Le Droit de la consommation, troisième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : publicité, pratiques commerciales déloyales, conditions de validité du contrat, clauses abusives, conformité des produits, vices cachés, sécurité des produits.

Droit de la consommation

La loi du 22 décembre 1972, relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile, visait initialement les démarchages pratiqués “au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou son lieu de travail”. Désormais, plutôt que le domicile, la résidence ou le lieu de travail, l'article L. 221-1 du Code de la consommation vise, plus largement, tout “lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle” . 

La réglementation a pour objectif premier d'assurer la protection du consommateur contre les intrusions commerciales dans sa sphère privée. Un contrat souscrit par un consommateur à son domicile relève donc nécessairement des règles du Code de la consommation , sous réserve qu'il démontre que le contrat y a bien été conclu . La preuve peut être apportée par des indications manuscrites portées sur le contrat lorsqu'elles témoignent de l'existence d'une négociation au domicile du client . Ainsi, le contrat est nécessairement conclu au domicile du consommateur lorsqu'il a été établi dans son département  ou sa commune  de résidence, alors que le professionnel n'y dispose pas d'implantation. En revanche, un contrat n'est pas conclu lors d'un démarchage à domicile lorsque sa version signée n'a été adressée au vendeur que par courrier électronique .

Toutefois, le déplacement du professionnel au domicile du consommateur au cours du processus contractuel n'entraîne pas nécessairement l'application des règles relatives au démarchage. Un dépannage, par exemple, n'est pas constitutif de démarchage, puisque l'accord a eu lieu au moment où le professionnel accepte de répondre à la sollicitation de son client, et non pas au domicile . De même, la venue du professionnel pour formaliser un accord intervenu auparavant au cours d'une foire, alors que les marchandises avaient déjà été retirées, ne constitue pas une opération de démarchage : il n'y a pas sollicitation ou concrétisation de l'accord au domicile . La jurisprudence considère également que la présence d'un professionnel pour l'étude des lieux et la prise des mesures nécessaires à l'établissement d'un devis ne constitue pas un démarchage si à l'occasion de ce déplacement, aucun engagement n'est souscrit par le consommateur . 

Par ailleurs, l'ordonnance 2021-1734, transposant la directive Omnibus, a créé le nouvel article L. 221-10-1 qui prohibe toute visite non sollicitée d'un professionnel au domicile d'un consommateur pour lui vendre des produits ou lui fournir des services, lorsque que ce dernier a manifesté sa volonté claire et non ambiguë de ne pas faire l'objet d'une telle visite. Cette infraction est sanctionnée pénalement au nouvel article L. 242-7-1 d'une peine d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 150 000 euro.

Comme lorsqu'il est à son domicile, le consommateur ne cherche pas à contracter lorsqu'il se rend sur son lieu de travail. Il peut donc être déstabilisé plus facilement et s'engager sans avoir correctement examiné l'offre qui lui est faite. Pour compenser cette position de faiblesse présumée, les anciens textes incluaient le lieu de travail du consommateur dans le champ de la protection contre le démarchage à domicile. La protection demeure sous l'empire du nouveau régime instauré par la loi Hamon puisque le lieu de travail du consommateur constitue nécessairement un “lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle” (actuel art. L. 221-1).

Sont ainsi concernées la prospection d'une clientèle constituée exclusivement de particuliers présents sur leur lieu de travail (collectivités, entreprises, administrations)  ou d'une fleuriste dans sa boutique , la signature d'un bon de commande obtenue par le patient d'un hôpital d'un membre du personnel hospitalier , ou la pratique consistant à déposer des mallettes de démonstration dans les entreprises, pour revenir quelques jours plus tard livrer les commandes et recevoir le paiement . Plus largement, dès lors que le principe et les conditions essentielles de l'achat ont été arrêtés sur le lieu de travail du consommateur, l'opération relève de la réglementation relative au démarchage . 

3) Autres lieux non destinés à la commercialisation

L'ancien texte visait non seulement le domicile ou le lieu de travail du consommateur, mais aussi “les lieux non destinés à la commercialisation du bien ou du service proposé, et notamment l'organisation par un commerçant ou à son profit de réunions ou d'excursions afin de réaliser les opérations”. La référence aux lieux non destinés à la commercialisation est issue de la loi 89-421 du 23 juin 1989, qui tendait notamment à intégrer dans le champ d'application du démarchage les réunions dites “tupperware”, qui peuvent se tenir au domicile d'autres consommateurs que celui qui prend la commande. La loi Hamon modifie la terminologie et par conséquent la portée de la règle, en limitant son application aux engagements pris “dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties” ou recueillis “pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur” (actuel art. L. 221-1, 2°, c).

La jurisprudence excluait du champ de la réglementation les foires et salons , les foires-expositions , les stands installés dans une galerie commerciale  : il s'agissait en effet de lieux habituellement destinés au commerce, et les ventes qui y étaient conclues ne relevaient pas de la réglementation sur le démarchage même si l'accord avait été formalisé au domicile des clients . Ces solutions sont partiellement remises en cause par la loi Hamon : la notion de lieu destiné à la commercialisation du bien ou du service diffère sensiblement de celle de lieu où le professionnel exerce en permanence ou habituellement son activité. La première met l'accent sur un lieu normal et usuel de commercialisation des produits, la seconde, sur le lieu de l'activité du professionnel lui-même. Néanmoins, la loi Hamon a expressément exclu les foires et salons du dispositif. Les articles L. 224-59 et L. 224-60 du Code de la consommation disposent que : “avant la conclusion de tout contrat entre un consommateur et un professionnel à l'occasion d'une foire, d'un salon ou de toute manifestation commerciale relevant du chapitre II du titre VI du livre VII du Code de commerce, le professionnel informe le consommateur qu'il ne dispose pas d'un délai de rétractation” et que “les offres de contrat faites dans les foires et les salons mentionnent l'absence de délai de rétractation, en des termes clairs et lisibles, dans un encadré apparent” . Certains juges estiment cependant que le droit de rétractation s'applique même en cas de vente à l'occasion d'une foire lorsque le professionnel entretient une certaine confusion en remettant au consommateur un formulaire de rétractation accompagné de conditions générales de vente qui précisent en caractères minuscules que celui-ci ne peut être utilisé qu'en cas de démarchage . La Cour de cassation applique plus strictement les textes : selon elle, le contrat qui ne fait que modifier certains éléments de la commande passée auparavant lors d'une foire est en lien direct avec celle-ci et ne s'accompagne donc pas d'un droit de rétractation . Les textes réservent cependant un droit de rétractation au consommateur lorsque le contrat conclu dans une foire s'accompagne d'une offre de crédit . 

En revanche, dès lors que le professionnel invite les consommateurs à se rendre dans un lieu non destiné à la commercialisation, les articles L. 221-1 et suivants du Code de la consommation s'appliquent . Il peut ainsi s'agir du domicile d'un tiers , d'une salle des fêtes communales , d'une place publique , d'un local radio , d'un café , d'un hôtel ou d'un centre d'affaires ... Toutefois, s'il est précisé sur le contrat ou le bon de commande que la vente a eu lieu au magasin, il échoit à celui qui prétend avoir été démarché dans un autre lieu d'en apporter la preuve .

Modification introduite par la loi Hamon du 17 mars 2014.

 V. pour une vente d'oeuvres d'art à domicile : Paris, 11 juin 1996, LawLex200300002572JBJ. - V. aussi Douai, 15 novembre 2018, LawLex201800001784JBJ.

 Paris, 13 février 1996, LawLex200300002591JBJ, Contrats Conc. consom. 1996, n° 91.

 Reims, 19 novembre 2007, LawLex201200001437JBJ.

 Agen, 20 juin 2011, LawLex201200001406JBJ.

 Besançon, 27 octobre 1994, LawLex200300002967JBJ, approuvé par Cass. crim., 4 octobre 1995, LawLex200300002809JBJ, Contrats Conc. consom. 1996, n° 53.

 Cass. crim., 24 mars 2009, LawLex201200001413JBJ, Contrats Conc. consom. 2009, n° 211, obs. RAYMOND : Paris, 10 octobre 2024, LawLex202400007734JBJ : constitue un contrat conclu hors établissement le contrat de location conclu par un GAEC le même jour que celui de la livraison et de l'installation du matériel, en présence du fournisseur du bien vendu, qui était porteur du contrat de location et le lui a fait signer, dès lors que, ce faisant, le fournisseur a agi comme mandataire apparent du bailleur et qu'il doit être considéré que les parties étaient physiquement présentes de manière simultanée.

Cass. civ. 1re, 10 juillet 1995, LawLex200300002811JBJ ; Riom, 5 février 2009, LawLex201200001455JBJ ; Chambéry, 12 juin 2013, LawLex201400002042JBJ ; Lyon, 12 juin 2014, LawLex201400002202JBJ.

 Chambéry, 16 février 1999, LawLex200300002617JBJ.

 Paris, 5 mai 1998, LawLex200300002794JBJ, D. 1998, 1042.

 Cass. crim., 27 juin 2006, LawLex200700000120JBJ, D. 2007, 484, obs. BAZIN ; Contrats Conc. consom. 2006, n° 211, obs. RAYMOND ; RJDA 2006, n° 1177 : la Cour de cassation exige toutefois que l'accord intervenu lors du salon professionnel porte et sur le principe et sur les conditions essentielles du contrat.

Lyon, 4 juillet 2024, LawLex202400005160JBJ.

 Colmar, 26 avril 2010, LawLex201200001411JBJ.

Aix-en-Provence, 10 mai 2016, LawLex201600000941JBJ.

Cass. 1re civ., 12 septembre 2018, LawLex201800001298JBJ.

C. consom., art. L. 224-62 (ancien art. L. 121-98).

Orléans, 12 novembre 2024, LawLex202400008902JBJ : la pratique qui consiste à solliciter un consommateur personnellement à son domicile, donc hors établissement, quelques heures après la signature d’un premier bon de commande lors d’une foire, pour l’inciter à repasser au stand commercial de la même foire afin de conclure un second contrat pour des travaux supplémentaires d'un prix quatre fois plus élevé que celui prévu au premier contrat, - le professionnel sachant pertinemment que si le second contrat était signé à domicile, le consommateur bénéficierait d'un droit de rétractation -, vise au contournement des règles prévues par la directive 2011/83 et constitue une formation déloyale du contrat, de sorte que le second bon de commande, immédiatement conclu après la visite du professionnel au domicile du consommateur doit être considéré comme un contrat conclu hors établissement lui permettant de se rétracter, même s'il comportait la mention selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas d'un droit de rétractation sur le stand en application de l'article L.224-59 du Code de la consommation.

 Cass. civ. 1re, 9 juillet 2003, LawLex200300003222JBJ, RLDA 2003, n° 4003.

 Riom, 16 novembre 1994, LawLex200300002940JBJ, apporuvé par Cass. crim., 18 septembre 1995, LawLex200300002808JBJ.

Cass. crim., 4 octobre 2005, LawLex200500010139JBJ, Rev. Lamy dr. civ. 2006, n° 978, obs. JULIEN ; Contrats Conc. Consom. 2006, n° 12, obs. RAYMOND ; Dr. pén. 2005, n° 180, obs. ROBERT.

 Agen, 12 février 2009, LawLex201200001454JBJ.

Paris, 20 février 2014, LawLex201400001968JBJ.

V. pour un hôtel : Paris, 22 mars 2000, LawLex200300002800JBJ ; pour un centre d'affaires : Rennes, 25 septembre 1997, LawLex200300002190JBJ.

 V. pour une application favorable au consommateur, alors qu'un rendez-vous antérieur avait été pris et la commande passée ultérieurement : Angers, 13 décembre 2011, LawLex201200001396JBJ.

 Paris, 20 septembre 2012, LawLex201200002292JBJ.

Poitiers, 12 mai 2017, LawLex201700000906JBJ.

Colmar, 30 octobre 2017, LawLex201700001780JBJ ; Grenoble, 15 mai 2018, LawLex201800000738JBJ ; Riom, 16 octobre 2019, LawLex201900001242JBJ ; Lyon, 16 janvier 2020, LawLex202000000084JBJ.

Douai, 12 avril 2018, LawLex201800000614JBJ.

 V. pour une distinction lorsque le dépannage donne lieu à des prestations complémentaires : Cass. civ. 1re, 3 mars 1993, LawLex200300002825JBJ.

 Colmar, 26 mars 2012, LawLex201200001380JBJ. - Comp. Dijon, 10 décembre 2015, LawLex201500001831JBJ, qualifiant de contrat conclu hors établissement, même si un premier contact a eu lieu sur le stand d'une foire, celui dont la date établit qu'il a été signé au domicile du consommateur, deux jours après la tenue de la foire.

 Cass. crim., 27 juin 2006, LawLex200700000120JBJ, D. 2007, 484, obs. BAZIN ; Contrats Conc. consom. 2006, n° 211, obs. RAYMOND ; RJDA 2006, n° 1177 ; 18 mai 2010, LawLex201200001417JBJ ; Cass. civ. 1re, 12 juillet 2012, LawLex201200002282. - Comp., lorsque l'artisan fait signer une commande au consommateur démarché à son domicile, Rennes, 4 mai 2012, LawLex201200001378JBJ.

456. Lieu du démarchage