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Décisions

CA Lyon, 1re ch. civ. a, 4 juillet 2024, n° 18/07995

LYON

Arrêt

Autre

CA Lyon n° 18/07995

4 juillet 2024

N° RG 18/07995 - N° Portalis DBVX-V-B7C-MBBI

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 17 octobre 2018

( chambre 9 cab 09 G)

RG : 15/00075

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 04 Juillet 2024

APPELANTS :

M. [S] [C]

né le 20 Novembre 1968 à [Localité 11] (COTE D'OR)

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Karen-maud VERRIER, avocat au barreau de LYON, toque : 1135

Mme [X] [E]

née le 11 Novembre 1967 à [Localité 12] (RHONE)

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Karen-maud VERRIER, avocat au barreau de LYON, toque : 1135

SAS AC ENVIRONNEMENT

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque:475

Et ayant pour avocat plaidant la SELARL YDES, avocat au barreau de LYON, toque : 722

INTIMES :

M. [D] [T] [N]

né le 09 Septembre 1972 à [Localité 10] (RHONE)

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représenté par la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1547

Et ayant pour avocat plaidant la SELARL DUREZ AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 1787

Mme [V] [F] [L] épouse [N]

née le 05 Mai 1981 à [Localité 9] (LIBAN)

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1547

Et ayant pour avocat plaidant la SELARL DUREZ AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 1787

M. [S] [C]

né le 20 Novembre 1968 à [Localité 11] (COTE D'OR)

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Karen-maud VERRIER, avocat au barreau de LYON, toque : 1135

Mme [X] [E]

née le 11 Novembre 1967 à [Localité 12] (RHONE)

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Karen-maud VERRIER, avocat au barreau de LYON, toque : 1135

Société [W] PERILLAT BOTTONET

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par la SELARL DE BELVAL, avocat au barreau de LYON, toque : 654

SAS AC ENVIRONNEMENT

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque:475

Et ayant pour avocat plaidant la SELARL YDES, avocat au barreau de LYON, toque : 722

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 04 Février 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Juin 2022

Date de mise à disposition : 27 octobre 2022 prorogée au 26 janvier 2023, 27 avril 2023, 28 septembre 2023, 26 octobre 2023, 29 février 2024, 28 mars 2024, 23 mai 2024 et 4 juillet 2024 les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Anne WYON, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Le 12 décembre 2013 a été régularisée en l'étude de Me [W], notaire, une promesse synallagmatique de vente à M. et Mme [N] d'une maison située à [Localité 8], propriété de M. [C] et Mme [E].

À cette occasion a été remis aux futurs acquéreurs le dossier de diagnostic technique réalisé par la société AC Environnement.

L'acte réitératif de vente a été régularisé le 27 février 2014 .

Les époux [N] ont saisi le tribunal de grande instance de Lyon par acte d'huissier de justice du 18 décembre 2014 afin d'obtenir la nullité de la vente pour dol et à titre subsidiaire sa résolution sur le fondement de la garantie des vices cachés du fait de la présence d'amiante dans la toiture.

Par jugement du 17 octobre 2018 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal faisant droit à l'action estimatoire formée par les époux [N] en cours de procédure, a condamné in solidum M. [C] et Mme [E] et la société AC Environnement à leur payer la somme de 145'000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice financier et 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société AC Environnement a relevé appel de cette décision par déclaration du 5 septembre 2018 puis M. [C] et Mme [E] par déclaration du 17 novembre suivant.

Le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures par ordonnance du 24 septembre 2019.

Par conclusions n° 2 déposées au greffe le 16 novembre 2019, M. [C] et Mme [E] demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés à payer à M. et Mme [N] des dommages et intérêts, et en conséquence de :

Rejeter l'ensemble des demandes de M. et Mme [N],

A titre infiniment subsidiaire,

Dire et juger que la société AC Environnement est condamnée, si nécessaire, à les relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre et ainsi seule débitrice d'une quelconque indemnisation qui serait prononcée au profit des époux [N].

Rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires,

En toute hypothèse,

Condamner solidairement M. et Mme [N] à leur payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner solidairement M. et Mme [N] aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de Me Karen-Maud Verrier, avocat, sur son affirmation de droit.

Par conclusions n°2 déposées au greffe le 23 septembre 2019, M. et Mme [N] demandent à la cour de :

Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Lyon en date du 17 octobre 2018 en ce qu'il a condamné in solidum Mme [E] et de M. [C] et la société AC Environnement,

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Lyon en date du 17 octobre 2018 en ce qu'il a condamné Mme [E] et M. [C] in solidum avec la société AC Environnement à leur verser la somme de 145.000 euros ;

I-à titre liminaire, sur la recevabilité des demandes de M. et Mme [N]:

Dire et juger qu'ils ont formé un appel incident,

En conséquence :

Déclarer recevable la demande visant à augmenter le quantum de leurs demandes ;

II- à titre principal, sur la responsabilité in solidum des vendeurs et du diagnostiqueur:

Dire et juger que Mme [E] et M. [C] ont commis un dol,

Dire et juger que la société AC Environnement a commis une faute délictuelle,

En conséquence :

Condamner Mme [E] et M. [C], in solidum avec la société AC Environnement, à leur verser la somme de 245.000 euros en réparation des préjudices subis,

Subsidiairement

Dire et juger que la vente régularisée le 27 février 2014 est affectée d'un vice caché,

Dire et juger que la clause exonératoire de la garantie des vices cachés ne s'applique pas en l'espèce,

En conséquence :

Condamner Mme [E] et M. [C] in solidum avec la société AC Environnement, à leur verser la somme de 245.000 euros, en réparation des préjudices subis,

III- à titre subsidiaire, sur la responsabilité in solidum des vendeurs et du notaire :

Dire et juger que la SCP [W] Perrillat Bottonet, notaires et Mme [E] et M. [C] ont manqué à leurs obligations,

Condamner la SCP [W] Perrillat Bottonet in solidum avec Mme [E] et M. [C] à leur verser la somme de 245.000 euros en réparation des préjudices subis,

En toutes hypothèses :

Condamner Mme [E] et M. [C], ou qui mieux le devra, à verser aux demandeurs la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de l'instance, distraits au profit de Me Damien Durez, Avocat, sur son affirmation de droit.

Par conclusions déposées au greffe le 1er octobre 2019, la société AC Environnement demande à la cour de :

A titre liminaire :

- constater que les époux [N] sollicitent la confirmation du jugement du 17 octobre 2018,

- dire et juger que leur demande indemnitaire ne pourra excéder ce qui a été accordé en première instance,

- dire et juger que la demande des époux [N] est limitée à la somme de 145'000 euros

correspondant à leur préjudice financier,

- déclarer irrecevables leurs demandes supplémentaires.

Sur le fond,

infirmer le jugement du 17 octobre 2018 et, statuant à nouveau, rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- constater l'absence de lien de causalité entre la faute de la société AC Environnement et le préjudice des époux [N],

- débouter les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes à son encontre.

À titre subsidiaire,

- dire et juger que le montant du préjudice des époux [N] doit être fixé en fonction du seul coût de désamiantage de leur toiture,

- limiter le montant de dommages et intérêts alloués aux époux [N] en réparation de leur préjudice à la somme de 15'000 euros

- fixer la contribution de chacune des parties ayant succombé la réparation du dommage des époux [N],

À titre très subsidiaire, si la cour estimait que l'état de la toiture nécessitait sa réfection,

- dire et juger que la société AC Environnement ne peut être tenu qu'au coût du désamiantage, soit la somme de 15'000 euros,

En tout état de cause,

- condamner solidairement les époux [N] à lui payer la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions déposées au greffe le 21 janvier 2020, la SCP [W]-Perrillat-Bottonet demande à la cour de :

Prendre acte de la demande de jonction,

- Confirmer le jugement dont appel,

A titre principal :

- Prendre acte que la responsabilité du notaire n'est pas recherchée ;

- En conséquence, le mettre hors de cause

Subsidiairement :

- Constater que la responsabilité du notaire n'est pas recherchée ;

- Constater que Maître [W] n'avait aucune raison légitime de suspecter le

caractère erroné du diagnostic amiante émis par la société AC Environnement ;

- Dire et juger que Maître [W] n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité civile professionnelle ;

En conséquence,

- la mettre hors de cause ;

En tout état de cause :

- Condamner les appelants, ou qui mieux le devra, à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner les mêmes aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Bertrand de Belval, sur son affirmation de droit.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 février 2020.

M. et Mme [N] ont déposé des conclusions n°3 le 30 janvier 2020, ainsi qu'une pièce n° 22 dont le rejet a été demandé suivant conclusions de M. [C] et Mme [E] du 4 février 2020 puis du 17 avril 2022.

MOTIVATION

Il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes de jonction formées par les parties dans la mesure où celle-ci a été ordonnée en cours de procédure par le conseiller de la mise en état.

Les conclusions déposées par M. et Mme [N] le 30 janvier 2020, quatre jours avant l'ordonnance de clôture dont la date avait été préalablement annoncée par le conseiller de la mise en état et deux mois et demi après le dépôt par les appelants de leurs dernières conclusions n'ont pas mis les autres parties en mesure de répondre avant la clôture, de sorte que par application de l'article 16 du code de procédure civile, le respect du principe du contradictoire ne pouvant être assuré en l'espèce, elles seront écartées ainsi que la pièce n° 22 qui y était jointe.

De la formulation du dispositif des conclusions de M. et Mme [N], qui seul saisit la cour, il résulte sans ambiguïté que ceux-ci sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné in solidum leurs vendeurs et la société de diagnostic à les indemniser de leur préjudice. Ce dispositif précise ensuite qu'il est réclamé l'infirmation de la décision en ce qui concerne la somme qui a été allouée. Cette limitation de l'infirmation au seul quantum des dommages et intérêts ne contredit pas la demande de confirmation précédente, qui ne portait que sur le principe de la condamnation et non sur son montant. La demande d'une somme supérieure à celle octroyée par les premiers juges ne sera donc pas déclarée irrecevable.

Au fond :

- sur le dol

Les époux [N] indiquent que leurs vendeurs ont fait transmettre par la société AC Environnement au notaire chargé de la vente un diagnostic établi le 10 décembre 2013 ne révélant pas la présence d'amiante mais concernant un autre bien que celui qui faisait l'objet du contrat, et rappellent que les premiers juges ont considéré que les vendeurs avaient nécessairement connaissance du fait que ce diagnostic, remis en dernière minute ne reposait pas sur une visite de la maison à cette date et qu'ainsi, il ne présentait pas un caractère régulier. Ils en déduisent que cette transmission d'un faux constitue une man'uvre dolosive.

Ils affirment que les vendeurs ont déclaré lors d'une visite des lieux qu'ils avaient procédé à la rénovation de la toiture et à la mise en place d'une isolation, et les ont dissuadés d'accéder à la toiture au motif qu'un précédent acquéreur potentiel avait dégradé les tuiles lors de sa visite, et que l'architecte qui les accompagnait en témoigne. Ils se prévalent de l'attestation d'un voisin qui a constaté l'intervention d'ouvriers sur la toiture et du témoignage d'un professionnel du secteur qui déclare que lors de l'installation récente de gouttières en cuivre et d'une bande de rive en bois, l'artisan chargé des travaux avait forcément constaté que la toiture est composée de plaques en fibres-ciment.

Rappelant que la maison a été présentée comme rénovée, ils soutiennent que les vendeurs leur ont sciemment caché l'état de la toiture. Ils ajoutent que M. [C] s'est présenté comme étant titulaire d'un diplôme supérieur du notariat, ce qui les a rassurés sur sa probité. Ils affirment que le dol est parfaitement caractérisé et qu'à tout le moins, en s'abstenant de mentionner l'erreur concernant le diagnostic produit lors de la vente, les vendeurs ont commis une réticence dolosive.

M. [C] et Mme [E] répondent que ce n'est qu'au stade de la procédure qu'ils ont constaté que le diagnostic ne concernait pas le bon immeuble, et que malgré la photographie d'une autre maison que le bien vendu ni le notaire ni les acquéreurs n'ont constaté l'erreur. Ils indiquent que le diagnostic a directement été transmis par la société AC Environnement au notaire et qu'ils n'avaient pas connaissance de son caractère erroné. Ils contestent avoir agi délibérément comme l'affirment les intimés. Ils soutiennent n'avoir pas su que leur toiture comportait de l'amiante et affirment avoir satisfait à leur devoir d'information.

Vu l'article 1116 du code civil dans sa rédaction applicable à la promesse de vente ;

Les époux [N] à qui il incombe de rapporter la preuve que les vendeurs de l'immeuble leur ont sciemment dissimulé la présence d'amiante dans la toiture justifient que :

- les professionnels qui ont installé des gouttières en cuivre et la bande de rives en bois étaient en mesure de constater que la toiture comportait de l'amiante entre septembre et novembre 2013, soit quelques semaines avant la vente (pièces 29 et 20)

- les vendeurs avaient présenté le toit comme rénové et isolé, et n'ont pas donné accès à la toiture aux époux [N] et à leur architecte au motif qu'un précédent visiteur avait causé des dégâts à des tuiles (pièces 18 et 19);

- la maison objet du diagnostic du 10 décembre 2013 annexé à l'acte de vente n'avait pas reçu la visite d'un diagnostiqueur depuis 2011 ainsi qu'en ont témoigné ses propriétaires.

Cependant, il ne peut être déduit de ces pièces que les couvreurs qui ont travaillé sur le toit à l'automne 2013 pour y poser des chéneaux et des planches de rives ont constaté la présence de fibres-ciment en sous-face des tuiles et, surtout, qu'ils en ont informé les propriétaires de la maison. Il ne peut davantage être déduit du fait que Mme [E] et M. [C] ont dissuadé les époux [N] et leur architecte d'examiner la toiture qu'ils n'ont agi ainsi que dans le but de dissimuler son état.

S'agissant du diagnostic, si, au regard de l'attestation des propriétaires de la maison concernée, qui n'ont reçu la visite d'aucun diagnostiqueur depuis 2011, il peut être envisagé que la société AC Environnement s'est contentée de changer la date du précédent diagnostic réalisé pour la vente de ce bien, conclue en 2011, et d'y ajouter diverses mentions pour le rendre conforme aux exigences nouvelles de l'arrêté du 21 décembre 2012, il ne peut cependant être déduit de ce que la société AC Environnement a adressé directement et in extremis ce document au notaire que c'est à l'instigation de Mme [E] et de M. [C] qu'elle a établi ce faux document, portant au surplus sur un autre immeuble, et qu'elle l'a adressé au notaire sans le remettre préalablement aux vendeurs.

Il n'est donc pas prouvé que les vendeurs avaient connaissance de la présence d'amiante dans la toiture de leur bien immobilier et qu'ils ont employé diverses manoeuvres pour la dissimuler à leurs cocontractants.

Le seul fait établi par le témoignage de leur architecte, à savoir que M. [C] a faussement affirmé que la toiture avait été isolée, ne suffit pas à démontrer, de la part des vendeurs, qu'ils avaient connaissance avant la vente de la présence d'amiante sous la toiture, ni même de son mauvais état, et ne démontre pas non plus le caractère intentionnel de leur comportement.

C'est pourquoi la cour confirmera le jugement critiqué en ce qu'il a rejeté la demande fondée sur le dol ou sur la réticence dolosive.

- sur la garantie des vices cachés

Mme [E] et M. [C] font valoir que pour établir la présence d'amiante dans la sous-toiture, il était nécessaire d'effectuer un prélèvement et de l'analyser, et que la présence à cet endroit de plaques de fibres-ciment, matériau inerte et classé en catégorie B n'est pas susceptible de générer un danger pour les occupants de la maison. Ils précisent que la jurisprudence a considéré que la présence d'amiante n'implique pas nécessairement l'existence d'un vice caché dans la mesure où elle ne compromet pas la destination de la maison d'habitation et que tel est le cas en l'espèce. Ils affirment n'avoir fait procéder à aucun travaux touchant à la toiture.

Les époux [N] répondent qu'ils n'auraient pas acquis cette maison s'ils avaient eu connaissance de la présence d'amiante, que le prix du bien était très largement surévalué, qu'il a nécessité des travaux pour être désamianté, que le caractère inerte du matériau ne permet pas de conclure à l'absence de danger pour les occupants et que la présence d'amiante constituait un vice caché rendant le bien impropre à son usage.

Ils ajoutent qu'en produisant un diagnostic, même erroné, ils ont satisfait à leur obligation de vendeur, d'autant que les époux [N] avaient visité le bien un an plus tôt et avaient eu connaissance du diagnotic réalisé en 2011, qui attestait qu'aucune trace d'amiante n'avait été observée.

Sur ce ,

Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1644 du code civil prévoit que dans le cas des articles 1741 et 1643, l'acheteur a le droit de rendre la chose, de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix tel qu'elle sera arbitrée par experts.

La mise en oeuvre de la garantie des vices cachés suppose que la chose vendue soit atteinte d'un défaut revêtant une certaine gravité, ce défaut étant caché et antérieur ou concomitant à la vente.

En l'espèce, après avoir examiné la toiture et effectué des prélèvements, la société LEI a conclu le 3 octobre 2014 que les plaques en fibres-ciment de la toiture comportaient des fibres d'amiante de type chrysolile. Or, les époux [N] indiquent qu'ils envisageaient d'effectuer l'aménagement des combles, travaux précisément évoqués dans l'annonce concernant la maison que leur a transmise la préposée de l'agence immobilière (p.19), comme les seuls travaux restant à effectuer après rénovation à l'état du neuf de cette maison.

Or, s'il n'est pas établi par les époux [N] à qui cette preuve incombe que la présence d'amiante en sous-toiture rendait la maison impropre à sa destination dans la mesure où l'amiante était confinée, il est constant que celle-ci diminuait son usage de manière importante dans la mesure où aucun travaux affectant l'aménagement et l'isolation intérieure des combles ou de toiture ne pouvait être entrepris sans qu'une procédure de travaux sur produits ou matériaux amiantés ne soit engagée. La présence de l'amiante en sous-toiture de la maison constitue en conséquence un vice caché.

L'article L271-4 du code de la construction et de l'habitation précise qu'en l'absence, lors de la signature de l'acte authentique de vente, d'un des documents mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 7° et 8° du I en cours de validité, le 2° concernant l'état mentionnant la présence ou l'absence de matériaux ou produits contenant de l'amiante prévu à l'article L. 1334-13 du même code, le vendeur ne peut pas s'exonérer de la garantie des vices cachés correspondante.

Les vendeurs ne contestant pas que le diagnostic produit dans le cadre de cette vente portait sur une maison voisine, il doit être considéré comme l'ont énoncé les premiers juges que le diagnostic exigé par la loi et relatif au bien vendu n'a pas été communiqué et que la clause exonératoire des vices cachés ne saurait s'appliquer, la circonstance que les acquéreurs aient précédemment eu connaissance d'un précédent diagnostic, non conforme au demeurant aux exigences de l'arrêté de décembre 2012, étant sans incidence au regard de l'exigence légale ci-dessus rappelée.

En conséquence, il convient de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a condamné les vendeurs à rendre une partie du prix aux époux [N]. Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté les acquéreurs de leur demande de dommages et intérêts dans la mesure où il n'est pas établi, comme indiqué ci-avant, que les vendeurs connaissaient le vice affectant l'immeuble et étaient de mauvaise foi.

- sur le préjudice des acquéreurs

M. et Mme [N] réclament la somme de 145'000 euros correspondant à la moins-value affectant la maison si la présence d'amiante avait été signalée, et produisent une attestation d'une agence immobilière évaluant la moins-value à ce montant.

Mme [E] et M. [C] répondent que le montant du préjudice des époux [N] ne saurait atteindre cette somme exorbitante, que la réfection de l'entière toiture s'élève à 75'752,49 euros au vu du devis produit par les intimés, et qu'eux- mêmes produisent un devis de 30'604,20 euros.

La société AC Environnement répond que la réparation du préjudice doit correspondre au seul coût du désamiantage qui n'impose pas une réfection totale de la toiture, et fait observer qu'au vu du devis produit par les époux [N] le coût du désamiantage est chiffré à 22'266,40 euros, l'entreprise ayant manifestement exagéré le montant de ses prestations. Elle se réfère au devis produit par les vendeurs et soutient que la somme allouée ne saurait dépasser 15'000 euros. Elle demande à la cour de statuer sur la répartition des fautes des parties dans la survenance du dommage afin de régler les rapports entre les éventuels coobligés, au motif qu'elle a réglé l'intégralité des sommes dues et n'a pu se retourner contre les consorts [E]-[C], le juge de l'exécution ayant estimé que sa créance n'était pas certaine, liquide et exigible.

Sur ce,

M. et Mme [N] produisent une facture acquittée et justifient ainsi qu'ils ont déboursé la somme de 86'858,81 euros pour rénover la toiture et y installer de nouvelles ouvertures. Il en ressort qu'il leur a été facturé 3.935,77 euros HT pour l'installation des dispositifs de sécurité nécessaires pour les travaux et 18'612,63 euros HT pour la dépose et l'évacuation de la couverture dont les plaques amiantées.

L'action estimatoire permettant à l'acquéreur d'obtenir la restitution du prix à hauteur du coût des travaux mis à sa charge pour remédier au vice, il y a lieu, infirmant en cela le jugement critiqué, de réduire le montant alloué par les premiers juges à la somme de 3.935,77 + 18.612,63 = 22.548,40 euros outre la TVA sur ces sommes, de 10 % sur la première et de 5,5 % sur la seconde, soit 22.548,40 + 393,58 + 1023,69 = 23.965,67 euros.

Mme [E] et M. [C] ne justifiant pas de ce que les époux [N] ont pu obtenir une subvention de l'Anah pour financer ces travaux, il n'y a pas lieu de minorer la somme ci-dessus.

- sur la responsabilité de la société AC Environnement

Mme [E] et M. [C] font valoir que les conséquences résultant de l'erreur de diagnostic doivent être entièrement assumées par la société AC Environnement qui a seule engagé sa responsabilité en produisant un diagnostic erroné dans la mesure où eux-mêmes avaient rempli leur obligation se limitant à fournir un diagnostic établi par un professionnel à annexer à l'acte authentique de vente.

La société AC Environnement fait observer que la présence éventuelle d'amiante ne pouvait être détectée qu'en montant sur le toit et en déplaçant des tuiles, que le diagnostiqueur n'est pas autorisé à réaliser des sondages, des démontages d'éléments d'équipements et de matériaux et que la présence d'amiante ne pouvait être découverte dans ces conditions. Elle fait valoir qu'il n'existe aucun lien de causalité entre la présence d'amiante et l'erreur de transmission de diagnostic et que sa responsabilité délictuelle ne peut être retenue.

Il est constant que le contrôle auquel devait procéder le diagnostiqueur amiante consistait à détecter la présence d'amiante dans les matériaux susceptibles d'en contenir, et notamment la toiture, sans pouvoir toutefois procéder à des travaux destructifs.

Toutefois, il résulte de ce qui précède qu'il suffisait de soulever une tuile pour constater la présence en sous-toiture de plaques de fibres-ciment, matériau connu comme susceptible de contenir de l'amiante. C'est pourquoi, la société AC Environnement s'étant abstenue de cette vérification non destructive qui lui aurait permis d'informer les propriétaires de la maison que la toiture était susceptible de recéler de l'amiante, elle a commis une faute engageant sa responsabilité.

En ne communiquant pas au notaire chargé de la vente un diagnostic concernant le bien vendu, la société AC Environnement a commis une seconde faute qui a privé Mme [E] et M. [C] de l'efficacité de la clause de non garantie des vices cachés stipulée au contrat de vente.

La cour relève que les vendeurs ont apposé leurs paraphes sur la première page du diagnostic erroné, qui comportait une photographie très visible montrant les vastes fenêtres de la maison concernée, fort différentes de la propriété cédée dont les ouvertures sont beaucoup plus petites. Ils n'ont pas fait état de ce que le diagnostic ne correspondait pas à l'immeuble vendu, et cette abstention fautive les a privés du bénéfice de la clause exonératoire des vices cachés insérée à l'acte.

C'est pourquoi la cour confirmera la décision dont appel en ce qu'elle a condamné solidairement M. [C], Mme [E] et la société AC Environnement au paiement, et précisera que dans les rapports entre eux la contribution de chacune des parties sera de la moitié de la dette.

La demande des époux [N] étant accueillie, il n'y a pas lieu d'examiner leur demande subsidiaire dirigée contre la SCP de notaires.

M. [C] et Mme [E], d'une part et la société AC Environnement, parties perdantes, seront condamnés in solidum aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats de la cause, ainsi qu'à verser aux époux [N], chacun, une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, le surplus des demandes à ce titre étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Ecarte les conclusions déposées par M. et Mme [N] le 30 janvier 2020 et la pièce n°22 communiquée à cette date ;

Déclare recevable la demande en paiement d'une somme de 245.000 euros formée en cause d'appel par M. et Mme [N] ;

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 17 octobre 2018, sauf en ce qu'il a alloué à M. [D] [N] et Mme [V] [F] [L] épouse [N] la somme de 145.000 euros,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Condamne in solidum M. [S] [C] et Mme [X] [E], d'une part, et la SARL AC Environnement, d'autre part, à payer à M. et Mme [N] la somme de 23.965,67 euros ;

Dit que dans leurs rapports entre eux, M. [C] et Mme [E] d'une part et la société AC Environnement d'autre part seront tenus chacun à hauteur de la moitié de la dette ;

Condamne in solidum M. [C] et Mme [E], d'une part et la société AC Environnement, d'autre part, aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit des avocats de la cause, et au paiement chacun à M. et Mme [N] d'une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, les autres demandes à ce titre étant rejetées.

LE GREFFIER LE PRESIDENT