Cass. com., 29 avril 2014, n° 12-20.988
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Mac moto (la société) a été mise en redressement judiciaire le 6 août 2008 ; que la société Cofiplan (le créancier), dont la créance a été admise le 8 juillet 2009 pour un montant de 213 839,91 euros, a, le 17 août 2009, subrogé dans ses droits la société Crédit du Nord (la caution) à concurrence de 70 000 euros, montant de l'engagement souscrit par celle-ci à son égard ; que le jugement du 24 février 2010 arrêtant le plan de redressement de la société a ordonné le paiement de 25 % du montant de cette créance, soit la somme de 53 459,98 euros ; que, soutenant ne pas avoir consenti à cette remise, le créancier a, par télécopie et par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au greffe, formé tierce opposition à ce jugement ; que la caution est intervenue volontairement à l'instance pour demander le paiement, par le commissaire à l'exécution du plan, de la somme de 53 459,98 euros et la restitution, par le créancier, du reliquat de 16 540,02 euros ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu que le créancier fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable sa tierce opposition au jugement du 24 février 2010, alors, selon le moyen :
1°/ que la tierce opposition contre les décisions rendues en matière de redressement judiciaire est formulée par voie de déclaration au greffe dans le délai de dix jours à compter du prononcé de la décision attaquée ou du jour de sa publication BODACC ou de son insertion dans un journal d'annonces légales ; que la déclaration au greffe peut être effectuée selon toutes les modalités admissibles en application des dispositions de droit commun qui prévoient qu'une déclaration au greffe peut être faite, remise ou adressée au greffe, où elle est enregistrée ; qu'il s'ensuit qu'en l'espèce, l'envoi par le créancier d'une télécopie datée du 22 mars 2010, jour d'expiration du délai de tierce opposition contre le jugement du tribunal de commerce d'Arras du 24 février 2010, publié au BODACC le 12 mars 2010, ainsi que d'une lettre recommandée avec accusé de réception du même jour, dont le greffe de la juridiction a accusé réception par courrier du 24 mars 2010, constituait une déclaration au greffe au sens de l'article R. 661-2 du code de commerce ; qu'en retenant néanmoins, pour déclarer le recours du créancier irrecevable, que l'envoi d'une télécopie ou même d'une lettre recommandée avec accusé de réception au greffe du tribunal de commerce n'était pas assimilable à une déclaration au greffe, qui supposerait une comparution et l'exercice du recours au sein du greffe, la cour d'appel a violé l'article R. 661-2 du code de commerce ;
2°/ que la déclaration au greffe par laquelle la tierce opposition aux décisions rendues en matière de redressement judiciaire doit être exercée peut se faire par tous moyens dès lors qu'elle est enregistrée au greffe de la juridiction concernée ; qu'en l'espèce, le créancier faisait valoir que la tierce opposition qu'elle avait formée par l'envoi d'une télécopie et d'une lettre recommandée avec accusé de réception datées du 22 mars 2010 avait été enregistrée par le greffe qui en avait accusé réception par lettre du 24 mars 2010 ; qu'en s'abstenant de rechercher si le recours exercé par le créancier avait fait l'objet d'un enregistrement au greffe, l'accomplissement de cette formalité suffisant à assurer la recevabilité de la tierce opposition contre une décision rendue en matière de redressement judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 661-2 du code de commerce ;
Mais attendu qu'en application de l'article R. 661-2 du code de commerce, la tierce opposition est formée contre les décisions rendues en matière de redressement judiciaire par déclaration au greffe ; que la cour d'appel en a exactement déduit, sans avoir à effectuer la recherche inopérante visée par la deuxième branche, que la tierce opposition formée par le créancier par télécopie et par lettre recommandée avec accusé de réception contre la décision adoptant le plan de redressement était irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le moyen, pris en sa troisième branche, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1252 du code civil et l'article L. 631-20 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes qu'en cas d'arrêté d'un plan de redressement, la caution reste tenue du montant de son engagement, sans qu'elle puisse se prévaloir à l'égard du créancier de la réduction de sa créance opérée par ce plan ; que toutefois, la subrogation dont elle bénéficie à la suite de son paiement ne peut nuire au créancier lorsque celui-ci n'est pas entièrement désintéressé ;
Attendu que pour dire que le commissaire à l'exécution du plan devra verser la somme de 53 459,98 euros à la caution, l'arrêt retient que celle-ci, subrogée dans les droits du créancier, est investie de toutes les prérogatives dont était titulaire celui-ci à l'égard de la société, dans le respect des règles régissant les procédures collectives et que le jugement du 24 février 2010 a ordonné, dans le cadre du plan, le règlement au créancier de 25 % de sa créance, soit la somme de 53 459,98 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que le commissaire à l'exécution du plan de la société Mac moto devra verser entre les mains de la caution, subrogée dans les droits de la société Cofiplan, la somme de 53 459,98 euros, l'arrêt rendu le 19 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société Crédit du Nord aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Cofiplan ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf avril deux mille quatorze.