Contrats d'affaires

Aux termes de l'article 1792 du Code civil, le constructeur est responsable de plein droit des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Ces dispositions concernent la construction d'un ouvrage, notion plus large que l'édification d'un bâtiment ou d'un édifice . Leur application nécessite, en effet, de démontrer l’existence d’un contrat de louage d’ouvrage et d’un ouvrage, pour que les garanties légales, notamment décennales, puissent être envisagées .

La notion d'ouvrage n'est pas définie par le Code civil. Elle ne s'apparente pas exclusivement à un ouvrage immobilier et comprend tant les travaux que le résultat . En effet, la jurisprudence qualifie unanimement d'ouvrage tant la construction d'un immeuble que les travaux de construction . 

L'ouvrage s'entend, en principe, de toute espèce de construction et tout élément concourant à la constitution d'un édifice, par opposition aux éléments d'équipement . Cette distinction est essentielle puisque le constructeur est responsable de plein droit durant dix ans si les travaux relèvent de la notion d'ouvrage et durant deux ans s'il s'agit d'éléments d'équipement. Toutefois, l'article 1792-2 du Code civil assimile les éléments d'équipement d'un ouvrage à ce dernier lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert. Sont indissociables les éléments dont la dépose, le démontage ou le remplacement ne peuvent s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage . Ainsi, des panneaux photovoltaïques, intégrés à la toiture, représentent un ouvrage en ce qu'ils participent au clos et au couvert de l'habitation . La Cour de cassation considère cependant que dès lors qu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination, les désordres qui affectent des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale .

La qualification d'ouvrage s'applique de manière évidente aux travaux de bâtiment ou de génie civil . En dehors de cette hypothèse, la jurisprudence retient un ensemble de critères qui facilitent le rattachement des travaux en cause à la notion d'ouvrage. L'ancrage au sol et la fonction sur la stabilité de l'ensemble constituent notamment des critères déterminants de la notion . 

Il en est ainsi des travaux exécutés par l'incorporation et la fixation dans le sol, à l'aide de matériaux de construction, de remblais et de traverses destinées à assurer la stabilité et la pérennité d’un talus , de la construction, sur plusieurs kilomètres, d'une conduite métallique fermée d'adduction d'eau à une centrale électrique , d'un caveau funéraire , des rampes d’accès des voitures à un garage situé au sous-sol , d'une serre, bâtiment clos et couvert, assis sur des fondations constituées d'un muret en béton armé, monté sur des poteaux du même matériau et dont le mode d'implantation est une immobilisation par incorporation au sol de toute la structure porteuse  ou d'une véranda . L'intervention sur la structure, telle que l'exécution de travaux confortatifs , des panneaux de clôtures qui font corps avec les ouvrages  ou la construction de la toiture et de la charpente d’une maison , relèvent aussi de la notion d'ouvrage . Les voies et réseaux divers constituent des ouvrages, même s'ils ne sont pas rattachés à un bâtiment . Caractérisent dès lors des ouvrages la fourniture et la pose d'une installation de chauffage incluant toute l'installation de climatisation d'un hôtel avec pose des compresseurs, climatiseurs, gaines et canalisation d'air dans et à travers les murs du bâtiment , l'installation d’une climatisation qui comprend une centrale d'énergie aux fins d'assurer la production de l'énergie calorifique et frigorifique nécessaire à la climatisation des bâtiments , la construction d’une installation frigorifique constituée de canalisations assurant le transport de froid dans l’ensemble des locaux  ou l'installation d'un chauffage .

Une piscine , un insert de cheminée , ou une cheminée , la terrasse qui fait corps avec la maison , un aquarium-vivarium , un enduit de façade, lorsqu'il a une fonction d'étanchéité et est destiné à fonctionner , un complexe d'isolation et d'étanchéité  , la création d'une fosse, la constitution d'une assise de piscine en sous-oeuvre, le dallage de béton en pourtour , ou la fourniture, le transport et la mise en place d'un silo,  intégré au bâtiment par soudure , ont également été qualifiés d'ouvrage relevant de l'article 1792 du Code civil. 

Ne constituent pas un ouvrage des éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant , ou qui ne sont pas destinés à fonctionner, comme du carrelage et des cloisons  ou un enduit de façade , un local électrique, construit avec la première partie d’une usine qui s’est retrouvé entouré de bâtiments , un abri de piscine, qui est un élément repliable et mobile , un barbecue accolé à la maison , des travaux de terrassement et d'aménagement du terrain qui n'incorporent pas de matériaux dans le sol au moyen de travaux de construction , une maison mobile, livrée par camion , la chape posée sur un plancher en béton , la réalisation et le montage de moteurs et de transformateurs démontables qui ne font pas corps avec le bâtiment , l'installation d'une centrale autonome de climatisation , des travaux de remblai et enrochement pour réaliser des talus à l'entrée d'un bâtiment , l'intervention sur un chéneau d'origine consistant seulement en l'application d'un produit d'étanchéité , les peintures qui ont un rôle purement esthétique  , un ravalement  ou des équipements de cuisine et de salles de vains destinés à l'aménagement d'un bâtiment existant .

Au-delà de la nature même des travaux, leur ampleur  ou leur prix peuvent être déterminants de la qualification d'ouvrage. Ainsi, l'aménagement complet d'un plateau après obtention d'un permis de construire pour transformer un atelier en maison d'habitation caractérisent la notion d'ouvrage, dès lors que ces travaux, par leur ampleur, caractérisent la construction d'un ouvrage, même s'ils sont partie d'un bâtiment existant . De même, des travaux qui comportent la restauration des pierres de façade et ont pour objet de maintenir l'étanchéité nécessaire à la destination de l'immeuble, constituent une opération de restauration lourde d'une ampleur particulière compte tenu de la valeur architecturale de l'immeuble . Tel est également le cas du démontage et de la remise en état de certaines parties de garde-corps, dont la la réfection ne se limite pas à un simple rafraîchissement mais consiste en une rénovation lourde , ou des travaux de pose de l'enrobé sur une dalle de béton existante et de revêtement de peinture sur l'enrobé, par leur importance et leur apport de matériaux, qui affectent un élément constitutif essentiel d'un court de tennis . Des travaux d'une importance modeste, sans incorporation de matériaux nouveaux à l'ouvrage, correspondent, en revanche, à une réparation limitée dans l'attente de l'inéluctable réfection complète d'une toiture à la vétusté manifeste .

Rennes, 12 mai 2022, LawLex202300007527JBJ.

Chambéry, 6 février 2024, LawLex202400001365JBJ.

Rennes, 12 mai 2022, LawLex202300007527JBJ, qui précise que ces travaux caractérisent en eux-mêmes la réalisation d'un ouvrage immobilier au sens de l'article 1792 du Code civil, indépendant des autres ouvrages que constituent une maison d'habitation et une piscine.

Cass. 3e civ., 19 janvier 2017, LawLex202200003882JBJ.

Cass. 3e civ., 17 décembre 2003, LawLex202200007450JBJ.

Cass. 3e civ., 19 juillet 2000, LawLex202200007781JBJ.

Cass. 1re civ., 2 mars 1999, LawLex200900003445JBJ.

Cass. 3e civ., 4 octobre 1989, LawLex202200007419JBJ, pour une véranda qui constitue un travail de menuiserie métallique et de vitrerie composé de trois parties verticales vitrées en glace, avec des parties fixes et des parties mobiles, couverts par des plaques en plastique, adossé à la façade de l'immeuble, formant un ensemble composé d'une structure, d'un clos et d'un couvert.

Cass. 3e civ., 6 décembre 2006, LawLex202400004929JBJ.

Cass. 3e civ., 17 février 1999, LawLex202200007412JBJ.

Cass. 3e civ., 16 octobre 2002, LawLex202200004068JBJ ;  9 novembre 1994, LawLex202200007466JBJ.

Cass. 3e civ., 19 décembre 2006, LawLex202400004957JBJ, qui retient que des travaux de surélévation d'un immeuble ne relèvent pas des missions d'aménagement et d'équipement des espaces intérieurs relatives à des ouvrages pouvant comporter des travaux de structure.

Rennes, 12 mai 2022, LawLex202300007527JBJ, qui retient que les dispositions des articles 1792 du Code civil qui prévoient une responsabilité de plein droit des constructeurs concernent la construction d'un ouvrage, notion plus large que l'édification d'un bâtiment ou d'un édifice.

Cass. 3e civ., 19 juillet 2000, LawLex202300013663JBJ ; 29 mars 2000, LawLex202400004926JBJ ; 17 décembre 1997, LawLex202200007945JBJ.

Cass. 3e civ., 12 novembre 2020, LawLex202200007341JBJ.

Cass. 3e civ., 28 janvier 2009,LawLex202200007459JBJ.

Cass. 3e civ., 18 juillet 2001, LawLex202200007406JBJ.

Cass. 3e civ., 18 novembre 1992, LawLex202200007409JBJ, pour l'installation d'un chauffage central comportant une chaudière équipée d'un brûleur et d'une pompe à chaleur dont l'évaporateur est associé à une cuve de 20 m3, enterrée. - V. cep., Cass. 3e civ., 4 mai 2016, LawLex202400004961JBJ, qui estime que le fait qu'une pompe à chaleur soit installée sur un socle en béton et ait nécessité des raccordements hydrauliques ne suffit pas à caractériser l'existence d'un ouvrage.

Pau, 25 juin 2024, LawLex202400004952JBJ.

Cass. 3e civ., 7 mars 2019, LawLex202200007986JBJ. - Contra : Cass. 3e civ., 6 février 2002, LawLex202300013662JBJ, qui rejette la qualification d'ouvrage pour la mise en place, à l'intérieur d'un âtre préexistant d'un générateur de chaleur en fonte équipé d'un conduit de fumée flexible en acier inoxydable permettant un raccordement au conduit ancien de cheminée, sans construction d'une cheminée avec un simple aménagement d'une installation préexistante sans reprise de maçonnerie.

Cass. 3e civ., 25 février 1998, LawLex202200007410JBJ.

Cass. 3e civ., 7 novembre 2012, LawLex202200007413JBJ.

Cass. 3e civ., 9 juin 2004, LawLex202200005528JBJ, qui qualifie d'ouvrage un aquarium-vivarium, construit dans un sous-sol, qui comprend cent vingt bassins viviers ou aquaterrarium, réalisés en verres collés sur plan sur des structures métalliques, dès lors qu'ils sont intransportables en raison de leur encombrement, de leur poids et de leur fragilité structurelle ; 9 février 2000, LawLex202400004928JBJ, pour des aquariums, intransportables en raison de leur poids et de leur fragilité structurelle.

V. not. Cass. 3e civ., 12 novembre 2020, LawLex202200007341JBJ ; 4 octobre 2011, LawLex202300007518JBJ ; 24 mai 2011, LawLex202200007772JBJ ; 3 mars 2010, LawLex202200007420JBJ. - Adde : Cass. 3e civ., 10 décembre 2003, LawLex202200008079JBJ, qui exclut une installation du champ d'application de l'article 1792 du Code civil dès lors qu'elle ne relève pas des travaux de bâtiment ou de génie civil.

Cass. 3e civ., 13 février 2020, LawLex202200007686JBJ : en l'occurrence la Cour exclut la qualification d'ouvrage ou d'élément d'équipement puisque l'enduit n'est pas destiné à fonctionner ; 3 mai 1990, LawLex202200007414JBJ, pour l'application sur un bâtiment d'un enduit extérieur destiné à constituer une couche protectrice étanche à l’eau.

Cass. 3e civ., 18 juin 2008, LawLex202400004943JBJ.

Cass. 3e civ., 23 juin 1999, LawLex202400004925JBJ.

Cass. 3e civ., 8 juin 1994, LawLex202400004933JBJ ; Cass. 1re civ., 20 décembre 1993, LawLex200900003444JBJ.

Cass. 3e civ., 21 mars 2024, LawLex202400004950JBJ.

Cass. 3e civ., 13 juillet 2022, LawLex202200008018JBJ.

Cass. 3e civ., 13 février 2020, LawLex202200007686JBJ.

Cass. 3e civ., 30 mars 2011,LawLex202400004922JBJ.

Cass. 3e civ., 7 octobre 2008, LawLex202300013664JBJ.

Aix-en-Provence, 18 juin 2024, LawLex202400004649JBJ.

Cass. 3e civ., 10 novembre 2021, LawLex202200010841JBJ.

Cass. 3e civ., 28 avril 1993, LawLex202200007525JBJ.

Cass. 3e civ., 26 novembre 2015, LawLex202400004960JBJ.

Cass. 3e civ., 12 janvier 2005, LawLex202200007487JBJ.

Cass. 3e civ., 10 décembre 2003, LawLex202200008079JBJ, qui considère que l'installation d'une centrale autonome de climatisation composée d'un climatiseur livré dans une boîte en carton se présentant sous la forme d'une armoire verticale raccordée à des conduits et des réseaux d'air en tôle galvanisée placés entre deux sous-plafonds suspendus, qui ne relève pas des travaux de bâtiment ou de génie civil, ne constitue pas la construction d'un ouvrage.

Cass. 3e civ., 12 juin 2002, LawLex202300007517JBJ.

Aix-en-Provence, 6 juin 2024, LawLex202400004956JBJ.

Cass. 3e civ., 16 mai 2001, LawLex202200007515JBJ ; 27 avril 2000, LawLex202200007421JBJ; Toulouse, 11 décembre 2024, LawLex202400009762JBJ.

Cass. 3e civ., 7 juillet 1993, LawLex202400004934JBJ.

Grenoble, 13 juin 2023, LawLex202400006324JBJ.

Cass. 3e civ., 19 décembre 2006, LawLex202200008081JBJ, qui retient qu'une cour d'appel ne peut écarter le caractère indissociable sans rechercher si les éléments d'équipement dissociables sont adjoints à un ouvrage existant.

Cass. 3e civ., 4 octobre 2011, LawLex202300007518JBJ, qui estime que la cour d'appel ne peut condamner les vendeurs d’un immeuble, qui ont fait réaliser des travaux de rénovation de la toiture, à indemniser l’acquéreur des infiltrations d’eaux pluviales survenues, sans rechercher si les travaux en question sont assimilables, par leur importance, à des travaux de construction d’un ouvrage. - V. égal. Cass. 3e civ., 3 mars 2010, LawLex202200007420JBJ, qui retient que l'importance des travaux de rénovation réalisés par les vendeurs d'une villa les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage.

Reims, 12 janvier 2021, LawLex202200010974JBJ.

Cass. 3e civ., 4 avril 2013, LawLex202200007314JBJ.

Cass. 3e civ., 24 mai 2011, LawLex202200007772JBJ. - V. égal. Cass. 3e civ., 29 janvier 2003, LawLex202200007480JBJ, qui retient que les travaux qui portent sur les murs, les cloisons, les planchers, les plafonds et l'isolation de l'immeuble d'un montant supérieur à 45 000 euro, caractérisent une rénovation lourde assimilable à des travaux de construction.

Cass. 3e civ., 12 décembre 2001, LawLex202400004932JBJ.

Cass. 3e civ., 28 février 2018, LawLex202200007422JBJ.

Rouen, 13 juin 2024, LawLex202400004954JBJ. - V. égal., Lyon, 25 juin 2024, LawLex202400004947JBJ, qui retient qu'eu égard à sa conception, à son emprise sur l'ensemble du bâtiment existant et à sa mise en œuvre empruntant aux techniques du bâtiment, une installation en aluminium de 32 mètres de long et 6 mètres de large répond à la définition d'un ouvrage, la circonstance que les panneaux photovoltaïques soient en surimposition de toiture étant sans incidence ; Riom, 15 octobre 2024, LawLex202400008372JBJ :  dès lors que, pour chaque hangar, les bacs acier, les rails et les panneaux photovoltaïques procèdent d'une conception globale spécifique et sont les éléments constitutifs d'un ensemble constituant lui-même la couverture du bâtiment, l'entreprise chargée de la totalité des travaux de couverture des bâtiments, intégrant des matériaux assemblés spécifiquement dans la perspective d'une part de permettre la production d'électricité, d'autre part d'assurer une fonction de clos, de couvert et d'étanchéité du bâtiment, a procédé à une opération qui, appréciée dans sa globalité, s'analyse comme l'exécution d'un ouvrage, les panneaux photovoltaïques participant de la réalisation de cet ouvrage de couverture.

Cass. 3e civ., 14 septembre 2017, LawLex202200007984JBJ ; 15 juin 2017, LawLex202200007783JBJ.

Cass. 3e civ., 4 novembre 1999,LawLex202200007416JBJ ; 12 juin 1991, LawLex202200010842JBJ ; Cass. 1re civ., 26 février 1991, LawLex202200007407JBJ, pour un mur de soutènement.

Cass. 3e civ., 4 avril 2019, LawLex202200007528JBJ, pour une installation concernant des travaux de charpente métallique, couverture, bardage, création de poutres et poteaux métalliques ; Cass. 3e civ., 25 septembre 2025, LawLex202500008138JBJ : lorsque des travaux de rénovation consistent à déposer les anciennes briques réfractaires, à en fabriquer de nouvelles puis à les poser par travaux de maçonnerie (plusieurs couches de mortier et de béton), en assurant leur ancrage aux cheminées industrielles, ces travaux constituent un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil et non des éléments d’équipement visés à l’article 1792-7.

351. Notion d'ouvrage