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Décisions

CA Rennes, 4e ch., 19 septembre 2002, n° 01/00355

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bizeuil

Défendeur :

ATELIER 89 (S.A.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avoués :

SCP CHAUDET & BREBION, Me GAUTIER

Avocats :

Me CONTANT, SCP ELGHOZI-GEANTY-WEEGER-BOUREL

CA Rennes n° 01/00355

18 septembre 2002

I - Exposé préalable :

Le 10 janvier 2001, M. et Mme Yves BIZEUL ont déclaré appel d'un jugement du 5 décembre 2000, aux énonciations duquel il est fait référence quant à l'exposé des prétentions formulées et des moyens articulés par les parties à ce stade de la procédure, par lequel le Tribunal de grande instance de DINAN, statuant sur les demandes faisant l'objet de l'instance introduite par l'assignation qui leur avait été délivrée le 26 août 1999 à la demande de la société anonyme ATELIER 89,

- a condamné les époux Yves BIZEUL à payer à la société ATELIER 89 la somme de 80 818,34 francs avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2000 ;

- leur a ordonné de consigner auprès du compte CARPA-SEQUESTRE du Barreau de DINAN une somme de 10 000 francs représentant le solde contractuellement du à titre de retenue, et a dit que cette somme ne sera réglée à l'une on l'autre des parties qu'en exécution d'une décision de justice ou d'un accord conclu entre les parties ;

- les a déboutés de leur demande au titre des pénalités de retard ainsi qu'en dommages et intérêts;

- les a condamnés à payer à la société ATELIER 89 la somme de 5000 francs à titre de dommages et intérêts;

- a ordonné une expertises, confiée à M. Robert MARCHIX, lequel, après s'être rendu sur les lieux, rue Launay à Broons (22), s'être fait remettre tous documents et avoir entendu, si nécessaire, tous sachants à condition de les désigner nommément dans son rapport, aura pour mission de :

- visiter l'immeuble et dire si les désordres allégués portant notamment sur une dalle d'isolation dans la cave, des gravats non enlevés sur le terrain, des portes de placards non parfaitement ajustées, des menuiseries extérieures, la défaillance de clefs et "bips" existent, dans ce cas les décrire et en indiquer la nature, la gravité et dire s'ils affectent le gros ouvrage et portent atteinte à la solidité de l'édifice et le rendent impropre à sa destination,

- en rechercher les causes, dire notamment s'ils proviennent d'une erreur de conception, d'un vice du matériau, d'une erreur ou d'une maladresse dans leur mise en oeuvre ou de toute autre cause,

- apprécier si le maître d'oeuvre a exécuté sa mission conformément aux usages et aux règles de l'art, dans la négative, expliquer dans quelle mesure le manquement a eu une influence sur le dommage,

- dire si l'entreprise concernée s'est conformée aux plans et devis et a exécuté les travaux prévus conformément aux règles de sa profession en respectant les directives et en utilisant les matériaux prescrits,

- indiquer les travaux propres à remédier aux désordres, en évaluer le coût, ainsi que celui des travaux non exécutés et des travaux de finition en cas de travaux exécutés partiellement,

- évaluer s'il y a lieu les autres éléments du préjudice.

- s'expliquer sur les dires et observations des parties ;

- a ordonné l'exécution provisoire sur le paiement du solde de facture contractuellement du et la consignation de la retenue ;

- a condamné les époux Ives BIZEVE à payer à la société ATELIER 98 la somme de 5000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et les a déboutés de leur demande sur le même fondement;

- les a condamnés aux dépens ;

- et a ordonné le retrait de l'affaire du rôle général.


Il est procédé à l'exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens par visa des conclusions déposées :

- le 21 mai 2002, par M. et Mme Yves BIZEUL, appelants ;

- le 24 mai 2002, par "ATELIER 89 SA", intimée.

II - Motifs :

M. Robert-Paul MARCHIX a établi son rapport le 12 mars 2001 et ce document figure aux pièces produites par chacune des parties.

Il en résulte que la construction est bien affectée de désordres concernant l'appui de la baie de la véranda et le vide sanitaire, le coût des travaux de réparation étant de 6 000 francs pour le premier et de 1 400 francs pour le second. Il convient également de purger deux poches de gravats dans le jardin, ce qui coûtera 600 francs.

L'intimée reconnaît devoir la somme de 1 400 francs au titre de la remise en état du vide sanitaire.

Elle soutient par contre que la présence de gravats non enlevés n'a fait l'objet d'aucune réserve à la réception, bien que visible. Mais, ce défaut de finition ayant été expressément signalé par courrier du maître de l'ouvrage du 27 octobre 1998, soit dans le délai de parfait achèvement, la remise en état est bien due par le constructeur.

Le défaut de planéité de l'appui de fenêtre de la véranda ayant été expressément réservé à la réception, la réparation de ce désordre obéit au même régime.

Contrairement à ce que soutient la société ATELIER 89, il ne s'agit pas d'un simple défaut d'aspect pouvant être traité par l'exécution d'un simple ragréage, mais, selon les constatations de l'expert, d'une insuffisance de pente entraînant la stagnation de l'eau de pluie avec risque d'infiltrations dans le temps.

La nature des travaux nécessaires pour y remédier rend inutile la polémique élevée sur l'intervention de M. MAZZALOVO le 17 avril 1999 et l'attitude opposante qui est prêtée à M. BIZEUL en cette occasion par l'intimée, et la société ATELIER 89 est bien redevable aux maîtres de l'ouvrage du coût de la réfection qui comprend la démolition de l'appui, la réfection avec pente et goutte d'eau, les raccords d'enduit, le tout chiffré par l'expert à 6 000 francs.

Ainsi, le solde dû après déduction de la somme de 1400 francs de remise en état du vide sanitaire étant de 89 418,34 francs, il convient de soustraire en outre 6 600 francs pour fixer à 82 818,34 francs, soit 12 625,57 €, le montant de la somme due par M. et Mme BIZEUL à la demanderesse principale.

Les appelants sont mal fondés à prétendre à l'existence d'autres désordres qui ne font l'objet que d'un dire en date du 29 janvier 2001, donc antérieur au rapport d'expertise judiciaire.

Il était stipulé à l'article 22 du contrat de construction de maison individuelle qu'une pénalité s'appliquerait conformément aux conditions particulières en cas de retard non justifié dans l'achèvement de la construction.

La pénalité était fixée aux conditions particulières à 1/3000 du prix convenu par jour ouvrable de retard. Ce prix étant de 1 169 154,20 francs H.T., la pénalité journalière est donc de 59,41 €. 

Le délai d'exécution étant fixé par ces mêmes conditions particulières à douze mois à compter de la date d'ouverture du chantier et cette date ayant été fixée au 25 septembre 1996 suivant attestation de la société ATELIER 89 du 16 septembre 1996, les travaux devaient donc être achevés le 25 septembre 1997. 

C'est à la date de réception que doit être fixé l'achèvement des travaux quant au calcul des éventuelles pénalités de retard puisque, malgré les réserves que peut exprimer le maître de l'ouvrage, cette opération concrétise son acceptation de l'ensemble de l'ouvrage.

Contrairement à ce que prétend la société ATELIER 89, le courrier qui lui à été adressé le 4 novembre 1996 par M. BIZEUL, s'il contient un rappel de précautions d'ordre technique dont il appartenait au constructeur d'apprécier la pertinence, ne permet nullement de transférer sur le maître de l'ouvrage la responsabilité du retard et d'en exonérer le constructeur par application de la justification prévue au dernier alinéa de l'article 20 du contrat.

Par ailleurs, il n'est pas justifié de l'incidence de travaux supplémentaires ou modificatifs sur le retard subi par le chantier.

Il y a lieu en conséquence, par réformation sur ce point du jugement dont appel, de mettre à la charge de la société ATELIER 89 les pénalités contractuelles de retard du 26 septembre 1997 au 3 mars 1998.

Compte tenu de la disproportion qui subsiste néanmoins entre le montant de la somme retenue par M. et Mme BIZEUL et celui de leur créance de réparations et de pénalités envers la société ATELIER 89, il convient de maintenir la condamnation au paiement de la somme de 5 000 francs de dommages et intérêts.

Par contre, aucune considération d'équité ne justifie l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties, que ce soit en première instance ou au titre de la procédure d'appel.

IIl - Décision : 

LA COUR :

Reçoit l'appel, régulier en la forme ;

- Réforme le jugement rendu le 5 décembre 2000 par le Tribunal de grande instance de DINAN en ce qu'il a débouté M. et Mme Yves BIZEUL de leurs demandes au titre des pénalités de retard et en ce qu'il les a condamnés au paiement des sommes de 80 808,34 francs avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2000 et de 5000 francs en application des dispositions de l'article 70 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance ;

- Statuant à nouveau de ces chefs,

- Condamne M. et Mme Yves BIZEUL à payer à la société anonyme ATELIER 89 la somme de 12 625,57 €avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2000, en ce compris le montant de la consignation ordonnée par le jugement;

- Condamne la société anonyme ATELIER 89 à payer à M. et Mme Yves BIZEUL, à titre de pénalités de retard, la somme de 59,41 € par jour ouvrable du 26 septembre 197 inclus au 3 mars 198 inclus;


- Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions critiquées ;

- Déboute les parties de toutes demandes contraires ou supplémentaires ;-

- Fait masse des dépens de première instance et d'appel, dit que la charge en sera supportée pour moitié par chacune des parties et admet les avoués en la cause, dans cette proportion, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

En raison de l'empêchement du président, le présent arrêt est signé, conformément aux dispositions de l'article 456 du nouveau Code de procédure civile, par l'un des conseillers qui en ont délibéré.