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Décisions

Cass. com., 14 octobre 2020, n° 18-23.549

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

Me Occhipinti, SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh

Rennes, du 25 septembre 2018

25 septembre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 septembre 2018 ), la société Immobilière 3F (la société 3F), maître d'ouvrage, a confié à l'entreprise générale SRB construction (la société SRB), entrepreneur principal, la réalisation d‘un ensemble de logements. Par un contrat de sous-traitance du 17 juin 2015, cette dernière a confié la réalisation de travaux sur un lot à la Société bretonne d‘électricité industrielle (la SBEI), sous-traitant, qui a conclu, avec le maître d'ouvrage et l'entrepreneur principal, une délégation de paiement.

A la suite de litiges survenus entre les sociétés SRB et SBEI, la SBEI a assigné la société SRB, ainsi que la société 3F, en paiement solidaire du solde du marché devant le tribunal de commerce de Lorient. La société 3F a soulevé l'incompétence de ce tribunal au profit du tribunal de grande instance de Paris, en application d'une clause attributive de juridiction.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La société 3F fait grief à l'arrêt de rejeter son exception d'incompétence et de dire, en conséquence, que le tribunal de commerce de Lorient est compétent pour connaître du litige, alors :

«1°/ qu'une clause insérée dans le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) signé entre le maître d'ouvrage et l'entrepreneur principal est opposable au sous-traitant si le contrat de sous-traitance qu'il a signé renvoie expressément au CCAP contenant cette clause ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que le contrat de sous-traitance signé entre la société SRB et la SBEI précisait, en son article 2, que parmi les documents particuliers signés et validés par les parties, figure le cahier des clauses administratives particulières (CCAP), ce renvoi exprès conférant à celui-ci force obligatoire en toutes ses stipulations à l'égard du sous-traitant ; qu'en estimant néanmoins que la SBEI n'était pas liée par la clause attributive de juridiction stipulée dans le CCAP, faute pour celui-ci de comporter la signature du sous-traitant, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et s'est prononcée par un motif inopérant, a violé les articles 48 du code de procédure civile et 1134 du code civil dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°/ qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt, d'une part, que la demande de délégation de paiement signée par la SBEI et adressée au maître de l'ouvrage contient une clause d'attribution de compétence au "tribunal compétent du siège social du maître de l'ouvrage", et, d'autre part, que le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) attribue compétence au tribunal de grande instance du siège social du maître de l'ouvrage ; que loin de comporter une contradiction, ces clauses conduisent à donner compétence au tribunal de grande instance dans le ressort duquel le maître de l'ouvrage a son siège ; qu'en décidant néanmoins de déterminer la compétence juridictionnelle par application des règles de droit commun après avoir neutralisé ces clauses en raison de leur prétendue contradiction, la cour d'appel a violé les articles 48 du code de procédure civile et 1134 du code civil dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

3. Après avoir relevé que le contrat de sous-traitance précise dans son article 2 que, parmi les documents particuliers et validés par les parties, qui constituent le dossier commun, figure le Cahier des charges administratives particulières (CCAP) du marché de travaux conclu entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur principal, l'arrêt retient que la société 3F est liée au sous-traitant par deux instruments comportant, chacun, une clause attributive de juridiction, soit la clause comprise dans le CCAP, qui donne compétence au tribunal de grande instance du siège social du maître d'ouvrage et la clause stipulée dans la délégation de paiement, qui attribue compétence aux tribunaux du siège du maître de l'ouvrage.

4. Ayant retenu ensuite que ces clauses attributives de compétence se contredisaient entre elles dans la mesure où, s'agissant d'un litige entre sociétés commerciales, le « tribunal compétent du siège social du maître de l'ouvrage » ne peut se confondre avec le « tribunal de grande instance du siège social du maître de l'ouvrage », c'est à bon droit que la cour d'appel, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la première branche, a jugé que cette contradiction devait conduire à déclarer ces clauses inapplicables au litige et à revenir aux règles de droit commun des articles L. 721-3 du code de commerce, selon lesquelles les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux engagements entre sociétés commerciales, et 42 du code de procédure civile, qui, lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, permettent au demandeur de saisir, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux, ce qui autorisait la SBEI à saisir le tribunal de commerce de Lorient dans le ressort duquel se trouve le siège social de la société SRB.

5. Le moyen, pour partie inopérant, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.