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Décisions

Cass. 1re civ., 22 juin 2016, n° 15-13.837

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Avocats :

SCP Gaschignard, SCP Zribi et Texier

Aix-en-Provence, du 20 nov. 2014

20 novembre 2014

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le greffier en chef d'un tribunal de grande instance a déclaré exécutoire en France la décision rendue le 19 novembre 2010 par la High Court of Justice of London, Juridiction des sociétés, Division Chancellerie, dans l'instance opposant M. X... et la societé de la Villa Gal à M. Y..., pris en qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Ltd, à la succession de Thomas Z..., ainsi qu'à Mme A... et à M. B... ; que Mme C..., héritière de Thomas Z..., a saisi la cour d'appel d'un recours aux fins de révocation de cette déclaration ;

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :

Attendu que la société Villa Gal soulève l'irrecevabilité du pourvoi au motif que, dans sa déclaration de pourvoi, Mme C...a indiqué être domiciliée à une adresse qui n'était plus la sienne dès lors que la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, envoyée par l'huissier de justice chargé de signifier l'arrêt attaqué, est revenue avec la mention " partie sans laisser d'adresse ", de sorte que l'ignorance de l'adresse de Mme C...empêche l'exécution de cet arrêt et lui cause grief ;

Mais attendu que s'il résulte de l'article 975 du code de procédure civile que la déclaration de pourvoi comporte, à peine de nullité, l'indication du domicile du demandeur à la cassation, aucun texte ne lui impose de faire connaître son changement de domicile ultérieur ; que l'acte de signification de l'arrêt, dressé par un acte du 9 mars 2015 n'établit pas que, le 20 février 2015, l'adresse mentionnée par Mme C..., dans sa déclaration de pourvoi, n'était plus la sienne ; que le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 34 3) du règlement CE n° 44/ 2001 du 22 décembre 2000 ;

Attendu que, pour rejeter le recours formé par Mme C..., l'arrêt retient que la question de la contrariété prétendue avec une décision judiciaire française a été analysée par le juge étranger, qu'il n'appartient pas à l'autorité chargée de la reconnaissance d'une décision étrangère de porter une appréciation sur la pertinence de celle-ci, sauf à remettre en cause le principe de l'applicabilité de droit de toute décision judiciaire rendue dans un Etat membre de l'Union européenne et qu'une telle question ne peut relever, le cas échéant, que des juridictions du fond ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, saisie d'une action révocatoire fondée sur l'exception d'inconciliabilité de la décision, dont la reconnaissance était demandée, avec une décision rendue entre les mêmes parties en France, elle ne pouvait s'en remettre à l'appréciation du juge étranger et s'abstenir de procéder elle-même à l'examen de l'exception invoquée devant elle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur la deuxième branche du moyen :

Vu l'article 34 1) du règlement CE n° 44/ 2001 du 22 décembre 2000 ;

Attendu que, pour statuer comme il le fait, l'arrêt retient encore qu'il n'appartient pas à l'autorité judiciaire française de procéder à une vérification de la compatibilité de la décision étrangère avec l'ordre public interne, lequel est, " par principe ", identique à celui de tout Etat de l'Union européenne ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, saisie d'une action révocatoire fondée sur la contrariété à l'ordre public de l'Etat requis, de la décision étrangère dont la reconnaissance était demandée, elle ne pouvait s'abstenir de vérifier, comme elle y était invitée et ainsi qu'il lui incombait, si la décision anglaise contrevenait à l'ordre public français, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.