Cass. com., 6 janvier 2015, n° 13-27.340
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Haas, SCP Yves et Blaise Capron
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 octobre 2013),que M. X... a vendu son fonds de commerce à M. Y... ; que prétendant que son consentement avait été vicié par la réticence dolosive du vendeur qui ne l'avait pas informé de l'exploitation du fonds par un locataire-gérant n'ayant pu assumer ses obligations locatives, de sa fermeture temporaire et du chiffre d'affaires réel du fonds dont une partie était réalisée grâce à une activité ambulante complémentaire et celui de l'exercice antérieur à la cession ne lui ayant pas été communiqué, M. Y... a assigné M. X... en nullité de la vente; que M. Y... a été mis en liquidation judiciaire ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité de la vente et de le condamner à payer à M. Y... des dommages-intérêts correspondant au prix d'achat du fonds de commerce alors, selon le moyen :
1°/ que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; qu'en se prononçant, pour statuer comme elle a fait, au visa des conclusions déposées par M. X... le 20 décembre 2012, quand celui-ci avait déposé ses dernières conclusions le 21 août 2013 par lesquelles il formulait de nouveaux moyens et quand il ne résulte ni de l'exposé succinct des prétentions et moyens de M. X... qu'elle a fait, ni de ses motifs qu'elle avait pris en considération ces dernières conclusions, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en prononçant la nullité pour dol de la vente conclue, le 21 avril 2009, entre M. X... et M. Y... et en condamnant, en conséquence, celui-ci à payer à celui-là des dommages-intérêts, sans répondre au moyen, péremptoire, soulevé par M. X... dans ses dernières conclusions d'appel du 21 août 2013, qui était tiré des mentions de l'acte de vente, selon lesquelles « l'acquéreur déclara i t bien ¿ connaître le fonds de commerce vendu pour l'avoir vu et visité préalablement à son offre d'acquisition et aux présentes », la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu' il n'y a dol par réticence de la part d'une partie que s'il est établi que le silence a été conservé intentionnellement par cette partie pour tromper son cocontractant et le déterminer à conclure le contrat ; qu'en retenant, dès lors, que M. X... avait commis un dol par réticence à l'égard de M. Y..., sans constater que M. Marc X... avait agi intentionnellement pour tromper M. Y... et le déterminer à conclure la vente litigieuse, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1116 du code civil ;
4°/ qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où les motifs des premiers juges seraient regardés comme ayant été adoptés par la cour d'appel, l'inexactitude d'une des mentions énumérées par les dispositions de l'article L. 141-1 du code de commerce ne peut donner lieu qu'à l'action en garantie prévue à l'article L. 141-3 du code de commerce, sans pouvoir entraîner, à la différence de leur omission, la nullité de l'acte de vente du fonds de commerce ; qu'en se fondant, dès lors, sur la circonstance que l'acte de vente litigieux ne mentionnait pas qu'une partie du chiffre d'affaires était réalisée grâce à une activité ambulante et, donc, sur l'existence d'une inexactitude entachant l'une des mentions énumérées par les dispositions de l'article L. 141-1 du code de commerce, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 141-1 du code de commerce ;
5°/ qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où les motifs des premiers juges seraient regardés comme ayant été adoptés par la cour d'appel, il appartient à l'acquéreur d'un fonds de commerce qui invoque la nullité de la vente du fonds de commerce d'apporter la preuve de la cause de nullité de cette vente ; qu'en énonçant, que M. Y... ne démontrait pas, par la production de redevances versées au service des emplacements de la commune de Six-Fours-les-plages pour l'occupation d'un banc sur le marché de cette même commune, que le locataire-gérant du fonds de commerce qu'il avait acquis exerçait simultanément son activité sur deux sites distincts, que, toutefois, M. X... ne rapportait pas la preuve contraire et que l'absence de mention dans l'acte de vente litigieux qu'une partie du chiffre d'affaires était réalisée grâce à une activité ambulante, ajoutée à l'omission dans l'acte de vente des résultats d'exploitation du fonds de commerce réalisés en 2008, avait vicié le consentement de M. Y..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé les dispositions de l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt ayant exposé succinctement les prétentions de M. X... et répondu au moyen prétendument délaissé concernant la connaissance par M. Y... de la situation du fonds, invoqué dans ses dernières conclusions déposées le 21 août 2013, le visa des conclusions portant une date différente de celles déposées en dernier lieu, procédant d'une erreur matérielle qui peut être réparée selon la procédure de l'article 462 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ;
Et attendu, en second lieu, qu'après avoir constaté qu'il n'était pas établi que le vendeur ait informé l'acquéreur qu'il n'avait pas exploité personnellement le fonds et relevé que l'acte de vente comportait des chiffres d'affaires présentés comme étant ceux du cédant quand il s'agissait en réalité de ceux du locataire-gérant et qu'il ne mentionnait pas l'absence d'exploitation du fonds pendant plus de quatre mois ni que le cessionnaire avait été avisé de cette situation, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que la dissimulation de la fermeture temporaire du fonds, de la perte de clientèle subséquente et des raisons de cette fermeture liées à la défaillance du locataire-gérant était constitutive d'une réticence dolosive de la part du vendeur, ce dont il résultait que M. X... avait agi intentionnellement pour tromper M. Y... et le déterminer à conclure la vente litigieuse, a, par ces seuls motifs, justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui est irrecevable en sa première branche et ne peut être accueilli en ses deux dernières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société BR associés, en qualité de liquidateur judiciaire de M. Y..., et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille quinze.