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Décisions

Cass. 2e civ., 31 janvier 2002, n° 98-23.336

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Paris, du 7 oct. 1998

7 octobre 1998

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les époux A... ont vendu, par l'intermédiaire de l'agence immoblière "Le Cabinet Bono Bernard" un fonds de commerce aux époux Y... ; que ce fonds étant exploité dans un immeuble ayant fait l'objet pour partie d'une expropriation, les acquéreurs ont assigné leurs vendeurs et l'agence immobilière en paiement de dommages-intérêts ; qu'un jugement du 10 mai 1994 a mis hors de cause l'agence immobilière et a accueilli la demande dirigée contre les époux A... ; que les époux A... et les époux Y... ont interjeté appel de ce jugement ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'agence Le Cabinet Bono Bernard fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer aux époux Y... une certaine somme à titre de dommages-intérêts et à garantir les époux A..., à concurrence de moitié de toutes les sommes mises à leur charge, au profit des époux Y..., alors, selon le moyen :

1 / qu'il résulte des termes clairs et précis de l'acte de cession du 2 septembre 1991 que l'acquéreur a été informé de la lettre émanant des services fonciers de la Ville de Paris du "9 août 1991, lettre leur précisant de la demande de la Mairie de Paris, d'une procédure d'évaluation en vue d'une éventuelle indemnité de dépréciation" et qu'il a déclaré vouloir en faire son affaire personnelle ; qu'il a donc été informé du risque d'une procédure d'expropriation, mais que, pressé de conclure l'acte, il a accepté de courir ce risque en toute connaissance de cause ; que l'agent immobilier rédacteur de l'acte n'a donc commis aucune faute ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis de l'acte de cession, et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;

2 / qu'en tout état de cause, les actes délivrés par l'Administration sont présumés légaux jusqu'à preuve contraire ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'agent immobilier rédacteur de l'acte a informé l'acquéreur de la note d'urbanisme délivrée le 12 août 1991 par la Ville de Paris qui n'indiquait nulIement l'existence de la procédure d'expropriation, et que l'acquéreur l'a déchargé de toute responsabilité à cet égard ; qu'en jugeant cependant que la clause d'irresponsabilité stipulée à l'acte était manifestement privée d'effet compte tenu de la faute lourde que l'agent immobilier avait commise, alors que ne constitue pas une faute lourde le fait d'avoir cru à la validité d'un acte administratif en réalité erroné, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que l'agence immobilière devait, en présence d'informations contradictoires, s'interroger sur l'existence d'une procédure d'expropriation en cours ; que c'est sans dénaturer l'acte de cession du 2 septembre 1991 qu'elle a, après avoir caractérisé la faute de l'agence dont l'attention avait été attirée sur l'éventualité du versement d'une indemnité de dépréciation, écarté à bon droit la clause d'irresponsabilité stipulée à l'acte ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 403 et 409 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que le désistement de l'appel emporte acquiescement au jugement ; que l'aquiescement emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours, sauf si postérieurement une autre partie forme régulièrement un recours ;

Attendu que pour déclarer recevable l'appel provoqué des époux Y... formé le 19 janvier 1995 contre le Cabinet Bono Bernard à l'encontre du jugement de première instance, I'arrêt, après avoir relevé que les époux Y... s'étaient désistés de leur appel principal, retient que l'appel provoqué trouve son support dans l'appel principal, parfaitement recevable, interjeté par les époux A... le 1er juillet 1994 à l'encontre des époux Y... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le désistement d'appel intervenu valait acquiescement au jugement et emportait renonciation aux voies de recours et qu'aucune autre partie n'avait formé postérieurement un appel de ce jugement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que l'arrêt a déclaré recevable l'appel provoqué des époux Y... contre le Cabinet Bono Bernard et a condamné celui-ci à leur payer des dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 7 octobre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives des époux Y... et des époux A... ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, prononcé et signé par Mme Borra, conseiller le plus ancien non empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en l'audience publique du trente et un janvier deux mille deux et signé par Mlle Laumône, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.