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Décisions

Cass. 3e civ., 12 mai 2016, n° 15-14.107

COUR DE CASSATION

Arrêt

Déchéance

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Monod, Colin et Stoclet

Montpellier, du 30 déc. 2014

30 décembre 2014

Attendu, selon les arrêts attaqués (Montpellier, 27 mai 2014 et 30 décembre 2014), que, le 1er août 1994, la SCI La Fontaine a donné à bail à la société International Hôtel un immeuble à usage d'hôtel moyennant un loyer annuel fixe de 91 509,15 euros ; que, par avenant du 24 mars 2002, les parties sont convenues de fixer le prix, à compter du 1er janvier 2002, à la somme annuelle de 45 735 euros pendant quatre ans, puis, sur la base d'un loyer fixe et d'un pourcentage de 10 % du résultat brut d'exploitation ; que la société locataire a demandé le renouvellement du bail ; que le juge des loyers commerciaux, saisi par celle-ci, s'est déclaré incompétent ; que, devant le tribunal de grande instance, la société International Hôtel a demandé la fixation du loyer renouvelé en application des dispositions du statut des baux commerciaux et la société La Fontaine a, à titre reconventionnel, demandé une certaine somme au titre des loyers et charges impayés ;

Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre le premier arrêt :

Vu l'article 978 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen contenu dans le mémoire n'étant pas dirigé contre le premier arrêt, il y a lieu de constater la déchéance du pourvoi en ce qu'il est formé contre cette décision ;

Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre le second arrêt :

Sur le moyen unique :

Attendu que la société International Hôtel fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes et de la condamner au paiement d'une certaine somme au titre des loyers et charges impayés au 31 décembre 2013, alors, selon le moyen :

1°/ que, tenu de respecter le principe du contradictoire, le juge ne peut soulever d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en soulevant d'office le moyen pris de ce que la société International Hôtel n'avait pas contesté, en formant contredit, le jugement rendu le 22 février 2011 aux termes duquel le juge des loyers commerciaux s'était déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance au motif que la fixation conventionnelle du loyer en cause échappait aux dispositions du décret du 30 septembre 1953, n'étant régi que par la convention des parties, sans à aucun moment provoquer les explications des parties sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que le juge doit indiquer le fondement juridique de sa décision ; qu'en s'abstenant de préciser en quoi le défaut de contestation, par voie de contredit, du jugement rendu le 22 février 2011, aux termes duquel le juge des loyers commerciaux s'était déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance, empêchait la société International Hôtel d'invoquer devant elle le bénéfice du statut des baux commerciaux et la possibilité d'une fixation judiciaire du loyer de renouvellement, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

3°/ que la commune intention des parties d'exclure les dispositions du statut des baux commerciaux relatives aux modalités de fixation du loyer doit résulter de manière claire et non équivoque des clauses du bail ; qu'il ne peut donc en être ainsi lorsque la clause fixant le loyer doit être interprétée ; qu'en l'espèce, le contrat de bail du 1er août 1994 prévoyait un loyer fixe et, par avenant du 24 mars 2002, les parties avaient convenu de diviser par deux le montant de celui-ci pour le porter à 47 735 euros, ce pour une période de quatre ans, étant ajouté qu'après la quatrième année de cet avenant, à ce loyer de base fixe serait adjointe une prime de 10 % du résultat brut d'exploitation, le loyer total ne pouvant excéder 91 470 euros valeur décembre 2001, ni être inférieur, en fin de bail, à cette même somme, laquelle correspondait au loyer fixe initial ; qu'il en résultait que l'intention des parties d'exclure définitivement, notamment à l'occasion d'un renouvellement, les dispositions du statut des baux commerciaux relatives aux modalités de fixation du loyer - de renouvellement donc - n'était ni claire ni dépourvue d'ambiguïté ; qu'en retenant, pour exclure toute fixation judiciaire du loyer de renouvellement, que l'avenant du 24 mars 2002 devait être interprété comme stipulant une clause de loyer variable, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 145-33 du code de commerce ;

4°/ que la valeur plancher prévue « en fin du bail » par l'avenant du 24 mars 2002 était de même montant que la valeur plafond, ce qui révélait l'intention des parties de revenir, au terme du contrat, et donc avant un renouvellement éventuel, à un système de loyer fixe ; qu'en retenant que la circonstance prise de l'existence d'une valeur plancher « ou » plafond était vaine, le renouvellement du bail s'opérant nécessairement aux clauses et conditions du bail venu à expiration, en ce compris selon le loyer défini par l'accord des parties, selon l'avenant intervenu précédemment à la date du renouvellement, sans se prononcer spécialement sur cette circonstance prise d'une similitude des valeurs plancher et plafond « en fin de bail », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 145-33 du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu, par une interprétation de la clause de l'avenant du 24 mars 2002 que son ambiguïté rendait nécessaire, que les parties s'étaient librement accordées sur chacune des composantes du loyer comportant une partie fixe et une partie variable en fonction d'un pourcentage du revenu brut d'exploitation du preneur, celles-ci formant un tout indivisible et le loyer ne pouvant ni excéder une certaine somme ni lui être inférieur en fin de bail, et que la fixation du loyer renouvelé d'un bail stipulant une telle clause n'était régie que par la convention des parties et échappait aux dispositions régissant le statut des baux commerciaux, la cour d'appel en a exactement déduit, sans violer le principe de la contradiction et abstraction faite du motif surabondant tiré de l'absence de contestation par voie de contredit du jugement d'incompétence du juge des loyers commerciaux, que la demande de fixation judiciaire du loyer de renouvellement devait être rejetée ;

PAR CES MOTIFS :

CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 27 mai 2014 par la cour d'appel de Montpellier ;

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 30 décembre 2014 par la cour d'appel de Montpellier.