Contrats d'affaires

L'article 1993 du Code civil dispose : “Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand bien même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant”. 
En vertu de ce texte, le mandataire doit justifier de l'utilisation des fonds qu'il a prélevés ou reçus lors de l'exécution de son mandat . Selon la Co …

Obligation de reddition des comptes.

L'article 1993 du Code civil dispose : “Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand bien même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant”. 

En vertu de ce texte, le mandataire doit justifier de l'utilisation des fonds qu'il a prélevés ou reçus lors de l'exécution de son mandat . Selon la Cour de cassation, le mandataire qui opère des retraits sur un compte en vertu d'une  procuration qu'on lui a donnée, est réputé, en vertu de la présomption édictée par l'article 2231 du Code civil, détenir les fonds pour un  autre, sauf preuve contraire . Ainsi, les sommes remises au mandataire pour le compte du mandant et dont il a, en son nom, donné décharge, doivent être considérées comme reçues en vertu du mandat, et non à l’occasion du mandat, de sorte que le mandataire est tenu de faire raison de la totalité de celles-ci au mandant, sauf si ce dernier a accepté l’utilisation que le mandataire en a fait . 

L'obligation de reddition des comptes dont le mandataire est tenu suppose d'abord la restitution des sommes remises par le mandant pour l'exécution du mandat. La procuration sur un compte bancaire n'entraîne pas la renonciation du mandant à la propriété des fonds retirés à l'aide de celle-ci,  ni n'opère tradition, de sorte qu'il appartient à celui qui a obtenu, dans ces conditions, les sommes provenant du compte d'établir l'intention libérale qui aurait animé le mandant . Ensuite, l'obligation de reddition du mandataire implique qu'il restitue les sommes reçues de tiers, pour le compte de son mandant, au cours de l'exécution du mandat, fussent-elles indues ou illicites . Un  mandataire ad litem ne peut, par conséquent, retenir de sa propre autorité une somme sur l’indemnité reçue pour le compte de son mandant sans recueillir l’accord préalable de ce dernier,  sauf à manquer au principe selon lequel les honoraires sont librement convenus entre les parties . 

En outre, le mandataire doit non seulement restituer les sommes reçues, mais également leurs intérêts,  conformément à l'article 1996 du Code civil, qui prévoit que “ le mandataire doit l'intérêt des sommes qu'il a employées à son usage à dater de cet emploi ; et de celles dont il est reliquataire, à compter du jour où il est mis en demeure”. Selon la Cour de cassation, l'application de ce texte n'exclut pas la condamnation du mandataire, lorsqu'il est de mauvaise foi, à des dommages-intérêts supplémentaires, à condition que le mandant ait  subi un préjudice indépendant de celui causé par le simple retard .Enfin, lorsque le mandataire a reçu des marchandises pour le compte du mandant, il doit les restituer en nature, de même que tous les documents ou écrits reçus lors de l'exécution du mandat.

L'obligation de reddition des comptes s'impose au mandataire et à lui seul, quelle que soit l'étendue de son mandat . L’administrateur judiciaire désigné en qualité de mandataire ad hoc,  représentant un associé minoritaire, ne peut opposer à ce dernier le  secret professionnel tiré de son statut d’administrateur judiciaire pour refuser de lui rendre compte de l’exécution de son mandat . En outre, l’absence de dépassement de son mandat ne libère pas le mandataire de son obligation de reddition des comptes . Ainsi, même si aucune circonstance ne laisse à penser qu'il a dépassé les limites de la procuration donnée, le mandataire a une obligation de reddition des comptes à l’égard du mandant ou de ses héritiers, laquelle, s'il décède, se transmet à ses propres héritiers . En revanche, la délivrance d'un quitus peut être libératoire de responsabilité, pour un syndic , en ce qui concerne les actes de gestion dont l'assemblée générale des copropriétaires a eu connaissance et qu'elle a été à même d'apprécier . 

La reddition des comptes est libre de forme. Aussi, les parties peuvent-elles stipuler que le mandataire, chargé de la gestion locative d'un bien, est tenu de transmettre mensuellement à son mandant les sommes perçues au titre des loyers et provisions sur charge et de lui rendre compte au moins une fois par an de l'ensemble de sa gestion . 

En application de l'article 2224 du Code civil , l'action en reddition des comptes se prescrit par cinq ans , étant entendu que cette prescription court, non du jour où chaque opération fondée sur le mandat a été réalisée, mais de celui où le mandat a pris fin . 

L'action en reddition des comptes n'a pas le même objet que l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif prévue par l'article L. 651-2 du Code de commerce. Dès lors, une cour d’appel ne saurait déclarer irrecevable l’action du liquidateur,  sur le fondement de l’obligation de reddition des comptes du mandataire social, en paiement d’une somme que ce dernier reconnaît avoir détournée au préjudice de la société, au motif que le liquidateur aurait  dû se fonder, non sur l'article 1993 du Code civil, mais sur l’article L. 651-2 du Code de commerce, pour faire sanctionner une faute de  gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société, alors que le liquidateur, sans faire référence à une quelconque insuffisance d'actif, ne réclamait que le remboursement d'une somme, payée par un client de la société, que le dirigeant avait conservée entre ses mains .

L'avant-projet de réforme du droit des contrats spéciaux précise l'obligation de reddition des comptes, en prévoyant que : “Le mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, notamment par la production des comptes s'y rapportant, soit en cours de mandat, soit à son issue, selon l'objet de la mission qui lui a été confiée. Lorsque le mandataire est laissé libre de gérer l’affaire qui lui a été confiée, il doit également informer périodiquement le mandant de l’avancement de sa mission”   . 

Cass. 1re civ., 12 novembre 2015, LawLex202200008386JBJ, D. 2016, 2535, obs. AYNES ; Rennes, 30 juin 2020, LawLex202300007734JBJ.

Cass. 1re civ., 3 mars 1987, LawLex202300012524JBJ.

Montpellier, 19 avril 2021, LawLex202300007736JBJ.

Cass. 3e civ., 18 décembre 1996, LawLex202300012896JBJ : la mise hors de cause du syndic est justifiée, dès lors que les assemblées générales ont donné quitus au syndic pour toute la période de son mandat, de sorte qu'aucun copropriétaire ne peut obtenir réparation du préjudice personnel qu'il a subi du fait d'une mauvaise gestion de la copropriété.

Cass. 3e civ., 23 juin 1999, LawLex202300012524JBJ. 

Douai, 4 mai 2023, LawLex202300012895JBJ.

C. civ., art. 2224 : “ Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Il lui doit l’intérêt des sommes dont il est reliquataire, à compter du jour où il est mis en demeure”.

Cass. 1re civ., 24 novembre 2021, LawLex202300012539JBJ, Contrats Conc. Consom. 2022, n° 21, obs. LEVENEUR ; RTD com. 2022, 55, obs. GAUDRAT, relevant que l'action en restitution fondée sur un contrat de dépôt, de prêt ou de  mandat constitue une action mobilière, distincte de l'action en  revendication, de sorte qu'elle soumise à la prescription civile de droit commun relative aux actions personnelles ou mobilières.

Rennes, 30 juin 2020, LawLex202300007734JBJ.

Cass. com., 15 novembre 2016, LawLex202300007594JBJ, Rev. proc. coll. 2017, 89, obs. MARTIN-SERF ; LPA 23 août 2017, 6, obs. OUEGOUM. 

Avant-projet, art. 2000, al. 1er. L'article 2004 ajoute, en son premier alinéa, que “Le mandataire, à l'issue de sa mission, remet au mandant tout ce qu'il a reçu en sa qualité de mandataire”.

Cass. 1re civ., 8 juillet 1975, LawLex202200009400JBJ, RTD civ. 1977, 149, obs. CORNU ; D. 1976, 315, obs. GAURY.

Cass. 1re civ., 3 mai 2006, LawLex202300012525JBJ, Dr. famille 2006, n° 196, obs. BEIGNIER ; D. 2006, 1526, obs. AVENA-ROBARDET.

Cass. com., 14 mai 2013, LawLex201300000833JBJ, pour le paiement de commission occultes reçus d'un fournisseur par le mandataire. 

Cass. 1re civ., 11 juillet 1983, LawLex202300012427JBJ.

Cass. 1re civ., 9 mai 1990, LawLex202300012535JBJ, RTD com. 1991, 96, obs. BOULOC ; Douai, 4 mai 2023, LawLex202300012895JBJ, énonçant que le mandant n'exerce pas une action en reddition de compte, mais une action en responsabilité en raison des fautes qu'il impute à son mandataire dans l'exercice de son mandat, lorsqu'il demande des dommages et intérêts, et non la reconnaissance d'une créance ; Montpellier, 13 juin 2024, LawLex202400008216JBJ : le mandant qui apporte la preuve qu’il se trouvait dans une situation  précaire financièrement aggravée par les retraits réalisés par son  mandataire, a subi un préjudice moral et un préjudice financier,  justifiant l'octroi de dommages-intérêts supplémentaires.

Cass. 1re civ., 2 février 1999, LawLex202200008453JBJ, RTD com. 1999, 947, obs. BOULOC ; Gaz. Pal. 1999, 433, obs. GUEVEL, ajoutant que lorsqu’un héritier a effectué des retraits sur les comptes bancaires de  sa mère, en vertu d'une procuration de cette dernière, il doit rendre  compte de l'utilisation des fonds, sans préjudice de la possibilité,  pour les juges du fond, usant de leur pouvoir souverain d'appréciation,  de fixer, après déduction des dépenses estimées pour les besoins de la  défunte, le montant des retraits non justifiés devant être rapportés à  la succession.

Cass. com., 18 novembre 2014, LawLex202200009401JBJ, Gaz. Pal. 2015, 27, 19, obs. DONDERO ; Dr. sociétés 2015, 22, obs. MORTIER.

Cass. 1re civ., 16 mai 2006, LawLex202200009403JBJ, RTD com. 2007, 222, obs. BOULOC, précisant que tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire  raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, de  sorte qu'une cour d'appel ne peut débouter, sur le fondement de l'article 1993 du  Code civil, un héritier de sa demande en reddition de comptes au seul  motif qu'aucun élément ne permet d'estimer que les autres héritiers auraient dépassé le mandat qui leur avait été confié, en abusant de la  procuration qui leur avait été consentie.

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482. Obligation de reddition des comptes.

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