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Décisions

Cass. com., 30 septembre 2020, n° 19-10.423

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Delvolvé et Trichet

Dijon, du 20 nov. 2018

20 novembre 2018

Faits et procédure

 

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 20 novembre 2018) et les productions, la SARL Sciences environnement a conclu, le 14 avril 2010, un contrat de co développement avec la SARL Element Power France (la société Element Power), portant sur la création d'une centrale solaire photovoltaïque, le maître de l'ouvrage étant la SASU Photovoltaïque Hixem, filiale à 100 % de la société Element Power.

 

2. Le 13 janvier 2015, la SARL Sciences environnement a assigné la société Photovoltaïque Hixem devant le tribunal de commerce de Dijon, aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer une certaine somme en exécution de ce contrat.

 

Examen des moyens

 

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

 

Enoncé du moyen

 

2. La société Photovoltaïque Hixem fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté l'exception d'incompétence qu'elle avait soulevée et, infirmant le jugement, de la condamner à payer une certaine somme, outre intérêts majorés, à la société Science environnement et de rejeter sa demande en paiement alors « que souscrite par des commerçants et rédigée en termes très apparents, une clause attributive de compétence territoriale est valable dès lors qu'elle permet de déterminer le tribunal choisi ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que le contrat conclu entre la SARL Element power et la SARL Sciences environnement, qui demandait que la SASU Photovoltaïque Hixem l'exécute, comportait une clause attributive de compétence territoriale aux termes de laquelle "tout différend relatif à la validité, l'interprétation, l'exécution ou l'inexécution ou la résiliation du présent contrat [serait] soumis à défaut d'accord amiable aux tribunaux de Paris" ; qu'en retenant que cette clause n'aurait pas été valable et que le tribunal de commerce de Dijon aurait été compétent dès lors que, "si le siège de la juridiction choisie [était] parfaitement identifiable, tel [n'aurait pas été] le cas de la nature de la juridiction concernée", et que la clause n'aurait pas été "explicite comme ne renvoyant pas à une juridiction précise", quand cette clause, qui excluait clairement et précisément la compétence de tout autre tribunal que les tribunaux de Paris, permettait de déterminer la nature et le siège de la juridiction choisie par les parties, en fonction de leur seule qualité, la cour d'appel a violé l'article 48 du code de procédure civile. »

 

Réponse de la Cour

 

Vu l'article 48 du code de procédure civile :

 

3. Il résulte de ce texte que la clause d'un contrat qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale n'est valable que si, souscrite, en cette qualité, par des commerçants et rédigée en termes très apparents, elle permet de déterminer le tribunal choisi.

 

4. Pour écarter l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société Photovoltaïque Hixem, l'arrêt retient que si la clause litigieuse est en l'occurrence apparente puisqu'elle figure dans un article 17 clairement identifié au contrat, elle vise cependant "les tribunaux de Paris", de sorte que, si le siège de la juridiction choisie est parfaitement identifiable, tel n'est pas le cas de la nature de la juridiction concernée, qu'ainsi elle n'est pas explicite comme ne renvoyant pas à une juridiction précise, qu'elle n'est donc pas valable et ne saurait, par suite, être opposée à la SARL Sciences environnement.

 

5. En statuant ainsi, alors que la nature de la juridiction choisie, à savoir le tribunal de commerce de Paris, était déterminable par la seule qualité de sociétés commerciales des parties, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

 

Portée et conséquences de la cassation

 

6. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3 , alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

 

7. L'intérêt d'une bonne administration de la justice commande en effet que la Cour de cassation statue sur l'exception d'incompétence et renvoie l'affaire, conformément à l'article 90 du code de procédure civile, devant la cour d'appel de Paris, juridiction d'appel du tribunal de commerce de Paris, qui aurait été compétent pour connaître de l'action en première instance.

 

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

 

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

 

Dit n'y avoir lieu à renvoi sur l'exception d'incompétence ;

 

Infirme le jugement entrepris ;

 

Statuant à nouveau,

 

Déclare l'exception d'incompétence soulevée par la société Photovoltaïque Hixem bien fondée ;

 

Déclare le tribunal de commerce de Dijon incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris ;

 

Renvoie l'affaire et les parties devant la cour d'appel de Paris, juridiction d'appel du tribunal compétent, à laquelle le dossier sera transmis par les soins du greffe de la cour d'appel de Dijon, avec la copie du présent arrêt.