CEDH, 26 mars 2015, n° 11239/11
COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME
En fait – En vertu de l’article 186 a) de la loi sur la procédure civile, tout justiciable qui souhaite engager une action civile contre l’État croate doit d’abord soumettre une demande de règlement amiable au service compétent du parquet, faute de quoi l’action sera déclarée irrecevable.
En janvier 1998, les requérants introduisirent auprès du parquet par la voie de la procédure amiable une demande d’indemnisation pour l’homicide d’un proche par un militaire. Cette demande ayant été rejetée, ils engagèrent une procédure civile devant un tribunal municipal, procédure qui se solda par une décision considérant qu’ils abandonnaient l’action car leur représentant n’avait pas assisté aux audiences. En mai 2005, ils engagèrent une deuxième action en indemnisation, mais qui fut déclarée irrecevable au motif qu’ils ne s’étaient pas conformés à l’obligation de présenter une demande de règlement amiable avant d’introduire une action contentieuse.
En droit – Article 6 : La Cour est appelée à examiner si la restriction au droit d’accès à un tribunal découlant de l’obligation de passer par une procédure de règlement amiable avant d’engager une action en indemnisation contre l’État a entraîné une limitation portant atteinte à l’essence même de ce droit. L’obligation en question était prévue par la loi et poursuivait le but légitime d’assurer l’économie judiciaire en évitant des procédures judiciaires longues et coûteuses et en réduisant le nombre d’affaires. Quant à la proportionnalité de cette obligation, la Cour relève que la première action civile des requérants a été considérée comme abandonnée en raison de l’inactivité de ceux-ci et du fait qu’ils n’avaient pas interjeté appel à temps. À la suite de cet abandon et avant l’engagement d’une nouvelle procédure, les requérants ont de nouveau été invités à se conformer à la condition préalable consistant à chercher à obtenir un règlement amiable. Eu égard au refus de la première demande de règlement amiable, il était impossible de prévoir ce qu’allait être l’issue de cette deuxième tentative, vu le temps considérable qui s’était écoulé. L’obligation en question n’était pas déraisonnable en soi ni n’a porté préjudice à la position juridique des requérants ; dès lors, elle n’a pas porté atteinte à l’essence même du droit des requérants d’accéder à un tribunal.
Conclusion : non-violation (unanimité).