Cass. soc., 4 décembre 2002, n° 00-43.580
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sargos
Rapporteur :
M. Ransac
Avocat général :
M. Lyon-Caen
Avocat :
SCP Célice, Blancpain et Soltner
Sur l'irrecevabilité du mémoire en défense soulevée par le demandeur au pourvoi :
Attendu que le mémoire en défense a été adressé au greffe de la Cour de Cassation par un avocat au barreau de Nice agissant comme mandataire de M. X... sans qu'il soit justifié que cet avocat ait été titulaire d'un pouvoir spécial ;
Qu'il s'ensuit que le mémoire en défense est irrecevable ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 avril 2000), que M. X..., entré au service de la société Rapides Côte d'Azur en qualité de receveur conducteur d'autobus le 23 février 1976, a été licencié pour faute grave le 2 novembre 1995 ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement de M. X... n'était pas justifié par une faute grave, ni même par une cause réelle et sérieuse, et d'avoir en conséquence condamné l'employeur à verser diverses sommes, alors, selon le moyen :
1 / que la lettre de licenciement notifiée par la société Rapides Côte d'Azur est suffisamment explicite pour informer le salarié des faits à l'origine de la sanction, et que l'article L. 122-14-2, alinéa 1er, du Code du travail n'a ni pour effet ni pour objet d'imposer à l'employeur d'évoquer la totalité des circonstances qui accompagnent ou précèdent le motif du licenciement, de sorte qu'en faisant reproche à l'employeur de n'avoir pas mentionné, dès la lettre de licenciement, l'existence de faits antérieurs couverts, selon elle, par la prescription ou l'amnistie, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; qu'il en est d'autant plus ainsi qu'en vertu de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, c'est devant le juge qui "forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles" que l'ensemble des circonstances du litige doivent être évoquées, et seulement devant le juge ;
2 / qu'en vertu de l'article 23, alinéa 2, de la loi d'amnistie n° 95-884 du 3 août 1995, seule "la référence à une sanction ou une condamnation amnistiée" est condamnable, l'amnistie n'affectant pas l'existence des faits amnistiés ni leur gravité en ce qui concerne leurs conséquences sur le plan civil , de sorte qu'en interdisant à l'employeur de faire état de précédents agissements concernant la reddition des comptes de caisse, la cour d'appel a violé les articles 14,15 et 17 de la loi susvisée ;
qu'au surplus, les faits antérieurs à l'amnistie invoqués par la société Rapides Côte d'Azur dans ses conclusions en réponse visaient explicitement la conservation par le conducteur d'autobus d'un certain nombre de recettes et concernaient donc la probité de l'employé, ce qui les excluait nécessairement de la loi d'amnistie, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé derechef l'article 14, alinéa 3, de la loi d'amnistie n° 95-884 du 3 août 1995 ;
3 / qu'en s'abstenant de rechercher si ce n'était pas la prétention émise par M. X... de faire juger que le détournement de recettes constaté le 30 septembre 1995 aurait constitué un simple fait isolé qui avait conduit la société, dans l'exercice normal des droits de la défense, à se prévaloir devant le juge de faits antérieurs amnistiés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 30 et 31 du nouveau Code de procédure civile ; qu'au surplus, en refusant à l'une des parties la faculté de contester le fait allégué par son adversaire, au motif que cette constatation pourrait conduire le juge à examiner des faits couverts par l'amnistie, la cour d'appel n'a pas conduit un procès équitable au regard de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Mais attendu qu'ayant exactement rappelé que la lettre de licenciement fixe les limites du débat devant le juge, la cour d'appel qui a constaté que la lettre de licenciement invoquait comme seul motif de licenciement l'encaissement par le salarié le 30 septembre 1995 du prix de deux titres de transport, en contrepartie duquel il n'avait pas délivré de tickets et qui a estimé que le motif n'avait pas un caractère assez sérieux pour fonder le licenciement, a, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le mémoire en défense ;
REJETTE le pourvoi.