREAS VIE aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Michel G., avocat en application de l'article 699 du code de procédure civile.