Cass. 3e civ., 10 mars 1999, n° 96-16.169
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
Mme Stéphan
Avocat général :
M. Baechlin
Avocat :
SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 1996), que Mme Y..., aux droits de laquelle se trouvent les consorts Y..., a donné à bail à la société Naga, pour neuf ans à compter du 1er octobre 1984, divers locaux à usage mixte de commerce et d'habitation ; que, par acte du 13 février 1985, la société Naga a cédé son droit au bail à MM. X... et Z... ; que, par acte du 12 décembre 1991, M. X... a cédé ses droits à son coïndivisaire M. Z... ; que, par exploit du 16 mars 1994, les consorts Y... ont assigné ce dernier pour faire prononcer la résiliation du bail à ses torts et griefs, ordonner son expulsion et le faire condamner à leur payer une indemnité d'occupation ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes alors, selon le moyen : "1 ) qu'après avoir constaté que la bailleresse avait, par un courrier du 28 février 1985, donné son accord sur la cession intervenue dans l'acte du 13 février 1985 et, qu'aux termes de cet acte, il n'était pas constaté que les cessionnaires étaient les successeurs du cédant dans son commerce, ce dont il résultait que la bailleresse avait donné son autorisation expresse et par écrit à la cession en pleine connaissance du fait que les cessionnaires n'acquéraient pas le fonds de commerce, la cour d'appel ne pouvait pas, sans violer l'article 1134 du Code civil, et alors qu'elle constatait l'accord de la bailleresse sur cette cession, décider qu'une telle cession lui était néanmoins inopposable ; 2 ) qu'il résulte très clairement du courrier du 28 février 1985 que la bailleresse avait donné son accord pur et simple sur la cession, en précisant simplement, ce qui allait de soi dans le cadre d'une cession, que les clauses du bail restaient inchangées dans les relations entre la bailleresse et les cessionnaires ; qu'en considérant que la bailleresse avait entendu, par cette dernière formule, subordonner son accord à la condition que les cessionnaires du droit au bail acquièrent le fonds de commerce du cédant - ce qui n'était pas le cas de la cession approuvée par le bailleur -, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du courrier du 28 février 1985 et, partant, a violé l'article 1134 du code civil ; 3 ) que, lorsque le droit au bail appartient indivisément à plusieurs titulaires, l'attribution ne peut être considérée comme équivalent à une cession, et cette attribution est opposable au bailleur qui ne peut se prévaloir de la clause du bail prévoyant les formalités à accomplir pour obtenir l'agrément du bailleur en cas de cession à un successeur dans le commerce ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué constate qu'aux termes de l'acte notarié du 12 décembre 1991, M. X... a attribué à son coïndivisaire M. Z... la moitié indivise du droit au bail ; que, dès lors, en soumettant cet acte de partage aux exigences du contrat de bail pour la cession du droit au bail, la cour d'appel a violé une nouvelle fois l'article 1134 du Code civil et, ensemble, l'article 883 du même Code ; 4 ) qu'en tout état de cause, l'arrêt attaqué, dont il ressort que la bailleresse a accepté sans réserves ni protestation pendant plus de neuf années les loyers payés par les cessionnaires, a constaté en outre, d'une part, que la bailleresse avait eu connaissance de la seconde "cession" intervenue le 12 décembre 1991 au profit de M. Z... et, d'autre part, qu'elle avait délivré au seul nom de celui-ci une quittance de loyer, de sorte qu'il se déduit de ces énumérations que Mme Y... avait renoncé à se prévaloir tant de l'irrégularité de la "cession" du 12 décembre 1991 que de l'irrégularité de la cession du 13 février 1985 ; que la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du Code civil" ;
Mais attendu, qu'ayant constaté qu'aux termes du contrat le preneur ne pouvait céder son droit au bail qu'à l'acquéreur de son fonds de commerce, après avoir obtenu l'autorisation expresse et par écrit du bailleur, que Mme Y... avait donné son accord à la cession du 13 février 1985 en rappelant expressément que les clauses du bail demeuraient inchangées et que la cession par M. X... de ses droits indivis à M. Z... n'avait été notifiée à la bailleresse que postérieurement à l'acte du 12 décembre 1991, et relevé qu'il n'était pas justifié ni même allégué que les cessionnaires successifs aient été les successeurs du cédant dans son commerce, la cour d'appel, qui a, à bon droit, retenu que la délivrance d'une quittance par Mme Y... à M. Z... ne pouvait être considérée comme l'acceptation par elle d'une situation irrégulière, en a déduit, sans dénaturation, que les violations des obligations contractuelles entraînaient la résiliation du contrat ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.