Cass. 2e civ., 16 mai 2002, n° 00-20.050
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Rapporteur :
Mme Bezombes
Avocat général :
M. Joinet
Avocats :
SCP Rouvière et Boutet, SCP Vincent et Ohl
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 9 mai 2000, n° 285), que les époux Z..., qui se plaignaient de nuisances sonores provenant de l'usine de la société Papeterie d'Anjou (la société), ont assigné cette dernière en invoquant un trouble anormal de voisinage ; que le Tribunal, statuant au vu d'un rapport d'expertise, a condamné la société à payer une certaine somme à M. et Mme Z... ; que la société a relevé appel de cette décision ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement alors, selon le moyen :
1° que les experts X... et B..., seuls missionnés, ayant constaté que les mesures dans la maison Z... étaient inférieures à la réglementation en vigueur, et la société n'ayant été finalement recherchée et condamnée qu'en raison de " basses fréquences " non constatées par les experts commis, mais unilatéralement affirmées dans le cadre d'un rapport d'acoustique établi par la société Socotec, non mandatée, en présence des seuls experts et des plaignants, les époux Z..., sans que la société Papeterie d'Anjou en fût même informée, la décision viole le principe du contradictoire, le fait que les parties ayant prétendument admis que les experts puissent revenir seuls, de façon inopinée, faire des mesures d'acoustique étant sans commune mesure avec l'établissement unilatéral d'un rapport intégré dans le rapport des experts et dont la technicité excluait précisément, de plus fort, toute discussion utile dans l'immédiat (violation des articles 16 du nouveau Code de procédure civile, 263 et suivants, 278 et 279 du même Code) ;
2° que dès lors qu'un expert ne remplit pas personnellement la mission qui lui est confiée, les actes accomplis en méconnaissance de cette obligation ne peuvent valoir opérations d'expertise ; qu'ayant confié à la société Socotec le soin d'établir l'existence de basses fréquences excessives, alors que cela relevait de leur propre mission, les experts, méconnaissant la notion de procès équitable, ont entaché de nullité les opérations d'expertise (violation des articles 233, 278 et 279 du nouveau Code de procédure civile et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales) ;
3° que l'arrêt, qui constate en dernier lieu le caractère imaginaire des doléances des époux Z..., ne pouvait rejeter des débats sans aucune analyse les rapports ITAC des 7 septembre et 11 décembre 1990 dont la société s'était prévalue devant les experts, le rapport de M. Y... et le constat de M. A..., dont l'importance était d'autant plus grande qu'ils ont précisément été autorisés par ordonnance du président du tribunal de grande instance d'Angers à rechercher la réalité ou l'existence des émissions de basses fréquences irrégulières (manque de base légale : article 455 du nouveau Code de procédure civile et 1382 du Code civil) ;
Mais attendu que les experts pouvaient confier à la Socotec qui disposait des instruments appropriés, l'exécution d'investigations à caractère technique, sans manquer pour autant à leur obligation de remplir personnellement leur mission et sans méconnaître les exigences du procès équitable ;
Et attendu que c'est sans violer le principe de la contradiction, que la cour d'appel, constatant que les résultats des mesures acoustiques effectuées par la société Socotec avaient été communiqués aux parties avant le dépôt du rapport, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve, statué comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.