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Décisions

CAA Paris, 1re ch., 22 avril 2003, n° 01PA02307

PARIS

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme lae Camguilhem

Rapporteur :

M. Lenoir

Commissaire du gouvernement :

Mme Massias

CAA Paris n° 01PA02307

21 avril 2003

VU le recours, enregistré le 16 juillet 2001 au greffe de la cour, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ; Le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement N° 371/8 du 30 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Melun a condamné l'Etat à verser à M. Z... une indemnité de 88.000 F majorée des intérêts de droit à compter du 17 juin 1999 ;

2°) de ramener à la somme de 43.030,04 F l'indemnité que l'Etat doit verser à M. Z... ;

.......................................................................................................

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code de la construction et de l'habitation ;

VU la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 04 avril 2003 :

- le rapport de M. LENOIR, premier conseiller,

- les observations de Me A..., avocat, pour M. Z...,

- et les conclusions de Mme MASSIAS, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par une ordonnance en date du 7 avril 1998, le juge des référés du tribunal d'instance de Lagny sur Marne a autorisé, pour défaut de paiement de loyers, l'expulsion de M. et Mme X... d'un local à usage commercial et d'habitation situé ... (Seine et Marne) que leur avait loué M. Z... et a accordé à ce dernier une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 4.000 F ; qu'après avoir délivré aux occupants le 5 août 1998 un commandement de quitter les lieux, l'huissier instrumentaire a requis le 8 janvier 1999 le concours de la force publique ; que cette demande est restée sans effet ; que, saisi par M. Z... d'une demande d'indemnisation, le tribunal administratif de Melun a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 88.000 F au titre de l'indemnité d'occupation non versée ; que le ministre de l'intérieur interjette appel en demandant l'annulation de l'article 2 de ce jugement et la réduction de l'indemnité due à M. Z... à un montant de 43.030,04 F ; que, par de nouvelles conclusions présentées le 20 février 2002, M. Z... a indiqué que la responsabilité de l'Etat devait être engagée du 19 mars 1999 au 18 septembre 2000, date de la libération des lieux et que l'indemnité qui lui était due devait être fixée à la somme de 72.087,74 F (10.989,71 euros) ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 9 juillet 1991 susvisée portant réforme des procédures civiles d'exécution entrée en application le 1er janvier 1993 : L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation. ; qu'aux termes de l'article 50 du décret du 31 juillet 1992 susvisé pris pour l'application de la loi du 9 juillet 1991 : ... Le défaut de réponse (à une demande de concours de la force publique) dans un délai de deux mois équivaut à un refus. ; que, par ailleurs, aux termes de l'article L. 613-3 du code de la construction et de l'habitation susvisé, dans sa rédaction issue de la loi N° 90-449 du 31 mai 1990 : Nonobstant toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée et malgré l'expiration des délais accordés en vertu des articles précédents, il doit être sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 15 mars de l'année suivante ... ;

Considérant que le refus du préfet de Seine et Marne d'accorder le concours de la force publique à M. Z... a engagé la responsabilité de l'Etat à l'égard de ce dernier sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques ; que, compte tenu, d'une part, du délai normal dont doit disposer l'autorité compétente pour prendre sa décision, d'autre part, de l'impossibilité de procéder à toute expulsion durant la période définie par l'article L. 613-3 précité du code de la construction et de l'habitation, lequel article est applicable à toute expulsion de local à usage d'habitation y compris ceux loués en complément d'un bail commercial, le point de départ de cette responsabilité doit être fixé au 16 mars 1999 ; qu'en ce qui concerne le terme de la période de responsabilité de l'Etat, il y a lieu de retenir la date à laquelle M. Z... a repris possession des locaux en cause, soit le 18 septembre 2000 ainsi que ce dernier l'indique, sans être contesté, dans le dernier état de ses écritures ;

Sur le préjudice :

Considérant que la réparation du préjudice subi par M. Z... du fait du retard apporté par l'Etat à lui accorder le concours de la force publique doit comporter le remboursement de l'indemnité d'occupation due à partir du 16 mars 1999 jusqu'à la date effective de libération des locaux, soit le 18 septembre 2000 ; qu'il ressort des pièces du dossier que le montant des indemnités d'occupation demeurées impayées afférentes à cette période s'élève à la somme de 71.184,52 F ; qu'ainsi, le ministre de l'intérieur est fondé à demander la réformation du jugement du tribunal en tant qu'il a accordé à M. Z... une indemnité supérieure à cette somme ; que la somme de 71.184,52 F, soit 10.852,01 euros, portera intérêts de droit à compter du 17 juin 1999, date de réception par l'administration de la demande d'indemnité de M. Z... ;

Sur la subrogation :

Considérant que le paiement de l'indemnité accordée par le présent arrêt est subordonné à la subrogation de l'Etat dans les droits du propriétaire à l'encontre de M. et Mme X..., occupants sans titre pendant la période de responsabilité de l'Etat ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, il n'y a pas lieu de condamner l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, à payer à M. Y... la somme qu'il demande au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 88.000 F que l'Etat a été condamné, par le jugement susvisé du tribunal administratif de Melun en date du 30 mars 2001, à payer à M. Z... est ramenée à 10.852,01 euros (71.184,52 F). Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 17 juin 1999.

Article 2 : L'article 2 du jugement susvisé du tribunal administratif de Melun en date du 30 mars 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre de l'intérieur ainsi que du recours incident de M. Z... est rejeté.

Article 4 : Le paiement de l'indemnité mentionnée à l'article 1er est subordonné à la subrogation de l'Etat dans les droits du propriétaire à l'encontre de M. et Mme X..., occupants sans titre.