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Décisions

Cass. com., 14 janvier 2014, n° 12-23.923

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Paris, du 24 mai 2012

24 mai 2012

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2012), que le 23 juin 2000, la société Saint-Claire internationale, devenue la société Groupe Bruno Matin (la société) a donné à la société Le Crédit lyonnais (la banque) un mandat de gestion de portefeuille orientation dynamique ; que le 4 février 2009, la société a assigné la banque en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut pas refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties et ne peut, en conséquence, refuser d'évaluer le montant d'un dommage dont il constate l'existence en son principe ; qu'en déboutant la société de sa demande d'indemnisation du préjudice tiré de la perte de la valeur de son portefeuille subie, après avoir considéré que la banque avait failli à son devoir de conseil lors de la conclusion et l'exécution du mandat de gestion qui lui avait été confié en juin 2000 par la société notamment en omettant de lui apporter des conseils adaptés lors de la chute du marché qui s'était produite en 2000 et 2001 qui lui auraient permis de modifier le mode de gestion dynamique en une gestion équilibre ou sécurité, aux motifs qu'elle ne rapportait pas la preuve d'une perte de son capital et par voie de conséquence d'un préjudice certain et actuel dès lors qu'elle ne communiquait aucun relevé de portefeuille récent permettant de connaître la perte qu'elle aurait subie et qu'au surplus elle ne prétendait pas avoir vendu ses titres, la cour d'appel, qui a refusé d'évaluer le montant du dommage tiré de la perte de la valeur de son portefeuille subi par la société dont elle a pourtant constaté l'existence en son principe, a violé l'article 4 du code civil ;

2°/ qu'est certain le dommage subi par une personne par l'effet de la faute d'un professionnel ; qu'en énonçant que la société ne rapportait pas la preuve d'une perte de son capital et par voie de conséquence d'un préjudice certain et actuel, cependant qu'elle constatait que la banque, organisme bancaire professionnel, avait commis un manquement à son devoir d'information et de conseil envers la société, dont elle constatait la qualité de cliente non avertie, lors de la conclusion du mandat de gestion et en cours d'exécution de celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que la banque avait commis des manquements lors de la conclusion du mandat de gestion en ne conseillant pas à la société un placement adapté à ses objectifs et en ne l'informant pas des risques encourus concernant les opérations envisagées, ainsi qu'au cours de l'exécution du mandat, en s'abstenant de lui prodiguer des conseils et de lui proposer de modifier le mode de gestion "dynamique" en une gestion "équilibre" ou "sécurité", l'arrêt retient que la société, qui ne communique aucun relevé de portefeuille récent permettant de connaître la perte qu'elle aurait subie et ne prétend pas avoir vendu ses titres, ne rapporte pas la preuve d'une perte de son capital et, par voie de conséquence, d'un préjudice certain et actuel, et qu'en l'absence d'un préjudice avéré, la perte de chance n'est dès lors qu'éventuelle ; que la cour d'appel ayant, par ces motifs, considéré que le préjudice susceptible d'être réparé consistait en une perte de chance, est inopérant le grief qui lui reproche d'avoir refusé d'évaluer celui tiré de la perte de valeur du portefeuille de la société ;

Attendu, d'autre part, que le caractère certain du préjudice allégué par le client non averti d'un prestataire de services d'investissement ne se déduit pas du manquement de ce dernier à son obligation d'information ou de conseil ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.