Contrats d'affaires

L'article 1792-4-2 du Code civil prévoit que “les actions en responsabilité dirigées contre un sous-traitant en raison de dommages affectant un ouvrage ou des éléments d'équipement d'un ouvrage mentionnés aux articles 1792 et 1792-2 se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux et, pour les dommages affectant ceux des éléments d'équipement de l'ouvrage mentionnés à l'article 179 …

Règles relatives à la prescription

L'article 1792-4-2 du Code civil prévoit que “les actions en responsabilité dirigées contre un sous-traitant en raison de dommages affectant un ouvrage ou des éléments d'équipement d'un ouvrage mentionnés aux articles 1792 et 1792-2 se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux et, pour les dommages affectant ceux des éléments d'équipement de l'ouvrage mentionnés à l'article 1792-3, par deux ans à compter de cette même réception”. De même, l'article 1792-4-3 dispose : “en dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux”. 

Ces textes spéciaux écartent la prescription quinquennale de droit commun prévue à l'article 2224 du Code civil ou à l'article L. 110-4 du Code de commerce et s'appliquent, quel que soit le fondement contractuel ou délictuel de l'action . La Cour de cassation considère toutefois que l'article 1792-4-3 du Code civil ne saurait être mis en oeuvre lorsqu'aucune réception de l'ouvrage n'est intervenue. Aussi, l’action en responsabilité contractuelle du maître de l’ouvrage contre le constructeur quant aux désordres de construction révélés en l’absence de réception de l’ouvrage se prescrit-elle par cinq ans, en application de l'article 2224 du code civil ou de l'article L. 110-4 du code de commerce . 

Par ailleurs, l'article 1792-4-2 et 1792-4-3 du Code civil ne distinguent pas selon la qualité du demandeur à l'action en responsabilité. La question s'est donc posée de savoir si l'action en réparation d'un tiers était soumise à ces dispositions. Selon la Cour de cassation, l’action en responsabilité contre le sous-traitant prévue à l’article 1792-4-2, qui se prescrit par dix ans à compter de la réception des travaux, pour les dommages affectant un ouvrage ou l'un de ces éléments d'équipement mentionnés aux articles 1792 et 1792-2, et par deux ans à compter de cette même réception, pour les dommages affectant les éléments d’équipement de l’ouvrage mentionnés à l’article 1792-3, est réservée au maître de l’ouvrage, de sorte que les tiers à l’opération à construire ne peuvent se prévaloir de ce recours . L’action en responsabilité du tiers contre le sous-traitant est par conséquent soumise à la prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil, à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer .

De même, s'est posée la question de savoir si ces textes régissaient les actions récursoires exercées entre constructeurs. Si les juges ont pu retenir parfois que l'action récursoire d'un constructeur, fondée sur la responsabilité délictuelle  ou contractuelle  se prescrivaient par dix ans à compter de la réception de l'ouvrage avec ou sans réserves, la Haute juridiction a finalement considéré que le délai de prescription de l’action récursoire d’un constructeur à l’encontre d’un autre constructeur ou de son sous-traitant ne relève pas des dispositions de l'article 1792-4-3 du Code civil, qui n'a vocation à s'appliquer qu'aux actions en responsabilité dirigées par le maître de l'ouvrage . En effet, fixer la date de réception de l'ouvrage comme point de départ du délai de prescription de l'action d'un constructeur contre un autre constructeur pourrait avoir pour effet de priver le premier, lorsqu'il est assigné par le maître de l'ouvrage en fin de délai d'épreuve, du droit d'accès à un juge . Désormais, selon une jurisprudence établie, de telles actions récursoires, qu'elles soient de nature contractuelle ou délictuelle, sont régies par l'article 2224 du Code civil selon lequel les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, et non par l'article 1792-4-3 qui impose aux maître de l'ouvrage ou à l'acquéreur un délai d'action de dix ans à compter de la réception des travaux .  

S’agissant de la durée et du point de départ du délai, la Cour de cassation estime que le régime de responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs est aligné sur celui de la garantie décennale, dont le délai est un délai d’épreuve. Le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs sur le fondement de l'article 1792-4-3 du Code civil est un délai de forclusion et n'est pas, sauf dispositions contraires, régi par les textes concernant la prescription, de sorte que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit n'interrompt pas le délai décennal de l'action du maître de l'ouvrage en responsabilité contractuelle de droit commun pour des dommages intermédiaires .

Enfin, en dehors du champ d'application de ces dispositions, lorsque le dommage ne se rapporte pas à un ouvrage de construction ou l'un de ses éléments d'équipement, l'action en responsabilité contractuelle du maître de l'ouvrage relève du délai de prescription de droit commun (prévu à l'article 2224 du Code civil ou L. 110-4 du Code de commerce), y compris en cas d'action directe du maître de l'ouvrage contre le fabricant, fondée sur un manquement au devoir d'information et de conseil . Il en va de même lorsque la demande est dirigée contre l’auteur de travaux de reprise, si ceux-ci n’ont ni causé ni aggravé les désordres constatés, lesquels demeurent exclusivement imputables aux travaux initiaux .

Paris, 25 janvier 2019, LawLex202300002552JBJ.

Cass. 3e civ., 19 mars 2020, LawLex202300002669JBJ, précisant que lorsque l’instance en référé n’a pas été introduite par le maître de l’ouvrage, l’interruption et la suspension de la prescription ne peuvent lui profiter ; Toulouse, 28 mai 2024, LawLex202400006795JBJ : en l’absence de réception, l’action en responsabilité du maître d’ouvrage à l’encontre du sous-traitant se prescrit par cinq ans à compter de la manifestation du dommage..

Cass. 3e civ., 3 octobre 2024, LawLex202400007444JBJ : le délai de prescription de l'action contractuelle directe du maître de l'ouvrage contre le fabricant, fondée sur un manquement au devoir d'information et de conseil, court à compter de la livraison des matériaux à l'entrepreneur, de sorte que cette action, soumise à la prescription décennale de l'article L. 110-4, I, du Code de commerce (devenue quinquennale par l’effet de la loi 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile), est prescrite, lorsqu’elle a été introduite après que la prescription décennale, en cours à la date d'entrée en vigueur de cette loi et régie par les dispositions transitoires de son article 26, II, eût expirée, c’est-à-dire après le 19 juin 2013, soit plus de cinq années après l’entrée en vigueur de ladite loi, le 19 juin 2008.

Cass. 3e civ., 13 février 2025, LawLex202500001059JBJ, Gaz. Pal. 27 mai 2025, n° 18, obs. CASTON, pp. 68-69.

Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, LawLex202300002523JBJ.

Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, LawLex202300002523JBJ. il en va de même de l’action en responsabilité extracontractuelle du tiers à l’opération de construction qui agit sur le fondement du trouble de voisinage, V. Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, LawLex202300002517JBJ.

Paris, 16 novembre 2012, LawLex202300002758JBJ.

Cass. 3e civ., 16 octobre 2002, LawLex202400005558JBJ.

Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, LawLex202300002486JBJ ; Orléans, 28 janvier 2021, LawLex202200004955JBJ : le recours d'un constructeur contre un autre constructeur ou son sous-traitant se prescrit par cinq ans à compter du jour où le premier a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, étant entendu que l'assignation en référé-expertise délivrée par le maître de l'ouvrage à l'entrepreneur principal et mettant en cause la responsabilité de ce dernier, constitue le point de départ du délai de son action récursoire à l'encontre des sous-traitants.

Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, LawLex202300002486JBJ. - Comp., Cass. 3e civ., 15 février 1989, LawLex202400005805JBJ : l'action des acquéreurs contre le maître de l'ouvrage, intentée avant l'expiration du délai décennal de garantie légale, n'a pas pour effet de rendre recevable l'action récursoire intentée par celui-ci contre les constructeurs postérieurement à l'expiration de ce délai ; 12 novembre 2020, LawLex202200008391JBJ et LawLex202200010928JBJ, JCP N 2021, n° 17, 1174, obs. BERTOLASO ; D. 23 décembre 2020, obs. DREVEAU ; RGDA 2021, 34, obs. KARILA ; RDI 2021, 164, obs. FAURE-ABBAD ; Constr.-Urb. 2021, 9, obs. PAGES-DE VARENNE ; Defrénois 2021, 20, obs. BECQUE-ICKOWICZ : le délai de la garantie décennale étant un délai d'épreuve, toute action, même récursoire, fondée sur cette garantie ne peut être exercée plus de dix ans après la réception.

Paris, 10 octobre 2018, LawLex202300002671JBJ, précisant que l'article 1792-4-3 ne mentionne pas la qualité du demandeur exerçant les actions en responsabilité contre les constructeurs et leurs sous-traitants, hormis celles régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, mais figure dans un chapitre consacré au contrat de louage d'ouvrage et d'industrie et parmi les dispositions qui régissent les actions en responsabilité exercées par le maître de l'ouvrage ou l'acquéreur en vue de la réparation de désordres de construction, de sorte qu'il ne concerne que les actions exercées par ces derniers, et non les actions en responsabilité contractuelle ou délictuelle, formées par un constructeur à l'encontre d'un autre constructeur ou à l'encontre d'un sous-traitant ; Orléans, 28 janvier 2021, LawLex202200004955JBJ : le recours d'un constructeur contre un autre constructeur ou son sous-traitant relève, non pas des dispositions des articles 1792 et suivants du Code civil, propres à la garantie décennale dont les constructeurs ne sont pas redevables entre eux, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, de sorte que la prescription d'une telle action, engagée par un sous-traitant, non contractuellement lié au maître de l'ouvrage et étranger à l'acte de réception, n'est pas soumise aux dispositions spécifiques de l'article 1792-4-2 du Code civil, mais à celles de l'article 2224 du même Code ; Cass. 3e civ., 23 novembre 2023, LawLex202300014186JBJ, précisant que le constructeur auquel la victime des dommages demande en justice la réparation de son préjudice doit former ses actions récursoires contre les autres constructeurs et sous-traitants dans un délai de cinq ans courant à compter de cette demande, y compris lorsque le recours est provoqué par l'action récursoire d'un autre responsable mis en cause par la victime.- V. contra, Paris, 25 janvier 2019, LawLex202300002552JBJ, retenant que l’action récursoire de l'entreprise principale contre l'entreprise sous-traitante, fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun, est soumise aux dispositions de l'article 1792-4-2 du Code civil, applicable à toutes les actions en responsabilité engagées contre un sous-traitant en raison des dommages affectant un ouvrage, de sorte qu’elle doit être déclarée irrecevable lorsqu’elle a été engagée alors que le délai de 10 ans depuis la réception des travaux était largement écoulé.

Cass. 3e civ., 10 juin 2021, LawLex202300002554JBJ.

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