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Décisions

Cass. ass. plén., 11 mars 2005, n° 03-20.484

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Angers, du 3 oct. 2003

3 octobre 2003

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 3 octobre 2003), rendu sur renvoi après cassation, (2ème chambre civile, 6 décembre 2001, pourvoi n° V 00-14.991), que la société civile immobilière Lagadec (la SCI Lagadec) a confié la réalisation d'immeubles à la société Seritelassurée en garantie décennale auprès de la Caisse générale d'assurances mutuelles (la CGAM) ; que la société Seritel a sous-traité les travaux de couverture des immeubles à la société Drouault Godefroy, assurée par la compagnie Allianz Via, aux droits de laquelle se trouve la compagnie d'assurances AGF ; que, n'ayant pas été intégralement payée, la société Seritel a assigné la SCI Lagadec devant le tribunal de grande instance qui l'a condamnée à lui payer une certaine somme, déduction faite des frais de reprise des désordres constatés par l'expert désigné en référé ; qu'en cause d'appel, à la demande de la SCI Lagadec, une nouvelle expertise a été ordonnée ; que la société Seritel a alors assigné en intervention forcée la CGAM ainsi que la société Drouault Godefroy et son assureur ;

Attendu que la société Seritel fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré ces interventions irrecevables, alors, selon le moyen :

1 ) que l'évolution du litige permettant la mise en cause d'une personne qui n'était pas partie en première instance exige seulement l'existence d'un élément nouveau révélé par le jugement ou survenu postérieurement ; qu'en écartant toute évolution du litige du chef d'une nouvelle définition des travaux de reprise résultant d'une mesure d'instruction instituée postérieurement au jugement entrepris et portant leur coût à un montant vingt fois supérieur, pour la raison, que les désordres affectant les bâtiments étant identiques et leurs causes décelées par le premier technicien, la différence entre les deux rapports d'expertise résidait dans l'appréciation des travaux destinés à y remédier, de sorte que les données juridiques et factuelles du litige n'étaient pas modifiées, quand, même si les causes des désordres avaient pu être déterminées par le premier expert, bien qu'elles n'eussent pas été clairement identifiées, seul le second avait mis en évidence l'importance et la gravité des malfaçons l'ayant conduit à proposer des travaux de reprise hors de proportion avec ceux préconisés par son prédécesseur, ce qui constituait l'élément nouveau et imprévu modifiant les données du litige, la cour d'appel a violé l'article 555 du nouveau Code de procédure civile ;

2 ) que la révélation de l'augmentation considérable de l'intérêt litigieux caractérise l'élément nouveau bouleversant les données du procès ; qu'en imposant la révélation en cause d'appel d'un dépassement de la franchise, bien qu'elle eût retenu que l'évolution du litige résidait dans la nature et le coût des réparations préconisées par le second expert, ajoutant ainsi à l'exigence d'un élément nouveau une condition qu'elle ne comporte pas, la cour d'appel a violé l'article 555 du nouveau Code de procédure civile ;

3 ) que l'évolution du litige permettant la mise en cause d'une personne qui n'était pas partie en première instance exige seulement l'existence d'un élément nouveau révélé par le jugement ou survenu postérieurement ; qu'en se bornant à constater, pour dénier toute évolution du litige de nature à justifier la mise en cause en appel de l'assureur du sous-traitant, que le rapport du second expert déposé après le jugement confirmait les appréciations du premier sur les causes des désordres affectant les couvertures, quand, en raison de leur importance, le coût de leur réfection tel qu'il résultait de la seconde mesure d'expertise instituée postérieurement au jugement, était évalué à une somme quatre vingt fois supérieure à celle proposée en première instance, ce qui constituait l'élément nouveau et imprévu modifiant les données du litige, la cour d'appel a violé l'article 555 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel, au sens de l'article 555 du nouveau Code de procédure civile, n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige ;

Qu'ayant constaté que les désordres décrits dans les expertises ordonnées en première instance et en appel étaient identiques et leurs causes décelées par le premier expert, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant relatif au dépassement de la franchise d'assurance, a retenu à bon droit que la dernière expertise n'avait pas modifié les données juridiques du litige dont l'évolution ne résidait que dans la nature et le coût des réparations ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Seritel aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Seritel ; la condamne à payer à la CGAM la somme de 2 000 euros et à la société Drouault Godefroy et aux AGF, venant aux droits de la compagnie Allianz-Via, la somme globale de 2000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, Assemblée plénière et prononcé par le premier président en son audience publique du onze mars deux mille cinq.