CA Rennes, 4e ch., 14 février 2002, n° 00/04567
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
DESBOIS
Défendeur :
LECOQ (consorts)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avoués :
SCP CHAUDET & BREBION, SCP D'ABOVILLE, DE MONCUIT SAINT HILAIRE, LE CALLONNEC
Avocats :
Me DUVAL, Me LAHALLE,
I - Exposé préalable :
Le 5 juillet 2000, M. Jean-François DESBOIS a déclaré appel d'un jugement du 9 mai précédent, aux énonciations duquel il est fait référence quant à l'exposé des prétentions formulées et des moyens articulés par les parties à ce stade de la procédure, par lequel le Tribunal de grande instance de SAINT-BRIEUC, statuant sur les demandes faisant l'objet de l'instance introduite par l'assignation qui lui avait été délivrée le 19 février 1998 à la demande de M. Didier LE COQ et de Mme Nathalie LENOUVEL épouse LE COQ, au vu d'un rapport d'expertise judiciaire établi le 9 mars 1999 par M. Jean-Paul DUBOIS en exécution d'une ordonnance de référé du 2 janvier 1998,
- a déclaré les époux Didier LE COQ et Nathalie LENOUVEL recevables en leurs demandes;
- a fixé la créance des époux Didier LE COQ et Nathalie LENOUVEL sur Jean-François DESBOIS au titre des travaux de reprise de la toiture de la maison d'habitation édifiée par ce dernier à 78 980,88 F ;
- a fixé la créance de Jean-François DESBOIS sur les époux Didier LE COQ et Nathalie LENOUVEL à 17 307,40 F;
- a compensé ces créances;
- a condamné Jean-François DESBOIS à payer aux époux Didier LE COQ et Nathalie LENOUVEL les sommes de :
- 67 673,48 F avec intérêts de retard au taux légal à compter du 19 février 1998, date de l'assignation ;
- 5000 F à titre de dommages et intérêts complémentaires, avec intérêts de retard au taux légal à compter de la date de prononcé du jugement ;
- a ordonné l'exécution provisoire du jugement de ces chefs;
- a condamné Jean-François DESBOIS à payer aux demandeurs la somme de 8000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- a dit que les dépens de l'instance comprendront ceux de la procédure de référé diligentée et le coût de l'expertise ordonnée par décisions en date des 2 janvier et 18 juin du Juge des Référés de ce siège;
- a rejeté tous autres chefs de demande;
- et a condamné Jean-François DESBOIS aux entiers dépens.
Il est procédé à l'exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens par visa des conclusions déposées :
- le 30 octobre 2000, par M. Jean-François DESBOIS, appelant ;
- le 5 février 2001, par M. Didier LE COQ et Mme Nathalie LENOUVEL épouse LE COQ, intimés et appelants incidents.
I - Motifs :
Le devis de couverture établi le 24 mars 1995 par M. Jean-François DESBOIS à l'intention de M. et Mme Didier LE COQ et paraphé par l'entrepreneur et les maîtres de l'ouvrage comprend, au premier poste, la désignation suivante : "Couverture ardoises d'Espagne format 27 x 18 type GALIZA ou similaire posées aux crochets inox sur liteaux traités 37x14 (garantie de 30 ans)".
Sauf à vider la convention des parties d'un élément essentiel de son contenu, cette mention ne peut être interprétée que comme un engagement ferme de l'entrepreneur à utiliser pour la couverture de la construction des ardoises présentant les caractéristiques et offrant les qualités de celles du
type GALIZA.
Si, comme le soutient l'appelant, son intention, lorsqu'il a rédigé ce poste du devis, était seulement "d'écarter l'ardoise d'Angers pour l'adoption d'une ardoise d'Espagne galiza ou autre", il lui suffisait d'indiquer la provenance, ainsi qu'il l'a d'ailleurs fait, sans ajouter le type dont l'indication expresse introduisait nécessairement dans la convention la référence à un ensemble de particularités dont les co-contractants sont par là-même fondés à se prévaloir sans qu'il soit nécessaire de rechercher si l'information correspondante avait été, ou non, transmise aux maîtres de l'ouvrage lors de la conclusion du contrat.
Or, l'expert judiciaire a obtenu de la société LARIVIERE, distributeur exclusif de la marque "GALIZA", le document spécifiant les caractéristiques du produit correspondant qui, devant répondre au plus haut niveau de qualité", n'existe "qu'en premier choix". La référence à cette qualité supérieure implique, au regard de la classification de la norme NFP 32 302, seul document définissant la qualité des ardoises, que les matériaux, ainsi définis comme relevant de la classe A, soient exempts de toute pyrite ou micro-pyrite entraînant des coulures.
Si le changement des "ardoises rouillées" mentionnées au procès-verbal de réception du 4 mars 1997 doit être considéré comme acquis au vu du procès-verbal de levée de réserves du 13 mars suivant, M. et Mme LE COQ ont bien notifié à M. DESBOIS, par assignation en référé délivrée le 23 décembre 1997, donc dans le délai d'un an prévu à l'article 1792-6, second alinéa, du Code civil, l'apparition d'une oxydation des ardoises, phénomène constaté dans un rapport de la société EUREXPA en date du 17 novembre 1997.
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire établi par M. DUBOIS que les ardoises constituant la couverture du pavillon de M. et Mme LE COQ recèlent de la pyrite de fer avec coulures d'oxydation, ce qui est confirmé par l'analyse du Laboratoire National d'Essais dont les conclusions font apparaître que les douze ardoises prélevées comme échantillons présentent des épaisseurs irrégulières, des inclusions superficielles métalliques rouillées avec des coulures, que l'une d'entre elles présente un noeud saillant dans la partie centrale de 2,3 m et qu'une autre présente une inclusion métallique traversante rouillée hors de la zone centrale.
L'expert précise que, sur l'ensemble de la couverture, li est difficile de trouver des ardoises sans pyrite de fer oxydée.
Il résulte de cet ensemble d'éléments que les ardoises constituant la couverture du bâtiment faisant l'objet du contrat sont affectées de défauts caractérisant leur non conformité aux spécifications contractuelles.
A ce titre, le constructeur, M. Jean-François DESBOIS, est redevable de la garantie de parfait achèvement régie par les dispositions de l'article 1792-6 du Code civil.
Au surplus, et quelle que soit la réponse donnée à la question de savoir si les ardoises livrées et posées sont conformes aux spécifications de la commande, leur oxydation générale constitue en elle-même un désordre entrant dans les prévisions du texte précité, ce qui suffit à fonder l'obligation de réparation invoquée par les intimés à l'encontre de l'appelant.
Celui-ci doit donc être condamné, comme il l'a été par les premiers Juges, au paiement du coût des travaux de reprise décrits et chiffrés par l'expert.
Le taux réduit de la T.V.A. n'a pas lieu de s'appliquer dès lors que, la présente condamnation étant prononcée sur le fondement des dispositions de l'article 1792-6 du Code civil relatif à la garantie de parfait achèvement, la construction ne peut être considérée comme terminée depuis au moins
deux ans.
Il y a lieu, par conséquent, à confirmation du jugement, y compris sur le montant de l'indemnité allouée en réparation du trouble de jouissance et du préjudice esthétique.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M et Mme LE COQ l'intégralité des frais exposés par eux en cause d'appel et non compris dans les dépens, ce pourquoi il est justifié de leur allouer la somme de 900,00 euros en plus de celle de 8000 francs déjà fixée à ce titre par les premiers Juges.
Il - Décision :
LA COUR :
- Reçoit les appels, réguliers en la forme ;
- Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 mai 2000 par le Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc ;
Condamne M. Jean-François DESBOIS à payer à M. et Mme Didier LE COQ la somme de 900,00 €cen application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- Déboute les parties supplémentaires de toutes demandes contraires ou supplémentaires;
- Condamne M. Jean-François DESBOIS aux dépens et admet la S.C.P. d'Abovile, de Moncuit-Saint-Hilaire et Le Calonnec, avoués, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.