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Décisions

Cass. soc., 10 juin 2015, n° 13-26.638

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Paris, du 30 oct. 2013

30 octobre 2013

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé en 1963 par la société Banque transatlantique, M. X... a été placé en situation de préretraite le 1er mai 1999 ; qu'invoquant une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal », il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la condamnation de son employeur au paiement d'un rappel de salaire pour la période de novembre 1995 à avril 1999 et d'un complément d'indemnité de départ à la retraite ; que par arrêt rendu le 2 juillet 2004, la cour d'appel de Paris a fait droit à ces demandes ; que le 14 mars 2007, M. X... a saisi à nouveau la juridiction prud'homale pour obtenir notamment la condamnation de son employeur au règlement des cotisations à verser à l'Agirc, à la régularisation des cotisations au régime supplémentaire de retraite en fonction des rappels de salaire et au paiement d'un rappel de pensions de préretraite pour la période 1999 à 2007 et de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :
Vu l'article R. 1452-6 du code du travail ;

Attendu qu'en application de ce texte, une instance ne peut être engagée postérieurement à une première procédure prud'homale que lorsque le fondement des nouvelles prétentions est né ou s'est révélé après l'extinction de l'instance primitive ; qu'il en résulte que sont irrecevables des demandes formées dans une nouvelle procédure dès lors que leur fondement est né avant la clôture des débats de l'instance antérieure ;

Attendu que pour faire droit aux demandes du salarié, l'arrêt retient que celles-ci s'analysent comme les conséquences des modalités d'exécution par l'employeur de la condamnation prononcée à son encontre par arrêt de la cour d'appel de Paris le 2 juillet 2004 ;
qu'en effet après cette décision définitive revalorisant les salaires de l'intéressé, l'employeur, qui aurait pu en tirer spontanément toutes les conséquences en termes de régularisation des droits du salarié, notamment au regard des engagements pris par lui à l'égard du statut collectif des salariés, ne l'a pas fait ;
que les prétentions de M. X... sont donc nées de la conjonction du droit aux rappels de salaire fixés par la cour d'appel le 2 juillet 2004 et de l'abstention de l'employeur d'en tirer toutes les conséquences, en termes de modalités d'exécution et application loyale de l'ensemble de dispositions résultant du contrat de travail et de l'accord collectif qui y était lié ;
qu'en outre la qualification retenue par le premier arrêt de rappel de salaire constitue également un fondement nouveau permettant d'écarter le principe de l'unicité de l'instance ;
qu'en effet si les juges avaient accordé à l'intéressé des dommages-intérêts du fait de la discrimination salariale subie, les conséquences de cette décision auraient été fondamentalement différentes car elles auraient dispensé l'employeur de toute régularisation quant aux pensions de retraite et cotisations diverses afférentes aux salaires ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié, en préretraite depuis le 1er mai 1999, pouvait, dès l'instance initiale, joindre à sa demande principale de rappels de salaire au titre du principe « à travail égal, salaire égal » toutes les demandes en découlant, et ainsi les demandes de règlement des cotisations de retraite dues auprès de l'Agirc, de régularisation des cotisations au régime supplémentaire de retraite, de paiement d'un rappel de pensions de préretraite et de dommages-intérêts, ce dont il résultait que le fondement des demandes nouvelles était né avant la clôture des débats devant la cour d'appel saisie de l'instance initiale, la cour d'appel, qui aurait dû en déduire leur irrecevabilité en application du principe de l'unicité de l'instance, a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

Attendu que la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les deuxième et troisième moyens :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Banque transatlantique à payer à M. X... la somme de 187 130,35 euros à titre de rappel sur ses pensions de retraite pour la période 1999 à 2007,

dit que la société Banque transatlantique doit régler les cotisations dues à l'Agirc sur les rappels de salaire octroyés de 1995 à 1999, ordonne aux parties de « re-procéder » au calcul des cotisations à verser à l'Agirc pendant la période de préretraite du 15 mars 2002 jusqu'en 2004, dit que l'Agirc doit recalculer l'ensemble des points cadre acquis par M. X... et procéder à un nouveau calcul de ses droits à retraite de 1995 à 1999 puis du 15 mars 2002 au 15 mars 2007, condamne la société Banque transatlantique à régulariser au taux de 1,20 % les cotisations au régime supplémentaire de retraite en fonction des rappels de salaire auxquels elle a été condamnée et à payer à M. X... la somme de 80 000 euros à titre de dommages-intérêts toutes causes confondues, l'arrêt rendu le 30 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare irrecevables les demandes formées par M. X... contre la société Banque transatlantique ;

Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille quinze.