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Décisions

Cass. 2e civ., 19 février 2009, n° 08-11.959

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gillet

Rapporteur :

M. Héderer

Avocat général :

M. Lautru

Avocats :

SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Gatineau et Fattaccini

Cour nationale de l'incapacité et de la …

5 décembre 2007

Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 14 décembre 1999 :

Attendu que la caisse primaire d'assurance maladie de Paris (la caisse) s'étant pourvue en cassation contre l'arrêt du 14 décembre 1999, son mémoire ne contient aucun moyen à l'encontre de cette décision ;

Qu'il y a lieu dès lors de constater la déchéance partielle du pourvoi ;

Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre les arrêts du 3 avril 2002 et du 17 décembre 2007 :

Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Sin et Stes (la société) a saisi un tribunal du contentieux de l'incapacité d'une contestation du taux d'incapacité permanente partielle attribué par la caisse à sa salariée Mme X..., à la suite de l'accident du travail dont celle-ci a été victime le 27 décembre 1990 ; que par arrêt du 14 décembre 1999, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a ordonné une expertise médicale, en précisant que l'expert devrait se faire communiquer par le médecin du travail et le service du contrôle médical de la caisse le dossier médical de la victime ; que cette dernière ne s'est pas présentée devant l'expert ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt du 5 décembre 2007 de déclarer inopposable à la société sa décision fixant à 20 % le taux d'incapacité permanente partielle attribué à Mme X..., alors, selon le moyen :

1°/ que le secret médical, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi ; qu'en l'absence de dérogation expressément prévue par la loi, un médecin du service du contrôle médical ne peut être contraint à fournir à un tiers des informations couvertes par le secret médical sans l'accord de la personne concernée, serait-ce par l'intermédiaire d'un médecin désigné par ce tiers ; qu'en déclarant inopposable à l'employeur la décision de la caisse fixant le taux d'incapacité permanente partielle d'une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle au prétexte que ce dernier n'avait pas eu communication des pièces médicales ayant permis cette fixation, la Cour nationale a violé les articles 226-13 et 226-14 du code pénal, ensemble les articles L. 1110-4, R. 4127-4 et R. 4127-104 du code de la santé publique et l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale ;

2°/ qu'une partie ne peut se voir reprocher le défaut de communication de pièces qui ne sont pas en sa possession et qu'elle est dans l'impossibilité d'obtenir ; qu'il résulte des articles R. 4127-104 du code de la santé publique, R. 434-31 et R. 434-32 du code de la sécurité sociale, que les pièces médicales sur la base desquelles les médecins du service du contrôle médical déterminent le taux d'incapacité permanente partielle, y compris le cas échéant le dossier de la médecine du travail, sont en la possession dudit service et non de la caisse ; qu'en outre, le service du contrôle médical est indépendant de la caisse ; que le refus de communication de pièces médicales opposé par le service du contrôle médical ne peut avoir pour conséquence de rendre inopposable à l'employeur la décision de la caisse fixant le taux d'incapacité permanente partielle d'une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle ; qu'en jugeant le contraire, la Cour nationale a violé les textes susvisés, ensemble les articles L. 224-7, R. 315-2, et R. 315-6 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que l'arrêt relève que dans le cadre de la procédure de contestation du taux d'incapacité permanente partielle initiée par la société, il a été sollicité différentes pièces médicales concernant ce dossier et retient que la caisse n'a pas fourni les pièces nécessaires permettant un réel débat contradictoire, de sorte que l'employeur n'a pu exercer de façon effective son droit de recours ;

Que de ces constatations et énonciations, la Cour nationale a exactement déduit que la décision de la caisse n'était pas opposable à la société ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 9 du code civil et R. 4127-4 du code de la santé publique ;


Attendu, selon le premier de ces textes, que chacun a droit au respect de sa vie privée ; qu'il résulte du second que le secret médical, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin ;

Attendu que pour enjoindre à la caisse de communiquer au médecin désigné par la société, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, le dossier médical et le dossier de la médecine du travail concernant la victime, l'arrêt du 3 avril 2002 relève que malgré plusieurs convocations, celle-ci ne s'est pas présentée devant l'expert et retient qu'eu égard à ces circonstances, il y a lieu de passer outre et de statuer au fond, qu'aux termes des articles 4, 9, 15, 132 et suivants du code de procédure civile et R. 143-5 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale, il incombe aux parties de se faire connaître mutuellement les moyens de fait et de droit et les éléments de preuve nécessaires au succès de leur prétention et qu'il y a lieu, avant tout examen au fond, de faire respecter le principe de la contradiction ;

Qu'en statuant ainsi, alors que des informations couvertes par le secret médical ne peuvent être communiquées à un tiers sans que soit constaté l'accord de la victime ou son absence d'opposition à la levée de ce secret, de sorte que la caisse ne pouvait être contrainte de communiquer à la société de telles informations, la Cour nationale a violé les textes susvisés ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 625 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation de l'arrêt ayant prononcé l'astreinte entraîne par voie de conséquence l'annulation de la décision se prononçant sur la liquidation de cette astreinte ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CONSTATE la déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 14 décembre 1999 ;

CASSE ET ANNULE, l'arrêt rendu le 3 avril 2002, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail et constate l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 5 décembre 2007 en ses dispositions condamnant la caisse primaire d'assurance maladie de Paris à verser à la société Sin et Stes une somme en liquidation d'astreinte ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

REJETTE pour le surplus le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 5 décembre 2007 ;

Dit n'y avoir lieu à injonction de communiquer sous astreinte ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé et de l'arrêt annulé.

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