CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 10 mars 2015, n° 13/21286
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Remsar Limited (Sté)
Défendeur :
Chimirec Développement (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Hirigoyen
Conseillers :
Mme Hebert-Pageot, M. Boyer
Avocats :
Me Monta, Me Mascre, Me Bernabe, Me Berger-Perrin
La société Immark France, spécialisée dans le démantèlement et le recyclage de déchets d'équipements électriques et électroniques, ayant son siège social à Beaucaire (30) a été constituée sous forme de société par actions simplifiée entre M. Adrien X..., la société Chimirec Developpement et la société de droit irlandais Resmar Ltd, son capital réparti ainsi :
- M. X : 1.470 actions,
- Chimirec Developpement : 1.470 actions,
- Resmar Ltd : 60 actions,
M. X et la société Resmar détiennent ensemble 1530 actions soit 51 % du capital.
En application de l'article 14 des statuts de la société Immark France, il a été constitué deux groupes d'actionnaires : le groupe A, constitué de M. X et de la société Resmar Ltd, le groupe B, constitué de la seule société Chimirec.
Conformément à ses statuts, la société Immark France était co- dirigée par un président, représentant de l'actionnaire unique du groupe B, et un directeur général, représentant des actionnaires du groupe A.
La présidence a été ainsi dévolue à la société Chimirec, représentant de l'actionnaire unique du groupe B, le directeur général étant la société de droit suisse E2 AG, détenue à 100 % et représentée par M. X, représentant des actionnaires du groupe A.
Un pacte d'actionnaires était conclu en date du 19 novembre 2009 régissant les rapports des actionnaires et organisant notamment la sortie du capital d'Immark France par une clause alternative d'achat ou vente 'buy or sell'.
Un conflit a opposé les actionnaires des groupes A et B qui a culminé avec ce que M. X dénonçait comme son éviction physique des locaux de la société en avril 2012 puis sa mise à l'écart.
La société Immark France a été mise en redressement judiciaire sur déclaration de cessation des paiements de son président, Chimirec, par jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 30 janvier 2013 puis en liquidation judiciaire par jugement du 22 avril 2014.
Les dissensions entre associés ont donné lieu à divers contentieux, M. X et la société Resmar, forts de leurs 51 %, révoquant Chimirec de son mandat de président lors d'une assemblée générale du 30 août 2013 puis se voyant assigner en référé par Chimirec qui sollicitait la nomination d'un mandataire ad hoc lequel était désigné par ordonnance du 20 septembre 2013 qui sera infirmée par arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 10 avril 2014.
Le 16 septembre 2013, M X... a démissionné de ses fonctions de directeur général de la société Immark France.
Suivant acte du 2 juillet 2013, M. X et la société Resmar ont assigné la société Chimirec et M. Le Dluz, représentant permanent de Chimirec à la présidence de Immark France, devant le tribunal de commerce de Bobigny, en considération du siège de la société défenderesse, pour voir dire que Chimirec et son représentant permanent ont commis une faute notamment en évinçant totalement les actionnaires du groupe A de la gestion de la société Inmark, de les condamner, en conséquence, solidairement à payer à titre de dommages et intérêts en réparation de l'ensemble des préjudices subis à M. X la somme de 6 928 647,28 euros et à la société Resmar 1 221 577,44 euros outre frais.
Les défendeurs ayant soulevé l'incompétence de la juridiction saisie au profit, en application de l'article 30 des statuts, de la Cour Internationale d'Arbitrage de la Chambre de commerce internationale à Paris, l'exception a été déclarée mal fondée par décision du 25 mars 2014 laquelle a été infirmée par arrêt de cette cour en date du 7 octobre 2014 qui a dit que le litige relève de la compétence du tribunal arbitral et qui a renvoyé les parties à se mieux pourvoir.
Par ailleurs, M. X et la société Resmar ont recherché l'exécution du pacte d'actionnaires en vue d'obtenir le rachat de leurs actions par Chimirec en application de la clause 'buy or sell' inscrite à l'article 4 du pacte permettant aux actionnaires du groupe A dans le cas où ils trouvent un acquéreur pour la cession de l'intégralité des actions composant le capital social, de contraindre l'actionnaire du groupe B soit à vendre ses actions aux mêmes conditions à cet acquéreur soit à racheter les titres du groupe A au prix fixé selon une formule consistant en l'EBIT du dernier exercice écoulé multiplié par 8 et rapporté au nombre d'actions cédées, se prévalant d'une offre d'achat de la société Sims Group UK Ltd en date du 9 juillet 2012, notifiée à Chimirec le 31 juillet 2012, n'ayant pu aboutir par la faute de Chimirec qui, selon eux, a entravé délibérément la solution de reprise puis a proposé, par lettre du 22 novembre 2012 de racheter les titres mais pour un prix inférieur à celui prévu par le pacte d'actionnaires.
C'est dans ces circonstances que par acte du 28 décembre 2012, M. X et la société Resmar ont assigné à jour fixe Chimirec devant le tribunal de commerce de Paris, désigné par les parties comme compétent pour connaître des litiges en matière de cessions d'actions, pour voir dire que le pacte d'actionnaires en date du 19 novembre 2009 est toujours en vigueur, dire bien fondée l'offre alternative d'achat ou de vente (clause buy or sell) des actions de la société Immark France notifiée en date du 31 juillet 2012 par
M. X et la société Resmar à Chimirec, constater l'accord de Chimirec résultant de sa lettre en date du 31 août 2012 et son changement d'option opéré par courrier des 25 octobre et 22 novembre 2012 proposant de racheter elle-même les 1530 actions, constater enfin l'accord des actionnaires du groupe 1 pour céder leurs 1530 actions aux conditions du pacte, dire la vente parfaite aux conditions financières de l'article 4-1 du pacte sur la base de 8 fois l'EBIT de la société Inmark France soit, pour un résultat d'exploitation arrêté à 779 799 euros, la somme de 2 077,64 euros par action, en conséquence, condamner Chimirec à payer à M. X 3 053 284,08 euros et à Resmar 124 623,84 euros, ordonner à Chimirec d'accomplir les formalités de transfert des titres, lui ordonner de racheter le compte courant de M. X pour un montant de 1 532 000 euros ainsi que des créances de M. X ou de la société E2AG d'un montant de 686 127 euros en exécution du pacte d'actionnaires, à titre subsidiaire, accorder réparation à raison de la non réalisation de la vente au profit de la société Sims Group UK pour les mêmes montants.
La société Chimirec s'est opposée aux demandes comme irrecevables ou mal fondées dès lors qu'à défaut d'accord antérieur entre les parties et donc de vente des actions, la procédure collective ouverte à l'égard de la société Immark France emportait, en application de l'article L. 631-10 du code de commerce, incessibilité des titres de M. X, directeur général statutaire, indiquant aux motifs de leurs écritures que l'affaire devrait être renvoyée devant le tribunal de la procédure collective.
Les demandeurs ont répliqué que l'article L. 631-10 du code de commerce n'était pas applicable en l'état d'une vente devenue parfaite au profit de Chimirec antérieurement au prononcé du redressement judiciaire.
Par jugement du 9 avril 2013, le tribunal de commerce de Paris a déclaré M. X et la société Resmar irrecevables en leur demande principale au visa de l'article L. 631-10 du code de commerce, a ordonné son dessaisissement au profit du tribunal de commerce de Nîmes et a condamné solidairement M. Antnen et la société Resmar à payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre dépens.
Contredit a été formé par M. X et la société Resmar.
Retenant que le jugement contredit a tranché la question de la recevabilité des demandes, suivant arrêt du 5 novembre 2013, la chambre 1-3 de cette cour a dit que le jugement a été déféré à tort par la voie du contredit au lieu de l'appel et a renvoyé les parties à se mettre en état dans les formes de l'appel.
Dans le dernier état de la procédure, par dernières conclusions signifiées le 8 décembre 2014, M. X et la société Resmar demandent à la cour, outre de nombreux constats, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, statuant à nouveau, de dire les dispositions de l'article L. 631-10 du code de commerce inapplicables, de constater, en tout état de cause la démission de M. X de ses fonctions de directeur général de la société Immark France intervenue le 16 septembre 2013, d'accueillir leurs demandes comme bien fondées, à titre principal, de dire parfaite par l'effet de l'accord des parties au 22 novembre 2012 la cession de leurs 1530 actions au profit de Chimirec aux conditions énoncées par l'article 4-1 des statuts, soit au prix de 1 721,35466 euros l'action sur la base d'un EBIT arrêté pour 2011 d'un commun accord à 645 508 euros, de dire que l'arrêt à intervenir vaudra vente à Chimirec des 1 470 actions de M. X et des 60 actions de Resmar au prix unitaire de 1 721,35466 euros, en conséquence, de condamner Chimirec à payer à ce titre à M. X la somme de 2 530 391,35 euros et à la société Resmar 103 281,28 euros, d'ordonner l'exécution forcée par Chimirec des formalités de transfert dans le délai de huit jours à compter de la signification de l'arrêt à peine d'une astreinte de 5 000 euros par jour de retard, d'ordonner le rachat par Chimirec du compte courant de M. X d'un montant de 1 532 984,25 euros, d'ordonner le rachat par Chimirec des créances de M. X d'un montant de 655 950,76 euros, à titre subsidiaire, dire qu'en méconnaissant ses engagements contractuels énoncés à l'article 4 du pacte d'actionnaires, Chimirec a engagé sa responsabilité contractuelle et doit réparation du préjudice causé, de la condamner à payer à titre de dommages et intérêts à M. X la somme de 3 256 335,18 euros et à Resmar 103 281,28 outre les intérêts légaux à compter du 28 décembre 2012, date de l'assignation, avec capitalisation, à titre très subsidiaire, de dire que l'offre de la société Sims Group UK Ltd a été rompue du fait de la société Chimirec laquelle doit les indemniser de leur préjudice, de condamner Chimirec à payer à ce titre à M. X la somme de 3 237 864,17 euros et à la société Resmar la somme de 54 999, 96 euros, majorées des mêmes intérêts, en tout état de cause, de condamner Chimirec à payer à chacun 7 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2014, la société Chimirec demande à la cour de recevoir M. X et la société Resmar en leur appel du jugement rendu le 9 avril 2013 par le tribunal de commerce de Paris, de confirmer cette décision en ce qu'elle a déclaré M. X et la société Resmar irrecevables en leur demande principale, y ajoutant, de les déclarer irrecevables en toutes leurs demandes, passées ou présentes, subsidiairement, de les y déclarer mal fondés et de les en débouter, d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné son propre dessaisissement au profit du tribunal de commerce de Nîmes, de confirmer cette décision en ce qu'elle a condamné solidairement M. X et la société Resmar à payer à la société Chimirec la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, y ajoutant, de les condamner sous la même solidarité à payer à la société Chimirec la somme complémentaire de 15.000 euros sur le même fondement outre les dépens de première instance et d'appel.
SUR CE
1. Sur le dessaisissement
Les parties s'accordant sur l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé le dessaisissement du tribunal après avoir déclaré les demandes recevables, il convient de constater que la compétence n'est pas discutée.
2. Sur la demande principale en exécution du pacte d'actionnaires
Sur la cessibilité des actions
Sur la qualité de dirigeant de M. X
L'article L. 631-10 du code de commerce énonce en son alinéa 1er :
'A compter du jugement d'ouverture, les parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital de la personne morale qui a fait l'objet du jugement d'ouverture et qui sont détenus directement ou indirectement par les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, ne peuvent être cédés à peine de nullité que dans les conditions fixées par le tribunal du code de commerce'.
Les premiers juges ont déclaré les demandeurs irrecevables en leur demande principale au visa de l'article précité au terme d'une motivation développée sous l'intitulé 'Sur la compétence du tribunal au regard de la procédure de redressement judiciaire' où l'on peut lire que les actions de M. X entrent dans ce cadre restrictif et que la cession n'a aucunement été formalisée par les parties avant le jugement d'ouverture de la procédure collective.
Analysant cette déclaration d'irrecevabilité comme résultant de l'application d'une fin de non-recevoir, les appelants font plaider 'à titre liminaire', au visa des articles 122 et 126 du code de procédure civile, qu'il n'est pas contestable que M. X a donné sa démission de ses fonctions de dirigeant de la société Immark France le 16 septembre 2013, que sa démission a été publiée, qu'il n'est donc plus dirigeant, que dans tous le cas où une situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité doit être écartée si la cause a disparu au moment où le juge statue, que tel est le cas en l'espèce, que faute pour M. X d'avoir la qualité de dirigeant, ses actions sont cessibles et ses demandes recevables de sorte que la cour doit trancher le litige entre les parties.
Cependant, la qualité de dirigeant du détenteur des parts sociales de la personne morale qui a fait l'objet de l'ouverture d'une procédure collective ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile mais une condition de fond du régime d'incessibilité desdites parts institué par l'article L. 631-10 du code de commerce.
Il s'ensuit que la régularisation invoquée est inopérante.
Il n'est pas contesté que M. X, qui a démissionné de ses fonctions de représentant du directeur général, le 16 septembre 2013 était dirigeant le 30 janvier 2013, jour de l'ouverture du redressement judiciaire de la société Immark France à compter duquel le régime d'incessibilité a pris effet.
L'application de ce régime dépend donc exclusivement de la date de la cession invoquée par les appelants, étant rappelé que l'incessibilité de parts sociales appartenant au dirigeant d'une personne morale en redressement ou liquidation judiciaire ne s'applique pas en l'état d'une cession antérieure au jugement d'ouverture.
Sur la perfection et l'antériorité de la vente
La clause « Buy or sell », inscrite à l'article 4 du pacte d'actionnaires, est ainsi rédigée :
« 4-1. Si, à compter du 1er janvier 2010 jusqu'au 31 décembre 2015, Resmar et M. Adrien X... (ci-après « le groupe A ») trouvent un acquéreur pour la cession de l'intégralité des actions composant le capital social, Chimirec (ci-après le groupe B ) aura trois options :
- vendre ses parts au Tiers selon les mêmes modalités et le même prix que ceux offert au groupe A
- racheter les titres du groupe A au prix fixé à selon la formule suivante (Suit la formule qui repose sur l'EBIT du dernier exercice écoulé multiplié par 8 et rapporté au nombre d'actions cédées),
- autoriser la cession de l'intégralité des titres de Groupe A (constituant la troisième option) au prix proposé par le Tiers acquéreur sous la condition expresse que le Tiers acquéreur le propose.
A cet effet, le Groupe A devra notifier ses intentions au Groupe B de déclencher ce droit de 'buy or sell' . Cette notification devra indiquer les modalités de l'offre....notamment le prix de cession...
4-2. Dans un délai de trente jours au plus tard après réception de la notification, le groupe B devra notifier au Groupe A sa réponse et indiquer s'il entend acheter la totalité des actions que le groupe A détient au prix fixé ci-dessus, céder la totalité de ses actions au Tiers acquéreur ou autoriser la cession des seules actions du groupe A au Tiers acquéreur' .
Les appelants soutiennent que Chimirec a non seulement décidé de paralyser le bon déroulement des audits préalables d'acquisition à réaliser par Sims Group, empêchant ainsi délibérément l'exécution normale de l'option de vente (sell) de 100 % des actions de la société Immark France en ce compris la bonne fin des opérations de vente des 1530 actions du groupe A au profit de Sims Group et de ne pas acquérir ces 1530 actions mais a, par la suite, décidé de revenir sur ses engagements en exerçant une option d'achat (buy) à un prix différent du prix convenu au pacte d'actionnaires. Ils contestent l'absence prétendue de caractère sérieux de l'offre de Sims Group, évoquent le harcèlement de Chimirec à l'égard de la direction de cette société et estiment Chimirec tenue par son offre d'achat résultant de sa lettre du 22 novembre 2011 marquant sa volonté irrévocable d'acquérir les actions, les conditions de l'acquisition étant toutefois celles du pacte lequel renvoie au prix de 8 x EBIT.
Tandis que Chimirec proteste de sa bonne foi et souligne que le pacte n'a prévu aucune alternative à l'échec d'une offre, en l'occurrence au retrait du candidat acquéreur, quand bien même l'offre de Sims Group aurait été sérieuse ce qui n'est pas le cas puisque sa proposition a la nature d'une simple déclaration d'intention avec faculté de retrait de sorte qu'il n'est pas même acquis qu'elle ouvrait l'application de la clause buy or sell.
Des pièces au débat, il ressort que par lettre du 31 juillet 2012, M. X et la société Resmar ont notifié à Chimirec que suivant lettre d'intention du 9 juillet 2012, la société Sims Group UK avait manifesté son intérêt pour l'acquisition de 100 % du capital de Immark France moyennant le prix de 2 750 000 euros soit 916,66 euros l'action, la cession devant intervenir avant le 31 octobre 2012 et qu'il appartenait à Chimirec, conformément à l'article 4-2 du pacte dans les trente ajours au plus tard d'indiquer si elle entendait acheter la totalité des 1530 actions du groupe A moyennant le prix fixé à l'article 4-1 ou céder la totalité de ses 1470 actions à Sims Group, que par lettre du 7 août 2012, Chimirec a sollicité la communication de l'ensemble des éléments de l'offre ce qui lui a été refusé au motif que les éléments fournis suffisaient à satisfaire aux exigences du pacte pour la mise en oeuvre de la clause 'buy or sell', que par lettre du 31 août 2012, Chimirec a fait connaître son accord pour vendre les 1 470 actions par elle détenues à Sims Group aux conditions notifiées par la lettre du 31 juillet 2012, que par lettre du 12 septembre 2012, M. X et Resmar ont informé Chimirec de la réalisation par Sims Group d'audits de la société Immark France comme prévu par son offre d'achat dont ils communiquaient alors la teneur, que divers échanges ont suivi au sujet de ces audits, que par lettre du 12 octobre 2012, M. Le Dluz, représentant de Chimirec, ès qualités de président d'Immark, informait M. Faller de Sims Group qu'il avait pris position pour mettre à disposition les informations sollicitées sur support électronique, sollicitait un engagement de confidentialité et indiquait ne pas souhaiter que M. X participe aux opérations, que par lettre du 12 octobre 2012, M. X transmettait l'accord de confidentialité, accusait Chimirec de mener une stratégie d'enlisement et soulignait la proximité de la date limite de l'offre de Sims Group, que par lettre en réponse du 22 octobre 2012 adressée à M. X et à la société Resmar, Chimirec réfutait les reproches, faisait grief à M. X de tenter de mobiliser le personnel en sa faveur sous couvert de sa participation à l'audit, soulignant que celle-ci n'était pas stipulée dans l'offre de Sims Group, s'interrogeait sur l'intérêt de M. X à favoriser des manoeuvres dilatoires compte tenu de la date butoir proche et indiquait in fine: 'Ainsi dans le prolongement de la notification de notre accord en date du 31 août 2012, faite en application de l'article 4-2 du pacte qui nous lie, pour céder les 1470 actions nous appartenant moyennant le prix payable comptant de 1 347 490,20 euros à raison de 916,66 euros par action, nous vous mettons en demeure d'exécuter votre offre d'acquérir le 31 octobre 2012 au plus tard dans les conditions où vous nous l'avez notifiée', que par lettre du 23 octobre 2012, Sims Group notifiait aux représentants de Chimirec le retrait de son offre, expliquant qu'elle ne faisait qu'exercer son droit en l'état d'une offre ne l'obligeant pas , que par lettre du 7 novembre 2012, imputant à faute à Chimirec la non réalisation de la vente à Sims Group, M. X et la société Resmar ont mis en demeure Chimirec d'acheter les actions du groupe A sur la base de 8 x l'EBIT avec remboursement du compte courant de M. X et des créances de la société Energie Ecologie sur Immark France, que par lettre du 22 novembre 2013, la société Chimirec a fait connaître sa volonté d'acheter les titres détenus par M. X et Resmar en précisant toutefois que la référence faite par les actionnaires du groupe A à un prix équivalent à 8 x l'EBIT selon la formule prévue par le pacte était inappropriée et inéquitable.
De ces éléments, il s'évince que par sa lettre en date du 31 août 2012, Chimirec a expressément opté pour la vente de ses actions aux conditions qui lui étaient notifiées par les appelants.
Or, la seconde option (buy) est alternative à la première d'où il suit que l'obligation de rachat n'existe à la charge de l'actionnaire minoritaire ou groupe B selon les termes de l'article 4 du pacte, que si cet actionnaire, Chimirec, ne lève pas la première option, en s'engageant à vendre ses propres actions au tiers acquéreur selon les mêmes modalités et le même prix de cession que ceux offerts aux actionnaires du groupe A.
C'est donc contre les termes de la clause que les appelants prétendent que Chimirec a opéré un changement d'option en s'engageant à racheter les actions par sa lettre du 22 novembre 2011 laquelle ne pouvait avoir cet effet.
Il sera souligné qu'à cette date, Sims Group avait retiré son offre comme elle s'en était réservée le droit; son offre étant libellée comme une simple lettre d'intention tendant à 'entamer des négociations sur les conditions de cette acquisition' et 'n'ayant pas vocation à avoir force obligatoire'.
La société Chimirec ne pouvait vendre ses actions dans le cadre de la première option, par elle exercée, en conséquence du retrait de l'offre de Sims Group le 23 octobre 2012, qui rendait l'exécution de son obligation impossible ni être contrainte d'acquérir les actions du groupe majoritaire en vertu de la seconde option qu'elle n'a jamais exercée.
Dans ces conditions et alors que l'article 4 ne comporte pas de stipulation en cas d'échec de l'offre d'un tiers acquéreur, aucune vente parfaite susceptible de donner lieu à exécution forcée n'a pu, à aucun moment, lier les parties.
Les allégations prises de la mauvaise foi de Chimirec sont à cet égard inopérantes.
La demande fondée sur l'application de la clause 'buy or sell' déclarée irrecevable par les premiers juges s'avère donc non pas irrecevable mais mal fondée et, par dispositions infirmatives, les appelants en seront déboutés.
3. Sur la demande subsidiaire en responsabilité
Les appelants demandent à la cour, à titre subsidiaire, de dire qu'en méconnaissant ses engagements contractuels énoncés à l'article 4 du pacte d'actionnaires, Chimirec a engagé sa responsabilité contractuelle et doit réparation du préjudice causé.
Ils explicitent le manquement reproché à Chimirec comme consistant à avoir cherché à dénaturer la clause buy or sell en proposant de racheter les titres au prix offert pas Sims Group soit à un prix différent du prix convenu de 8 x EBIT et arguent du préjudice résultant de leur perte de chance de réaliser la cession qu'ils évaluent à 69 % du prix contractuel.
Mais, une fois acquis que la clause ne pouvait trouver application, il ne peut être fait grief à Chimirec de l'avoir dénaturée.
4. Sur la demande très subsidiaire en responsabilité
A titre très subsidiaire, les appelants recherchent la responsabilité de Chimirec en faisant valoir que l'offre de la société Sims Group UK Ltd a été rompue de son fait, invoquant encore l'exécution de mauvaise foi du pacte d'actionnaires par Chimirec et son absence de coopération loyale et soutenant qu'au lieu de refuser l'offre de Sims Group, Chimirec a délibérément empêché la réalisation de la condition de réalisation préalable d'un audit en interdisant l'accès aux locaux de la société Immark France au directeur général,
M. X, et au candidat repreneur ce qui compromettait définitivement la vente au regard de la date limite de l'offre fixée au 31 octobre 2012.
Ils estiment que l'offre de Sims Group ayant été émise sous condition de la réalisation d'un audit, la société Chimirec qui est le débiteur obligé par la condition était tenue de ne pas faire obstacle à la réalisation de l'événement ce qu'elle n'a pas fait en particulier en tardant à répondre à la demande de Sims group et en refusant l'intervention de M. X.
Cependant, les appelants échouent à faire la preuve de la mauvaise foi de la société Chimirec alors qu'il ressort au contraire des pièces au débat que celle-ci a répondu favorablement à la demande d'audit de Sims Group et proposé au candidat acquéreur, par lettre en date du 12 octobre 2012, après avoir reçu l'engagement de confidentialité d'usage, de prendre connaissance de la data-room électronique qu'elle avait préparée à son intention en réponse à l'ensemble des questions que M. X lui avait transmises comme étant celles du tiers acquéreur, toutes circonstances qui contredisent l'attitude d'entrave ou d'enlisement alléguée, les réserves mises à la présence de M. X ne suffisant pas à caractériser les fautes alléguées dans le contexte du conflit entre les actionnaires.
De plus, dès lors que la réalisation de l'audit d'acquisition permettait seulement d'entamer des négociations avec la société Group Sims laquelle n'était pas tenue dans les termes d'une offre d'achat, la perte de chance alléguée n'est pas certaine de sorte que M. X et la société Resmar prétendent à la réparation d'un préjudice non indemnisable.
Les demandes tant subsidiaire que très subsidiaire sont mal fondées et les appelants en seront déboutés.
5. Sur l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande de confirmer la condamnation prononcée par les premiers juges et, y ajoutant, de condamner M. X et la société Resmar in solidum à payer à la société Chimirec la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Parties perdantes, les appelants supporteront les dépens d'appel comme ceux de première instance, le jugement étant sur ce point confirmé, sans pouvoir prétendre à l'indemnisation de leurs propres frais.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a dit irrecevable la demande principale et prononcé le dessaisissement de la juridiction saisie,
Statuant à nouveau des chefs infirmés
Constate que la compétence n'est pas discutée,
Dit la demande principale en exécution du pacte d'actionnaires recevable mais mal fondée,
Déboute M. X et la société Resmar de leur demande principale,
Y ajoutant,
Déboute M. X et la société Resmar de l'ensemble de leurs demandes indemnitaires,
Condamne M. X et la société Resmar à payer à la société Chimirec la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Les condamne in solidum aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.