Cass. 3e civ., 23 juin 1999, n° 97-17.085
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
Mme Boulanger
Avocat général :
M. Baechlin
Avocat :
SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 20 mars 1997), que le syndicat secondaire des copropriétaires de l'ensemble commercial Les Vertes Campagnes (le syndicat) et la compagnie AIG Europe, assureur de l'immeuble, ont été condamnés à réparer les conséquences matérielles d'un dégât des eaux provenant de la toiture au motif que ce sinistre était dû tant à un vice de construction qu'à une absence d'entretien des écoulements de cette toiture ; que, dans les rapports de l'assureur et de l'assuré, l'obligation du premier a été limitée aux 2/3, le second supportant, en application de la police d'assurance, la part des dommages imputables à l'absence d'entretien ; que le syndicat et la compagnie AIG Europe avaient appelé en garantie la société Bouteille, syndic de la copropriété ;
Attendu que la compagnie AIG Europe fait grief à l'arrêt de la débouter de son appel en garantie formé à l'encontre de la société Bouteille, alors, selon le moyen, "1 ) que tout fait quelconque de l'homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en l'espèce où le rapport d'expertise indiquait que plusieurs dégâts des eaux étaient survenus depuis 1985 dans les locaux du centre commercial et notamment dans ceux de Mme X... concernés par les infiltrations survenues en 1992, la compagnie AIG Europe reprochait au syndic de s'être abstenu depuis 1985 de "s'assurer (...) que les ouvrages avaient été réalisés conformément aux règles de l'art" ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si le défaut de diligence du syndic pour s'assurer de l'absence de vice dans la construction des toitures n'était pas constitutive d'une faute par abstention susceptible d'engager sa responsabilité civile, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ; 2 ) qu'en considérant que la compagnie AIG Europe ne pouvait reprocher au syndic de l'immeuble en copropriété les vices de construction affectant cet immeuble puisque le syndic était le mandataire du syndicat des copropriétaires et non le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a omis de répondre aux conclusions de la compagnie AIG Europe qui, abstraction faite de la responsabilité du syndic dans l'existence même des vices, développait le moyen selon lequel le syndic avait engagé sa responsabilité civile en s'abstenant, depuis 1985, date du premier dégât des eaux, de faire vérifier la conformité des toitures de l'immeuble aux règles de l'art ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile" ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la preuve des dégâts des eaux antérieurs allégués devant l'expert n'était pas rapportée, la cour d'appel n'était tenue, ni de procéder à une recherche, ni de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 1993 du Code civil, ensemble l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant ;
Attendu que, pour débouter le syndicat de son appel en garantie, l'arrêt retient que ce dernier peut rechercher la responsabilité du syndic sur le fondement de l'article 1992 du Code civil, qu'aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic est chargé d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien, que l'entretien et la vérification des toitures n'ont pas fait l'objet d'un contrat avec une entreprise, qu'il n'est pas établi que même si un tel contrat avait été proposé par le syndic, l'assemblée générale des copropriétaires l'aurait accepté et que le syndic avait reçu quitus de sa gestion à chaque assemblée générale ordinaire ;
Qu'en statuant ainsi, en déchargeant le syndic de sa responsabilité par un motif hypothétique et alors que le quitus n'est libératoire de responsabilité que pour les actes de gestion dont l'assemblée générale a eu connaissance et qu'elle a été à même d'apprécier, la cour d'appel a violé le premier texte susvisé et n'a pas satisfait aux exigences du second ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a mis hors de cause la société Bouteille, l'arrêt rendu le 20 mars 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon.