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Décisions

Cass. com., 2 décembre 1997, n° 95-19.579

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Métivet

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

Me Foussard, SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin

Paris, du 9 sept. 1994

9 septembre 1994

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 9 septembre 1994), que M. Y..., la société Figepar et la société AEP (les consorts Y...) ont, au début de l'année 1990, donné mandat à M. X..., titulaire de la carte professionnelle d'auxiliaire de la profession boursière, de gérer leurs portefeuilles de valeurs mobilières déposées sur des comptes ouverts chez la société de bourse Goy Hauvette, devenue Cofibourse, aux droits de laquelle se trouve la société Transbourse ; qu'en raison des dispositions de la loi n° 89-531 du 2 août 1989 M. X... a dû cesser son activité à titre personnel le 1er avril 1990, qu'il est devenu salarié de la société de gestion de portefeuille Promépar et a informé les consorts Y... que cette dernière poursuivrait l'exécution des contrats de mandat en cours, lui-même continuant à gérer personnellement leurs portefeuilles ; que cette gestion s'est poursuivie jusqu'au 11 septembre 1990 ; que les consorts Y... ont assigné M. X..., la société Promépar et la société de bourse devant le tribunal de commerce de Paris pour voir constater l'absence de mandat confié à la société Promépar, sa responsabilité au regard des conséquences de la gestion à compter du 1er avril 1990 et ordonner la remise de leurs comptes dans l'état où ils étaient le 31 mars 1990 ;

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu que les consorts Y... reprochent à l'arrêt d'avoir refusé d'ordonner à la société Promépar de rendre des comptes et rejeté leurs demandes de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, que, premièrement, la nécessité d'un mandat écrit qu'impose une règle d'ordre public dans le but de protéger la clientèle exclut que l'existence d'un mandat puisse être déduite de simples indices ou présomptions ; qu'en procédant comme ils l'ont fait les juges du fond ont violé les articles 6, 1134 et 1984 du Code civil et 20 de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 ; alors que, deuxièmement, sauf exception, le silence n'équivaut pas à une aceptation ; que, certes, dans le cas d'un contrat préexistant, le reçu de relevés de compte non suivi de protestation peut valoir acceptation des mentions qui figurent sur le relevé de compte ; que, cependant, le seul envoi de relevé de compte ou de tout autre document non assorti de protestation ne peut valoir acceptation de contracter, lorsqu'aucun contrat n'a été préalablement conclu entre l'expéditeur des relevés et leur destinataire ; qu'en décidant le contraire les juges du fond ont, en tout état de cause, violé les articles 6, 1134 et 1984 du Code civil ; alors que, troisièmement, n'ayant pas constaté que les contrats dont bénéficiait initialement M. X... stipulaient une possibilité de substitution, les juges du fond devaient rechercher si, eu égard à la nature et à l'objet de la mission qui lui était confiée, il était permis de présumer que M. X... avait la faculté de se substituer un tiers ; que, faute de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1984 et 1994 du Code civil ; alors que, quatrièmement, le caractère d'ordre public de la règle imposant l'établissement d'un écrit exclut qu'une ratification puisse intervenir ; qu'en décidant le contraire les juges du fond ont violé les articles 6, 1134, 1338 et 1984 du Code civil ; et alors que, cinquièmement, le simple reçu sans protestation d'avis d'opérations et de relevés, dans l'hypothèse où il n'existe pas de relation contractuelle préexistante, ne peut établir, en raison du caractère équivoque du silence, l'existence d'une ratification ; que, de ce point de vue encore, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 6, 1134 et 1984 du Code civil ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient que M. X... s'était substitué la société Promépar dans l'exécution des mandats qui lui avaient été confiés par les consorts Y... et en avait informé ces derniers qui n'avaient manifesté aucune opposition ; que si cette substitution n'était pas autorisée par les contrats de mandat, ce qui, aux termes de l'article 1994 du Code civil, avait pour seul effet de rendre le mandataire responsable de la gestion de celui qu'il s'est substitué, elle n'était pas interdite ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations la cour d'appel, qui n'a pas retenu l'existence, entre les consorts Y... et la société Promépar, de mandats déduits de simples indices ou présomptions ou d'une ratification tacite, a légalement justifié sa décision et a pu statuer comme elle a fait ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.