Cass. 3e civ., 17 novembre 1993, n° 91-18.833
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
M. Valdès
Avocat général :
M. Marcelli
Avocats :
Me Blanc, SCP Le Bret et Laugier
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 26 juin 1991), que la société civile immobilière Les Lodines (SCI), maître de l'ouvrage, a, en 1981, chargé M. X..., entrepreneur, de l'installation dans plusieurs appartements de son immeuble de chaudières murales, assurant le chauffage et la production d'eau chaude, fabriquées par la société Chaffoteaux et Maury ; que des désordres étant survenus après la réception des travaux, prononcée le 11 avril 1984, deux de ces chaudières ayant explosé le 16 janvier 1985 et le 31 janvier 1987, la SCI, qui avait, le 18 février 1987, demandé en référé la désignation d'un expert, a, les 11 et 18 octobre 1988, assigné l'entrepreneur et le fabricant en réparation de son préjudice ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande irrecevable, en raison de la forclusion biennale de l'article 1792-3 du Code civil, alors, selon le moyen, "1) que la cour d'appel a laissé sans réponse les conclusions par lesquelles la SCI Les Lodines se prévalait de l'acquiescement donné au jugement par M. X... du fait du règlement par lui des frais et dépens y afférents opéré postérieurement à l'appel interjeté du même jugement par la société Chaffoteaux et Maury (violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile) ; 2) qu'il résultait des constatations de fait opérées par le jugement, auxquelles s'est référé l'arrêt, que les explosions étaient la conséquence d'un vice de conception qui affectait l'ensemble des chaudières et, donc, l'installation de chauffage considérée dans son ensemble, soumise, dès lors, à la prescription décennale (violation des articles 1792-3 et 1792-4 du Code civil ;3) qu'un nouveau délai d'épreuve, de dix ou de deux années selon le cas, court du jour de la réception des travaux de réparation des malfaçons ; qu'ainsi, il appartenait aux juges qui relevaient qu'à la suite d'une première explosion, survenue le 16 janvier 1985, la chaudière principalement incriminée avait fait l'objet, en juin 1986 selon l'expert, d'un remplacement, de déterminer la date exacte de l'exécution de celui-ci, qui marquait le point de départ du nouveau délai (manque de base légale au regard de l'article 2270 du Code civil)" ;
Mais attendu, d'une part, que le fait pour l'entrepreneur condamné solidairement avec le fabricant d'exécuter, du chef des frais et dépens, le jugement du 9 février 1990 assorti de l'exécution provisoire ne valant pas acquiescement à ce jugement, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que les chaudières murales litigieuses pouvaient être déposées et remplacées sans atteinte à l'installation générale, et ainsi retenu que ces éléments d'équipement ne faisaient pas indissociablement corps avec un ouvrage de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos et de couvert, la cour d'appel en a exactement déduit qu'ils entraient dans le champ d'application de la garantie biennale de l'article 1792-3 du Code civil, sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est recevable :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt rejette la demande formée par la société Chaffoteaux et Maury contre la SCI en restitution des sommes versées par la société Chaffoteaux et Maury au titre de l'exécution provisoire du jugement, sans comporter aucun motif de ce chef ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande formée par la société Chaffoteaux et Maury contre la société civile immobilière Les Lodines en restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement, avec intérêts de droit au jour du règlement, l'arrêt rendu le 26 juin 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la SCI Les Lodines aux dépens des pourvois et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Riom, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-sept novembre mil neuf cent quatre-vingt-treize.