Cass. 3e civ., 24 juin 1998, n° 96-21.682
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
M. Peyrat
Avocat général :
M. Sodini
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, Me Choucroy
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 11 septembre 1996), que la société Genecommerce a donné à bail, par acte du 7 mai 1987, à la société Big Chief, devenue la société Class Affaires, des locaux à usage commercial, le contrat stipulant une clause de garantie solidaire du preneur avec le cessionnaire pour le paiement des loyers et charges en cas de cession de bail et pendant trois ans à compter de la date de cession;
que la société Class Affaires a cédé son fonds de commerce à la société Socaba le 1er mars 1989;
que celle-ci, qui n'a pas payé ses loyers, a fait l'objet le 12 mai 1992 d'un jugement ordonnant la liquidation de ses biens;
que, le 20 août 1992, la société Genecommerce a déclaré sa créance et, le même jour, demandé le paiement des loyers impayés à la société Class Affaires qui s'y est refusée;
que la société Genecommerce l'a alors assignée en paiement ;
Attendu que la société Genecommerce fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen, "que le bail précisait qu'en cas de cession, le cédant demeurerait garant conjointement et solidairement avec le cessionnaire du paiement des loyers et charges ainsi que de l'exécution du bail;
que le cédant et le cessionnaire étaient ainsi codébiteurs solidaires envers le bailleurs;
qu'en énonçant que la société bailleresse ne pouvait réclamer au cédant les loyers impayés par le cessionnaire, faute pour elle de l'avoir prévenue de la carence de son débiteur direct, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1200 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que la société Socoba n'avait jamais payé ses loyers, que la société Genecommerce ne lui avait pourtant adressé ni courrier ni lettre recommandée avant une sommation de payer du 14 février 1991, que cette sommation tardive n'ayant eu aucun effet, la société Genecommerce n'avait pas poursuivi la procédure et n'avait pas informé la société Class Affaires de cette situation et que la société Genecommerce n'avait jamais fait en trois ans de tentative sérieuse pour récupérer ses loyers auprès de la société cessionnaire du bail ni tenu le cédant informé de cette situation alarmante, la cour d'appel a pu en déduire que cette attitude constituait une faute et que la société Class Affaires n'avait pas à supporter la carence fautive du créancier ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 559 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile ;
Attendu que, pour condamner la société Genecommerce à une amende, l'arrêt retient qu'elle était particulièrement éclairée du mal fondé de ses prétentions par les motifs du jugement attaqué ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un appel dilatoire ou abusif, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que la cour d'appel a condamné la société Genecommerce au paiement d'une amende pour appel dilatoire ou abusif, l'arrêt rendu le 11 septembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.