Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

Le contrat de société, tel que défini par l'article 1832 du Code civil, impose aux associés de contribuer aux pertes  dans l'hypothèse où le résultat de la société serait déficitaire. Le principe de participation de tous aux pertes n'a vocation à s'appliquer qu'au moment de la dissolution de la société  , à moins que la loi et les statuts n'en disposent autrement. 
Une société en difficulté financ …

Contribution des associés aux pertes sociales

Le contrat de société, tel que défini par l'article 1832 du Code civil, impose aux associés de contribuer aux pertes  dans l'hypothèse où le résultat de la société serait déficitaire. Le principe de participation de tous aux pertes n'a vocation à s'appliquer qu'au moment de la dissolution de la société  , à moins que la loi et les statuts n'en disposent autrement. 

Une société en difficulté financière peut être conduite à procéder à des appels de fonds auprès des associés. Cependant, l'article 1836, alinéa 2, indique que de tels appels de fonds, qui augmentent les engagements des associés, ne peuvent intervenir en cours de vie sociale, sans avoir au préalable obtenu leur consentement. De fait, ni les dirigeants sociaux, ni la majorité des associés ne peuvent imposer à un associé un versement qu'il n'a pas accepté dans le cadre d'un appel de fonds complémentaire pour faire face aux exigences de certains créanciers sociaux . De même, le refus de l'associé d'une SCI de répondre à des appels de fonds, notamment pour le financement des travaux et prestations déjà effectués, n'est pas fautif, sauf à ce qu'ils aient été prévus dans les statuts . Cependant, des décisions d'assemblée générale, prises conformément aux statuts, qui prévoient que le bénéfice de l'exercice est intégralement acquis par les associés à la date de sa clôture et réparti entre eux proportionnellement au nombre de leurs parts sociales, sous forme d'inscription en compte courant, et que les pertes sont supportées immédiatement intégralement et réparties entre les associés, ne violent pas l'article 1836, qui ne règle que les conditions auxquelles doivent satisfaire les décisions modificatives des statuts .

Si, lors de la dissolution de la société, après avoir désintéressé les créanciers sociaux, le liquidateur constate un résultat négatif dans les écritures comptables de la société, il est recevable à agir contre les associés de la société, en règlement de leur contribution aux pertes . L'étendue de la participation aux pertes pour les associés de sociétés à responsabilité illimitée diffère de celle des membres de sociétés à responsabilité limitée dont le risque est cantonné au montant de leur apport. En effet, dans les sociétés dans lesquelles le risque est illimité, la contribution aux pertes peut largement excéder le montant de l'apport.

La participation au pertes doit être distinguée d'une notion voisine: l'obligation aux dettes sociales. Là encore, une distinction doit être opérée selon que l'on se trouve dans une société à responsabilité limitée ou une société à responsabilité illimitée. En effet, dans les sociétés à responsabilité limitée, l'associé ne peut être tenu de désintéresser personnellement les créanciers sociaux, à moins d'avoir pris un engagement exprès en ce sens. De fait, la facturation complémentaire dépourvue de lien avec une prestation fournie, adressée aux associés d'une SAS  au titre des charges non couvertes en fin d'exercice, viole l'interdiction de les soumettre à une contribution au passif . En revanche, dans les sociétés à responsabilité illimitée, les associés sont tenus indéfiniment et solidairement des dettes sociales . Cette obligation est cependant instituée uniquement au profit des tiers, de telle sorte que l'associé créancier d'une SCI au titre d'avances en compte courant, ne peut s'en prévaloir pour agir en paiement contre ses coassociés . 

Conformément à l'article 1844-1 du Code civil, chaque associé contribue aux pertes à proportion de sa part dans le capital social . Les statuts peuvent prévoir une répartition différente sous réserve de ne pas enfreindre la réglementation relative aux clauses léonines. 

La prohibition des clauses léonines est fréquemment invoquée en matière de promesse d'achat, notamment lorsqu'un prix de cession est préalablement convenu entre les parties à l'acte. La jurisprudence considère qu'une promesse d'achat d'actions conclue à un prix déterminé constitue une stipulation étrangère au pacte social, dénuée d'incidence sur l'attribution des bénéfices aux associés et leur contribution aux pertes . Elle retient dès lors que la conclusion d'une convention de cession entre associés, dont l'unique objet est d'assurer, moyennant un prix librement convenu, la transmission de droits sociaux  ou l'équilibre des conventions conclues entre les parties , ne porte pas atteinte au pacte social et ne relève pas de l'interdiction des clauses ayant pour effet de libérer l'un des associés de toute contribution aux pertes sociales. De même, la conclusion d'une promesse d'achat d'actions à un prix minimum librement débattu, subordonnée à la condition suspensive que l'une des parties cesse ses fonctions au sein de la société qu'elle dirige n'affecte pas sa contribution aux pertes . En définitive, la jurisprudence admet aisément la validité de telles promesses lorsque l'existence d'un risque social  n'est pas écartée, ce qui n'est pas le cas lorsque l'une des parties abandonne les bénéfices correspondant à ses parts sociales moyennant une redevance forfaitaire, car elle tend, à travers cette opération à se garantir la certitude d'un profit . 

Le caractère léonin de la convention de croupier qui prévoit que la participation des parties aux bénéfices et aux pertes est fixée au prorata de la quote-part des associés a lui aussi été exclu car ces dispositions ne conduisent pas à exonérer le cavalier de toute contribution aux pertes .

Enfin, des décisions d'assemblées générales extraordinaires qui attribuent la totalité des pertes aux associés minoritaires, au titre de trois exercices clos, et exonèrent certains associés de toute participation à celles-ci, ne sont pas réputées non-écrites, dès lors qu’elles ne dérogent que de manière ponctuelle au pacte social .

Cass. req., 8 janvier 1872, LawLex202300014061JBJ.

Cass. com., 3 mars 1975, LawLex202200003220JBJ. 

Cass. com., 10 janvier 1989, LawLex202200003642JBJ.

Cass. com., 20 mai 1986, LawLex202200003430JBJ ; 8 mars 2005, LawLex202200003241JBJ ; 19 octobre 1999, LawLex202200003462JBJ ; 24 mai 1994, LawLex202200003235JBJ ; 19 mai 1998, LawLex202200003643JBJ.

Cass. com.,16 novembre 2004, LawLex202200003268JBJ, considérant qu'une promesse de rachat d'actions qui a pour objet, par la fixation d'un prix minimum de cession, d'assurer l'équilibre des conventions conclues entre les parties et qui assure à son bénéficiaire, bailleur de fonds, le remboursement de l'investissement auquel il n'aurait pas consenti sans cette condition déterminante, n'exonère pas ce dernier de toute contribution aux pertes, même s'il s'agit d'un engagement unilatéral ; 3 mars 2009, LawLex202200003240JBJ, s'agissant d'une promesse consentie en contrepartie de la souscription à une augmentation de capital.

Cass. com., 12 mars 1996, LawLex202200003438JBJ.

Cass. com., 22 février 2005, LawLex202200003237JBJ, retenant que la promesse d'achat d'actions souscrites par un actionnaire, décorrélée de toute promesse de vente réciproque de celles-ci, ne présente pas de caractère léonin, dès lors que sa mise en œuvre est soumise à la levée d'une option à l'expiration d'un certain délai et pendant un temps limité, ce dont il résulte que l'actionnaire, en dehors de cette période, demeure soumis au risque de disparition ou de dépréciation des actions ; 23 mars 2010, LawLex202200003269JBJ, indiquant que la promesse de rachat d'actions d'un associé minoritaire détenues dans une filiale, à un prix minimum de cession, n'exempte pas son bénéficiaire de toute contribution aux pertes, dès lors qu'elle est assortie d'une période de transition pendant laquelle ce dernier met à la disposition de la société son expérience et sa connaissance du fonctionnement de cette unité, et que sur la durée de cinq années pendant laquelle la promesse de rachat ne peut être levée, il s'engage à n'exercer la présidence de la société que pendant les deux premières années ; Cass. 1re civ., 15 mai 2008, LawLex202200003244JBJ, estimant qu'une faculté de rachat des parts sociales ou de retrait encadrée dans le temps offerte au cessionnaire ne l'exonère pas de tout risque de pertes dès lors que la rétribution des parts sociales dépend des bénéfices distribuables et de leur variation.

Cass. com., 18 octobre 1994, LawLex202200003458JBJ.

Cass. com., 15 décembre 1998, LawLex202200002970JBJ.

Cons. d'Et., 18 octobre 2022, LawLex202300004365JBJ, Gaz. Pal. 14 mars 2023, 54, obs. MASSARD.

Cass. com., 7 mars 1989, LawLex202200003223JBJ.

Cass. com., 10 juillet 2012, LawLex202200003226JBJ ; 5 mai 2009, LawLex202200003221JBJ, considérant que le membre d'une SCI qui demande à exercer son droit de retrait ne peut être tenu de s'acquitter d'une somme au titre du déficit net comptable de la société lorsque les statuts de cette dernière ne stipulent pas expressément que les associés doivent contribuer aux pertes subies au cours de la vie sociale ; 5 mai 2009, LawLex202200003221JBJ.

Cass. com., 9 juin 2004, LawLex202200003228JBJ.

Cass. com., 27 septembre 2016, LawLex202100002936JBJ. 

Cass. com., 18 décembre 2012, LawLex202200003224JBJ.

C. com., art. L. 221-1, al. 1er, L. 222-1, al. 1er et L. 226-1, al. 1er.

Cass. com., 3 mai 2012, LawLex202100003574JBJ.

Cass. com., 7 mai 2019, LawLex202200003267JBJ. 

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