Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

Le commissaire aux comptes constitue un organe-clé du contrôle de la société. Son statut, identique quelle que soit la société concernée, est fixé aux articles L. 822-1 et suivants du Code de commerce.
S'agissant spécifiquement de la société anonyme, l'article L. 225-218 du Code de commerce prévoit que l'assemblée générale ordinaire peut désigner un ou plusieurs commissaires aux comptes dans les c …

Mission et responsabilité

Le commissaire aux comptes constitue un organe-clé du contrôle de la société. Son statut, identique quelle que soit la société concernée, est fixé aux articles L. 822-1 et suivants du Code de commerce.

S'agissant spécifiquement de la société anonyme, l'article L. 225-218 du Code de commerce prévoit que l'assemblée générale ordinaire peut désigner un ou plusieurs commissaires aux comptes dans les conditions prévues aux articles L. 225-228 et L. 22-10-66. Aux termes de ceux-ci, les commissaires aux comptes sont proposés à la désignation de l'assemblée générale par un projet de résolution émanant du conseil d'administration ou du conseil de surveillance. Lorsque les actions de la société sont admises aux négociations sur un marché réglementé, le conseil d'administration choisit, sans que prennent part au vote le directeur général et le directeur général délégué, s'ils sont administrateurs, les commissaires aux comptes qu'il envisage de proposer.

Sont tenues de désigner au moins un commissaire aux comptes les sociétés qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, les seuils de quatre millions de total de bilan, huit millions de chiffre d'affaires hors taxes ou cinquante salariés . Même si ces seuils ne sont pas atteints, la nomination d'un commissaire aux comptes peut être demandée en justice par un ou plusieurs actionnaires représentant au moins le dixième du capital. Sont également tenues de désigner un commissaire aux comptes, pour un mandat de trois exercices, les sociétés dont un ou plusieurs associés représentant au moins le tiers du capital en font la demande motivée auprès de la société.

La mission essentielle du commissaire aux comptes consiste en un audit légal . L'article L. 823-10 prévoit en effet que les commissaires aux comptes ont pour mission permanente, à l'exclusion de toute immixtion dans la gestion, de vérifier les valeurs et les documents comptables de la personne ou de l'entité dont ils sont chargés de certifier les comptes et de contrôler la conformité de sa comptabilité aux règles en vigueur. Ils vérifient également la sincérité et la concordance avec les comptes annuels des informations données dans le rapport de gestion du conseil d'administration, du directoire ou de tout organe de direction, et dans les documents adressés aux actionnaires ou associés sur la situation financière et les comptes annuels. Ils attestent spécialement l'exactitude et la sincérité des informations relatives aux rémunérations et aux avantages de toute nature versés à chaque mandataire social. Ils vérifient, le cas échéant, la sincérité et la concordance avec les comptes consolidés des informations données dans le rapport sur la gestion du groupe. Ils peuvent se faire communiquer sur place toutes les pièces qu'ils estiment utiles à l'exercice de leur mission et notamment tous contrats, livres, documents comptables et registres des procès-verbaux . Investi d'une mission permanente de contrôle, le commissaire aux comptes ne peut certifier des comptes falsifiés par un comptable salarié qui a effectué des détournements antérieurement à l’établissement de son rapport . 

En outre, l'article L. 823-16 enjoint aux commissaires aux comptes d'alerter les organes dirigeants et les actionnaires des éventuelles anomalies constatées. L'article L. 823-12, alinéa 2, impose également aux commissaires aux comptes de révéler au procureur de la République, dès qu'il en ont connaissance dans le cadre de leur mission, les irrégularités susceptibles de recevoir une qualification pénale, même si celle-ci ne peut en l'état être définie avec précision . Ils doivent en outre déclarer à la cellule TRACFIN les sommes inscrites dans leurs livres ou les opérations portant sur des sommes dont ils savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles proviennent d'une infraction passible d'une peine privative de liberté supérieure à un an ou sont liées au financement du terrorisme. C'est également le commissaire aux comptes qui s'assure que les administrateurs et les membres du conseil de surveillance sont bien titulaires des actions que les statuts leur imposent de détenir .

L'article L. 225-103 leur confère en outre la faculté de convoquer l'assemblée générale après avoir vainement requis cette convocation du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Lorsqu'ils procèdent à cette convocation, ils fixent l'ordre du jour et peuvent, pour des motifs déterminants, choisir un lieu de réunion autre que celui éventuellement prévu par les statuts, mais situé dans le même département. Ils doivent exposer les motifs de la convocation dans un rapport lu à l'assemblée. En cas de pluralité de commissaire aux comptes, ils agissent d'accord entre eux. S'ils sont en désaccord sur l'opportunité de convoquer l'assemblée, l'un d'eux peut demander au président du tribunal de commerce statuant en référé l'autorisation de procéder à cette convocation, les autres commissaires et le président du conseil d'administration ou du directoire dûment appelés. L'ordonnance du président, qui fixe l'ordre du jour, n'est susceptible d'aucune voie de recours.

Enfin, l'article L. 234-1 du Code de commerce dispose que lorsque le commissaire aux comptes d'une société anonyme relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation, il en informe le président du conseil d'administration ou du directoire. Au regard de la lourdeur de cette procédure, le législateur a prévu, à l'article L. 611-2-2, des mesures qui permettent d'accélérer le processus. Ainsi, lorsqu'il lui apparaît que l'urgence commande l'adoption de mesures immédiates et que le dirigeant s'y refuse ou fait savoir qu'il envisage des mesures que le commissaire aux comptes estime insuffisantes, ce dernier peut en informer le président du tribunal compétent dès la première information faite au président du conseil d'administration ou de surveillance ou au dirigeant. Dans ce cas, le commissaire aux comptes informe par tout moyen et sans délai le président du tribunal de ses constats et démarches. Il peut lui adresser la copie de tous les documents utiles à cette information et lui expose les raisons qui l'ont conduit à constater l'insuffisance des décisions prises. De son initiative ou à la demande du président du tribunal, il peut transmettre au tribunal tout renseignement complémentaire de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière de l'entreprise. Le commissaire aux comptes peut également, à tout moment, demander à être entendu, avec les dirigeants, par le président du tribunal.

En raison de l'importance des missions du commissaire aux comptes, sa responsabilité civile est susceptible d'être engagée tant par la société que par les tiers , à raison des fautes commises dans l'exercice de ses fonctions. Un commissaire aux comptes engage ainsi sa responsabilité lorsqu'il manque à son obligation légale de vérification de la sincérité de la rémunération du dirigeant social et commet une négligence fautive, en s'abstenant d'interpeler les organes compétents de la société sur l'augmentation substantielle du traitement d'un dirigeant sans décision du conseil d'administration, de formuler des observations ou réserves lors de la certification des comptes, de s'assurer de la sincérité de l'information relative à cette rémunération en restant inerte, dans l'attente de procéder au seul contrôle sur place des pièces comptables, une fois l'exercice achevé . Il en va également ainsi lorsqu'il certifie des comptes annuels en dépit de l'absence d'inscription de provisions relatives à un passif éventuel  ou dénonce de manière injustifiée des faits prétendument délictueux commis au sein de la société contrôlée au procureur de la République, dès le lendemain de la remise du rapport de certification, dans une intention manifeste de nuire . A contrario, le commissaire aux comptes ne commet pas de faute en s’abstenant de dénoncer, par un refus de certification des comptes, des flux anormaux de capitaux entre la société et ses filiales, dès lors qu’il a attiré l'attention des dirigeants dans ses rapports sur les comptes de deux exercices successifs, signalé à plusieurs reprises la difficulté provenant de l'importance de ces flux financiers et déclenché deux alertes . De même, la société qui a fait l’objet d’un redressement en se considérant à tort exonérée de la taxe professionnelle ne peut engager la responsabilité pour faute du commissaire aux comptes si cette inexactitude n’a pas été de nature à fausser la perception par les tiers de sa situation patrimoniale .

Le commissaire aux comptes encourt également des sanctions disciplinaires en cas de  manquement aux conditions légales d'exercice de la profession ou toute négligence grave et tout fait contraire à la probité ou à l'honneur . Les sanctions prévues vont de l'avertissement au retrait de l'honorariat . Le délai de prescription est de six ans .

Enfin, la responsabilité pénale du commissaire aux comptes peut être engagée au titre de diverses infractions. L'article L. 820-5 punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euro d'amende l'exercice illégal de la profession ; l'article L. 820-6 punit d'un emprisonnement de six mois et d'une amende de 7 500 euro le fait, pour toute personne d'accepter, d'exercer ou de conserver les fonctions de commissaire aux comptes, nonobstant les incompatibilités légales, soit en son nom personnel, soit au titre d'associé dans une société de commissaires aux comptes ; et l'article L. 820-7 punit d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 75 000 euro le fait, pour toute personne exerçant les fonctions de commissaire aux comptes, de donner ou confirmer des informations mensongères sur la situation de la personne morale ou de ne pas révéler au procureur de la République les faits délictueux dont elle a eu connaissance. Par ailleurs, la certification des comptes annuels, sans vérification comptable, par un nouveau commissaire aux comptes, est constitutive d’un acte positif de complicité des délits de banqueroute et d’escroquerie commis par les dirigeants de la société, a fortiori lorsque son prédécesseur a refusé de certifier certains comptes annuels et relevé une fraude généralisée . En outre, tenus d’apprécier sous leur responsabilité la valeur des apports en nature effectués à l'occasion d'une augmentation de capital, les commissaires aux comptes, en leur qualité de commissaires aux apports, peuvent certes prendre en considération des critères objectifs étrangers à la seule valeur vénale ou marchande des biens apportés, mais commettent le délit de majoration frauduleuse d’apports en nature, lorsqu’ils dissimulent volontairement des éléments d’appréciation propres à entraîner une réduction importante de la valeur de ces biens .

Cass. com., 19 octobre 1999, LawLex202300008970JBJ, considérant que le commissaire aux comptes est investi d'une mission permanente de contrôle, qui ne s’exerce pas uniquement a posteriori, mais qui peut aussi viser des détournements commis avant la date du dépôt de son rapport sur les comptes annuels.

Cass. com., 15 mars 2017, LawLex202200005597JBJ.

Cass. com., 8 novembre 2011, LawLex202200005600JBJ.

Cass. com., 2 novembre 2011, LawLex202200005599JBJ.

Cass. crim., 18 mai 2011, LawLex202100002047JBJ.

Cass. crim., 12 avril 1976, LawLex202300011974JBJ.

Cass. com., 24 octobre 2000, LawLex202300008972JBJ.

Cass. crim., 15 septembre 1999, LawLex202300008975JBJ.

Cass. crim., 15 septembre 1999, LawLex202300008975JBJ, estimant que le juge répressif n'est pas compétent pour se prononcer sur la responsabilité civile du commissaire aux comptes qui n'aurait pas révélé, dans son rapport à l'assemblée générale, des infractions commises par les dirigeants sociaux, dès lors que celle-ci prend sa source, non dans une infraction pénale, mais dans un manquement de caractère civil.

Cass. com., 23 mars 2010, LawLex202200005598JBJ, retenant que le commissaire aux comptes qui agit en qualité d'associé, d'actionnaire ou de dirigeant d'une société titulaire d'un mandat de commissaire aux comptes répond personnellement des actes professionnels qu'il accomplit au nom de cette société, quelle qu'en soit la forme.

Cass. com., 31 mars 2021, LawLex202200005859JBJ.

Cass. com., 27 septembre 2017, LawLex202200005601JBJ.

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