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Décisions

CA Aix-en-Provence, retention administrative, 7 février 2024, n° 24/00175

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 24/00175

7 février 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétentions Administratives

CHAMBRE 1-11 RA

ORDONNANCE

DU 07 FEVRIER 2024

N° 2024/00175

N° RG 24/00175 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMQSX

Copie conforme

délivrée le 07 Février 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 05 Février 2024 à 11h05.

APPELANT

X se disant Monsieur [A] [R]

né le 30 Octobre 1993 à [Localité 6] (Algérie)

de nationalité Algérienne

comparant en personne,

assisté de Me Elise BESSON, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, commis d'office, et de Mme [Y] [J], interprète en langue arabe inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence;

INTIME

Monsieur le préfet des Bouches-du-Rhône

Représenté par Monsieur [E] [X];

MINISTÈRE PUBLIC :

Avisé et non représenté;

DEBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 07 Février 2024 devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Safiatou VAZ-GOMES, faisant fonction de greffier.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 07 Février 2024 à 14 heures 49,

Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et Mme Safiatou VAZ-GOMES, faisant fonction de greffier.

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 02 février 2024 par le préfet des Bouches-du-Rhône, notifié à X se disant Monsieur [A] [R] le 03 février 2024 à 08h49 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 02 février 2024 par le préfet des Bouches-du-Rhône notifiée à X se disant Monsieur [A] [R] le 03 février 2024 à 08h49 ;

Vu l'ordonnance du 05 Février 2024 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de X se disant Monsieur [A] [R] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de 28 jours;

Vu l'appel interjeté le lundi 05 fevrier 2024 à 17h54 par X se disant Monsieur [A] [R] ;

X se disant Monsieur [A] [R] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare : ' J'ai fait appel car je suis fatigué ma femme est seule avec ma fille . Ma femme s'appelle [L] et ma fille [B]. Je vis chez ma soeur depuis 2019. En Algérie, j'ai mes parents, mes frères et soeurs. Sur votre interrogation, j'ai quitté la France après les OQT. J'ai demandé un interprète pour la notification de la 2nde OQT. Je ne comprends pas tout le français. Je veux rester ici pour m'occuper de ma femme et ma fille.'

Son avocate a été régulièrement entendue. Elle sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et la remise en liberté du retenu ou, à défaut, son assignation à résidence. Elle souligne que la mesure d'éloignement et la décision de placement en rétention ont été notifiées à l'appelant sans l'assistance d'un interprète en langue arabe, X se disant Monsieur [A] [R] ne comprenant que des phrases simples et ne lisant pas le français. Elle estime que cette irrégularité fait nécessairement grief au retenu. De la même manière, elle prétend que le droit pour l'étranger d'être entendu préalablement à la décision de placement en rétention a été méconnu, tout en pointant le défaut d'interprète lorsque celui-ci a été invité à formuler des observations préalablement aux décisions d'éloignement et de placement en rétention. Elle soulève par ailleurs deux moyens d'illégalité externe de l'arrêté de placement en rétention, à savoir l'insuffisance de sa motivation et l'absence d'examen réel de la possibilité d'assigner le susnommé à résidence, précisant que l'administration n'a pas cherché à vérifier l'adresse communiquée par le retenu. Elle reproche à l'arrêté de retenir que l'étranger n'a pas d'enfant, en méconnaissance de sa paternité et de la reconnaissance de son enfant en détention. Elle invoque en outre l'illégalité interne de la décision de placement en rétention. En premier lieu, elle argue de l'absence de base légale de la décision de placement en rétention, la mesure d'éloignement n'ayant pas été notifiée via le truchement d'un interprète en langue arabe, la privant ainsi de tout caractère exécutoire. Elle reproche à nouveau à l'administration de ne pas avoir vérifié l'adresse du retenu, en méconnaissance des dispositions de l'article L813-2 du CESEDA, et soutient que l'intéressé présente des garanties effectives de représentation. Elle estime enfin que la mesure de placement en rétention méconnaît le droit du retenu à une vie privée et familiale, résultant des dispositions des articles 8 de la convention européenne des droits de l'homme (CEDH) et de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant (CIDE).

Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de l'ordonnance déférée. Il fait valoir qu'il existe un risque certain de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement, le retenu ayant indiqué refuser de retourner dans son pays d'origine. Il ajoute en outre que les conditions d'une assignation à résidence ne sont pas réunies, l'appelant n'ayant pas de passeport.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la recevabilité du recours

Aux termes des dispositions de l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), 'L'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel, dans les vingt-quatre heures de son prononcé, par l'étranger, le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. Lorsque l'étranger n'assiste pas à l'audience, le délai court pour ce dernier à compter de la notification qui lui est faite. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

Le ministère public peut interjeter appel de cette ordonnance selon les mêmes modalités lorsqu'il ne sollicite pas la suspension provisoire.'

Selon les dispositions de l'article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, 'A peine d'irrecevabilité, la déclaration d'appel est motivée. Elle est transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel qui l'enregistre avec mention de la date et de l'heure.'

L'ordonnance querellée a été rendue le 5 février 2024 à 11 heures 05 et notifiée à X se disant Monsieur [A] [R] à ces mêmes date et heure. Ce dernier a interjeté appel le même jour à 17 heures 54 en adressant au greffe de la cour une déclaration d'appel motivée. Son recours sera donc déclaré recevable.

2) Sur le moyen tiré de la notification des arrêtés portant obligation de quitter le territoire et de placement en rétention sans recours à un interprète

En application de l'article L. 141-3 du CESEDA, lorsque les dispositions du présent code prévoient qu'une information ou qu'une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire.En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger.

Selon les dispositions de l'article L743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont l'effectivité n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats.

Si X se disant Monsieur [A] [R] soutient ne pas maîtriser suffisamment le français, argue à cette fin de cours de français suivis du 23 mars 2023 au 2 mai 2023 en détention et a été assisté à l'audience d'une interprète en langue arabe,, il sera observé que le fonctionnaire de police notificateur a précisé sur les documents de notification que le susnommé parlait et comprenait le français. Surtout, le retenu, qui déclare vivre en France depuis 2019 soit près de cinq ans, s'était déjà vu notifier le 26 octobre 2021 un arrêté portant obligation de quitter le territoire, sans interprète. De surcroît, sa fiche pénale mentionne que le français est sa langue principale. Enfin, il importe de relever que l'intéressé a signé la notification de la mesure d'éloignement et de l'arrêté de placement en rétention, alors qu'il aurait pu refuser de le faire arguant d'un défaut de maîtrise de la langue française.

Le moyen sera donc rejeté.

3) Sur le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire préalablement à la décision de placement en rétention

Selon les dispositions de l'article L211-2 du code des relations entre le public et l'Administration, 'Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.

A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :

1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ;

2° Infligent une sanction ;

3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ;

4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ;

5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ;

6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ;

7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ;

8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire.'

Aux termes des dispositions de l'article L121-2 du même code, 'Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables :

1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ;

2° Lorsque leur mise en œuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ;

3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ;

4° Aux décisions prises par les organismes de sécurité sociale et par l'institution visée à l'article L. 5312-1 du code du travail, sauf lorsqu'ils prennent des mesures à caractère de sanction.

Les dispositions de l'article L. 121-1, en tant qu'elles concernent les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents.'

Selon l'article L121-1 du même code, 'Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable.'

Ni les garanties procédurales du chapitre III de la directive 2008/115/CE, ni les articles L. 121-1, L. 211-2 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'Administration ne s'appliquent à la décision de placement en rétention. Par conséquent, l'audition préalable au placement en rétention ne s'impose pas. Le droit pour l'étranger d'être entendu est garanti par la procédure contradictoire devant le juge des libertés et de la détention permettant à l'intéressé de faire valoir, à bref délai, devant le juge judiciaire tous les éléments pertinents relatifs à ses garanties de représentation et à sa vie personnelle, étant au demeurant relevé que l'administration a tenté de recueillir le 2 février 2024 les observations de l'étranger quant à une éventuelle décision de placement en rétention.

Le moyen sera donc rejeté.

4) Sur le moyen tiré du défaut d'interprète lors du recueil des observations de l'étranger préalablement à la décision de placement en rétention

Comme il a été relevé ci-dessus, les éléments de la procédure démontrent la maîtrise du français de X se disant Monsieur [A] [R], ne rendant pas nécessaire le recours par l'administration à un interprète pour recueillir ses éventuelles observations préalablement à la décision de placement en rétention.

Le moyen sera donc rejeté.

5) Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention

Aux termes de l'article L741-1 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, l'autorité administrative peut placer en rétention pour une durée de 48 heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision. Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.

Ce dernier article dispose que le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.

Aux termes des dispositions de l'article L722-3 du CESEDA, 'L'autorité administrative peut engager la procédure d'exécution d'office de la décision portant obligation de quitter le territoire français dès l'expiration du délai de départ volontaire ou, si aucun délai n'a été accordé, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français ou, s'il a été mis fin au délai accordé, dès la notification de la décision d'interruption du délai.'

Il résulte des dispositions susvisée que décision de placement en rétention ne peut être pris par l'autorité administrative que si elle est fondée sur une mesure d'éloignement exécutoire. Si le juge judiciaire n'est pas compétent pour connaître des contestations portant sur les conditions de notification de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire, il doit néanmoins du caractère exécutoire de cette décision et donc qu'elle a été notifiée à l'étranger.

En l'espèce, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire a été notifié à X se disant Monsieur [A] [R] le 3 février 2024 à 8 heures 49, sans qu'il soit nécessaire de recourir à un interprète. La mesure d'éloignement est donc exécutoire et pouvait légitimement fonder la décision de placement en rétention.

Aux termes de l'article L.741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger. Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

La décision de placement en rétention cite les textes applicables à la situation de X se disant Monsieur [A] [R] et énonce les circonstances qui justifient l'application de ces dispositions.

En l'occurence, le représentant de l'Etat relève que le susnommé, qui déclare être entré en France en 2018, n'a pas sollicité de titre de séjour, qu'il ne dispose pas de garanties de représentation suffisantes, ne présentant notamment pas un passeport en cours de validité et ne justifiant pas d'un lieu de résidence permanent, qu'il est défavorablement connu des services de police et qu'il s'est soustrait à deux précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre en 2020 et 2021. Le préfet souligne en outre que l'appelant est sans enfant et ne justifie pas de la réalité de son mariage, ni être dépourvu d'attaches personnelles ou familiales dans son pays d'origine. Il indique de plus que l'étranger n'allègue aucun état de vulnérabilité et qu'il n'existe aucune perspective raisonnable d'exécution volontaire de la mesure d'éloignement.

Ces circonstances correspondent aux éléments dont le préfet disposait au jour de sa décision, étant précisé que ce dernier n'est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'étranger, dès lors que les motifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux.

Au demeurant, il ne saurait être reproché au représentant de l'Etat de ne pas avoir pris en compte la paternité de l'appelant et de ne pas avoir vérifié une possible adresse d'assignation, dès lors que l'intéressé n'a formulé aucune observation lorsqu'il a été invité à le faire préalablement à la décision de placement en rétention. Il convient d'ailleurs de relever que les dispositions des articles L813-1 et suivants du CESEDA ne peuvent en l'espèce être utilement invoqués, dans la mesure où X se disant Monsieur [A] [R] n'a pas été placé en retenue aux fins de vérification de son droit au séjour. De la même manière, les dispositions des articles 8 de la CEDH et 3 de la CIDE ne sauraient être invoqués puisque le moyen tiré de leur violation tend en réalité à contester la décision d'éloignement, contestation relevant de la compétence exclusive de la juridiction administrative, étant au demeurant relevé que la durée limitée de la rétention (trois mois maximum) ne permet pas de considérer que cette privation de liberté contrevient au droit à la vie privée et familiale de l'étranger.

En conséquence, l'arrêté comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement et X se disant Monsieur [A] [R] a pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire. C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen de la situation de l'étranger que la décision de placement en rétention a été prise.

Il convient, dans ces conditions, de rejeter la contestation de l'arrêté de placement en rétention.

6) Sur la mise en liberté et l'assignation à résidence

Selon les dispositions de l'article L743-13 alinéas 1 et 2 du CESEDA, 'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'

Aux termes des dispositions de l'article L741-3 du CESEDA, 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.'

L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.

Si X se disant Monsieur [A] [R] produit une attestation d'hébergement, il ne dispose toutefois pas d'un document d'identité en original. En outre, l'intéressé a clairement indiqué à l'audience vouloir rester en France avec son épouse et sa fille. Or, l'assignation à résidence, qui a également vocation à permettre l'exécution de la mesure d'éloignement, suppose établie la volonté de l'étranger de se conformer à cette mesure. Tel n'est pas le cas en l'espèce.

Faute garanties effectives de représentation, les demandes de mise en liberté et d'assignation à résidence de X se disant Monsieur [A] [R] seront rejetées.

Aussi, les diligences tendant à l'exécution de la mesure d'éloignement n'étant pas critiquées, l'ordonnance déférée sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Déclarons recevable l'appel formé par X se disant Monsieur [A] [R],

Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 05 Février 2024.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier, Le président,

Reçu et pris connaissance le :

X se disant Monsieur [A] [R]

né le 30 Octobre 1993 à [Localité 6] (Algérie)

de nationalité Algérienne

assisté de , interprète en langue arabe.

Interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Service des Rétentions Administratives

[Adresse 4]

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX01]

[XXXXXXXX03]

[Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 07 Février 2024

- Monsieur le préfet des Bouches-du-Rhône

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le directeur du Centre

de Rétention Administrative de MARSEILLE

- Maître Elise BESSON

- Monsieur le greffier du

Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE

OBJET : Notification d'une ordonnance.

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 07 Février 2024, suite à l'appel interjeté par :

X se disant Monsieur [A] [R]

né le 30 Octobre 1993 à [Localité 6] (Algérie)

de nationalité Algérienne

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.

Le greffier,

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.