Cass. 2e civ., 1 septembre 2016, n° 15-16.913
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flise
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 24 mars 2015), que se prévalant d'un acte notarié constatant un prêt destiné à financer l'acquisition d'un immeuble à usage commercial situé 37 rue Lamartine à Fort-de-France, la Caisse d'épargne et de prévoyance de la Martinique, aux droits de laquelle vient la Caisse d'épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse (la banque), a fait délivrer, le 25 novembre 1997, à M. et Mme X... un commandement à fin de saisie de cet immeuble, dont les effets ont été prorogés pour la dernière fois par un jugement du 15 décembre 2003, et qui a donné lieu à un jugement d'adjudication sur folle enchère le 5 avril 2006, au profit de la SCI 37, rue Lamartine (la SCI Lamartine) ; que se fondant sur cet acte notarié, ainsi que sur le jugement d'un tribunal mixte de commerce ayant condamné M. X... à lui payer diverses sommes, la banque a fait délivrer à ce dernier et à son épouse un commandement valant saisie du même immeuble, le 15 novembre 2010, publié le 9 décembre 2010, puis les a fait assigner, ainsi que la société Leader beauté, créancier ayant fait inscrire le 21 avril 2010 une hypothèque sur le bien, à l'audience d'orientation d'un juge de l'exécution ; que la SCI Lamartine a versé le prix de l'adjudication le 21 décembre 2010 puis a fait publier le jugement d'adjudication le 28 décembre 2010 ;
Sur la recevabilité du mémoire de la banque en réponse au pourvoi incident de la SCI Lamartine :
Vu l'article 1010 du code de procédure civile ;
Attendu qu'un mémoire en réponse à un pourvoi incident est irrecevable dès lors qu'il est déposé plus d'un mois après la signification du pourvoi incident ;
Attendu que la banque a déposé le 31 mars 2016 un mémoire en réponse au pourvoi incident de la SCI Lamartine, qui lui avait été signifié le 17 novembre 2015, et formé à cette occasion une demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Que ce mémoire en réponse, tardif, est irrecevable ;
Sur premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de constater qu'ils étaient les propriétaires de l'immeuble situé 37 rue Lamartine à Fort-de-France du fait de la péremption du commandement de payer du 25 novembre 1997 acquise avant la publication du jugement d'adjudication du 5 avril 2006 alors rétroactivement privé de tout effet, de dire régulier le commandement de payer valant saisie immobilière que leur a délivré le 15 novembre 2010 la banque, publié à la conservation des hypothèques de Fort-de-France le 9 décembre 2010, volume 2010 F numéro 21 et, en conséquence, de renvoyer les parties devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Fort-de-France afin de poursuite de la procédure de saisie immobilière, alors, selon le moyen :
1°/ que la publication du jugement d'adjudication emporte purge de tous les vices de la procédure antérieure y compris celui tiré de la péremption du commandement de payer ; qu'en jugeant qu'à défaut de publication du jugement d'adjudication avant l'acquisition de la péremption, l'ensemble de la première procédure de saisie ayant conduit à l'adjudication de l'immeuble à la SCI Lamartine par jugement du 5 avril 2006 était anéantie, quand elle constatait que le jugement d'adjudication du 5 avril 2006 avait été publié le 28 décembre 2010, ce qui emportait purge de tous les vices, y compris celui tiré de la péremption, la cour d'appel a violé l'article 694, alinéa 3, de l'ancien code de procédure civile, applicable à l'espèce ;
2°/ qu'en toute hypothèse, seule une invocation expresse de la péremption du commandement de payer avant la publication du jugement d'adjudication fait obstacle à l'effet de purge qui y est attaché ; qu'en considérant que la délivrance d'un nouveau commandement par la Caisse d'épargne à M. et Mme X... le 15 novembre 2010 avait fait obstacle à l'effet de purge attaché à la publication du jugement d'adjudication le 28 décembre 2010, sans relever aucune invocation explicite, par la banque, de la péremption du premier commandement de payer du 25 novembre 1997, la cour d'appel a violé l'article 694, alinéa 3, de l'ancien code de procédure civile, applicable à l'espèce ;
Mais attendu que la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, d'une part, relevé que la publication du commandement à fin de saisie immobilière délivré le 15 novembre 1997 et prorogé en dernier lieu pour une durée de trois ans à compter du 15 décembre 2003, ne faisait pas mention en marge d'une inscription du jugement d'adjudication du 5 avril 2006 prise au plus tard le 15 décembre 2006, ce jugement ayant été publié le 28 décembre 2010, d'autre part, exactement retenu que la péremption instituée par le dernier alinéa de l'article 694 de l'ancien code de procédure civile, produit ses effets de plein droit à l'expiration du délai prévu et qu'il appartient à tout intéressé, y compris le poursuivant, d'en tirer les conséquences en engageant une nouvelle poursuite, sans qu'il y ait besoin, sous l'empire de l'ancien code de procédure civile, d'une décision judiciaire pour constater la péremption et, enfin, relevé que le nouveau commandement de saisie immobilière avait été délivré par la banque le 15 novembre 2010, à une date où le premier commandement avait de plein droit cessé de produire ses effets et que le jugement d'adjudication n'avait pas emporté à sa date transfert définitif de la propriété du bien saisi à l'adjudicataire ;
Que de ces constatations et énonciations, dont il découlait, d'une part, que le second commandement de saisie immobilière avait été publié à une date où le premier commandement avait de plein droit cessé de produire ses effets et, d'autre part, que la publication du jugement d'adjudication, postérieure à celle du nouveau commandement délivré par la banque, n'était pas opposable à cette dernière en application de l'article 686 de l'ancien code de procédure civile, la cour d'appel a exactement déduit que la publication du jugement d'adjudication n'avait pu emporter purge des vices de la procédure antérieure et que ce jugement était rétroactivement privé de tout effet, de sorte que M. et Mme X... étant restés les propriétaires de l'immeuble, le nouveau commandement qui leur avait été délivré était régulier ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Leader beauté :
Attendu que la société Leader beauté fait grief à l'arrêt, confirmant le jugement entrepris, de déclarer nulle l'inscription d'hypothèque conventionnelle en date du 21 avril 2010 prise par elle du chef de la SCI 37 rue Lamartine, référencée 2010 V 917, et d'en ordonner en conséquence la radiation, alors selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour juger nulle l'hypothèque conventionnelle consentie à la société Leader beauté, inscrite le 21 avril 2010 sous la référence 2010 V 917, la cour d'appel a retenu que la société n'établissait pas, par la production de son titre de créance ou du bordereau d'inscription hypothécaire, que le constituant serait M. et Mme X... et non la SCI 37 rue Lamartine, comme elle l'a précédemment affirmé ; qu'en statuant ainsi, sans examiner ni le relevé des formalités publiées du 1er juillet 2003 au 9 novembre 2010, ni le relevé des formalités publiées du 1er janvier 1964 au 17 septembre 2014, établis par le conservateur des hypothèques de Fort-de-France, mentionnant tous deux, sous le numéro d'ordre 6, l'inscription, le 21 avril 2010, d'une hypothèque conventionnelle consentie le 15 mars précédent et désignant, en qualité de créancier la société Leader beauté, et en qualité de débiteurs M. et Mme X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le commandement de payer délivré le 15 novembre 1997 ayant cessé de produire ses effets à compter du 15 décembre 2006 et la procédure de saisie immobilière initiale étant périmée depuis cette dernière date, l'inscription d'hypothèque conventionnelle prise en 2010 par la société Leader beauté du chef de la SCI Lamartine selon ce qu'elle a allégué en première instance sans établir le contraire en cause d'appel dès lors qu'elle ne produit ni son titre de créance ni un bordereau d'inscription hypothécaire, ne peut qu'être frappée de nullité et, par suite, de radiation, la cour d'appel, au terme d'une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a statué par une décision motivée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les seconds moyens du pourvoi principal et du pourvoi incident de la société Leader beauté et sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Lamartine, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.