Cass. 1re civ., 18 mars 2020, n° 19-15.160
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 février 2019), et les pièces de la procédure, M. I... a interjeté appel d'un jugement rendu à son encontre dans un litige l'opposant à la société civile immobilière Damar (la SCI) relatif à la vente de biens immobiliers en l'état futur d'achèvement. Un arrêt a confirmé le jugement déféré sur le caractère parfait de la première vente et, avant-dire droit sur la seconde, ordonné une expertise. L'expert a déposé son rapport le 30 septembre 2013 et M. I... a conclu une dernière fois le 31 janvier 2014. Par ordonnance du 26 février 2014, le conseiller de la mise en état a, sur demande des parties, prononcé le retrait du rôle de l'affaire. M. I... a été placé sous curatelle renforcée par jugement du juge des tutelles du 26 novembre 2015, qui a désigné l'association MSA 3A en qualité de curateur. Le 15 janvier 2016, il a déposé et signifié des conclusions aux fins de rétablissement au rôle de l'affaire.
2. La SCI a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident aux fins de voir constater la péremption de l'instance d'appel.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première et deuxième branches, et le troisième moyen, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
4. M. I... et l'association MSA 3A font grief à l'arrêt de constater la péremption de l'instance d'appel et son extinction, de déclarer la cour d'appel dessaisie et de dire le jugement passé en force de chose jugée alors « que constitue une diligence interruptive, le dépôt de conclusions par le majeur placé sous curatelle, même sans l'assistance de son curateur ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 386 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. L'effet interruptif d'une diligence, lorsqu'elle consiste en un acte de la procédure, est sans lien avec la validité de cet acte.
6. Pour dire l'instance périmée, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que les conclusions aux fins de rétablissement au rôle de l'affaire déposées le 15 janvier 2016 par M. I..., sans l'assistance de son curateur, ne sont pas recevables et n'ont donc pas pu interrompre le délai de péremption. Il ajoute qu'un acte de procédure irrégulier n'est pas de nature à interrompre ce délai, même s'il traduit sans équivoque la volonté du plaideur de poursuivre l'instance, la demande de rétablissement au rôle n'étant pas affectée d'un vice de forme mais d'une irrégularité de fond, dès lors que M. I... n'a pas qualité pour agir en l'absence de son curateur.
7. En statuant ainsi, alors que les conclusions aux fins de rétablissement au rôle, prises par le majeur protégé, même sans l'assistance de son curateur, traduisaient sa volonté de poursuivre l'instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du deuxième moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la SCI Damar aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la SCI Damar et la condamne à payer à M. I... et à l'association MSA 3A la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille vingt.