Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit européen de la concurrence

Aux termes de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, les mesures étatiques constituent des aides prohibées dans la mesure où elles “faussent ou […] menacent de fausser la concurrence”. Toute mesure étatique qui renforce la position des entreprises bénéficiaires par rapport à leurs concurrents est susceptible de constituer une aide prohibée . La communication relative à la notion d'aides d'Etat rappelle ainsi qu'il suffit que l'aide permette à l'entreprise de conserver sa position concurrentielle plus forte que celle qu'elle aurait  eu sans elle (pt 189) . Le risque de position dominante du bénéficiaire de l'aide n'implique pas que cet effet négatif de l'aide en termes de distorsion de la concurrence l'emporte sur les effets positifs du projet relatif à la contribution à un objectif d'intérêt européen .

Une aide d’État est susceptible d’affecter les échanges entre les États membres et de fausser ou de menacer de fausser la concurrence, alors même que le marché concerné n’est que partiellement ouvert à la concurrence. Il suffit qu'au moment de la mise en vigueur d’une mesure d’aide, il y ait une situation de concurrence effective sur le marché concerné, dès lors que la qualification d’aide d’État n’est pas soumise à la condition que le marché concerné ait été au préalable entièrement libéralisé .

Pour apprécier l'existence d'une aide d'État, la Commission n'est pas tenue de vérifier l'effet réel sur la concurrence de la mesure . Une incidence seulement potentielle suffit à la qualification d'aide d'État . Il n'est pas non plus nécessaire de délimiter le marché en cause . Il doit être tenu compte des activités dont le bénéficiaire a précisément et effectivement la charge pour mesurer les effets sur la concurrence de l'aide qui lui a été octroyée . Lorsqu'elle apprécie les effets tant réels que potentiels d'une aide sur la concurrence, l'autorité européenne, qui mène son analyse dans une perspective dynamique, peut, en outre, se fonder sur des éléments d'appréciation postérieurs à l'adoption du projet tendant à instituer ou à modifier l'aide . Ainsi, la privatisation du bénéficiaire d'une aide illégale ne saurait s'identifier à un remboursement effectif de l'aide, même si l'État membre concerné en a tiré profit, dès lors que cette circonstance n'a pas empêché l'entreprise en cause d'avoir la jouissance effective, après le changement de son actionnariat, de l'avantage conféré par l'accord d'électricité en cause sans faire disparaître la distorsion de concurrence . C'est à la date où le bénéficiaire de l'aide acquiert le droit certain à la percevoir que la mesure est susceptible d'entraîner une distorsion de concurrence .

CJCE, 15 décembre 2005, République italienne, aff. C-66-02, LawLex200600000168JBJ; TUE, 24 septembre 2019, Grand Duché de Luxembourg ; Irlande ; Fiat Chhrysler Finance Europe  c. Commission européenne, T-755-15; T-759-15, LawLex201900001116JBJ, retenant que la décision anticipative des autorités fiscales nationales qui diminue la charge fiscale de l'entreprise bénéficiaire et octroie des ressources supplémentaires à l'ensemble du groupe, auquel elle appartient, dans la mesure où elle a pour effet d'abaisser les conditions de prix pour les prêts intragroupe est de nature à restreindre la concurrence sur le marché. Le fait qu'un État membre confie un service public soumis à un monopole légal à une entreprise publique n'entraîne de distorsion de concurrence de même qu'un avantage accordé à cette entreprise ne fausse la concurrence que si le monopole légal exclue non seulement la concurrence sur le marché, mais aussi pour le marché, en ce sens qu'il écarte toute concurrence potentielle pour devenir le prestataire exclusif du service en question, CJUE, 19 décembre 2019, Arriva Italia Srl, Ferrotramviaria SpA, Consorzio Trasporti Aziende Pugliesi (CO.TRA.P), Ferrovie dello Stato Italiane SpA, Gestione Commissariale per Le Ferrovie del Sud Est e Servizi Automobilistici Srl a socio unico c. Ministero delle Infrastrutture e dei Trasporti, Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato, aff. c-385-18, LawLex201900001584JBJ, à propos de l'allocation de 70 millions d'euro au gestionnaire exclusif de l'insfrastructure ferroviaire utilisée pour le transport public de passagers dans la région des Pouilles ; TUE, 14 décembre 2022, Autoridad Porturaria de Bilbao, aff. T-126/20, LawLex202200011194JBJ, qui souligne que les aides qui visent à libérer une entreprise des coûts qu'elle aurait dû supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales faussent en principe le jeu de la concurrence.

Pour un ex., V. TUE, 8e ch., 20 décembre 2023, Ryanair DAC, aff. T-216/21, LawLex202300014752JBJ, Europe 2024, n° 70, obs. IDOT ; 1/2024, 142, obs. STROMSKY, qui estime que l'octroi d'une mesure d'aide est susceptible de renforcer la position d'une compagnie aérienne nationale au détriment d'une compagnie low-cost et de conduire prima facie à porter substantiellement atteinte à sa position concurrentielle sur le marché, en provoquant un manque à gagner ou une évolution moins favorable que celle qui aurait été enregistrée en l'absence de cette mesure, dès lors que les compagnies aériennes sont en concurrence sur un nombre important de lignes aériennes au départ et à l'arrivée de l'Etat membre en cause, que la requérante envisageait une expansion commerciale avec le lancement de nouvelles lignes et qu'elle se trouvait dans une position relativement forte par rapport à la compagnie nationale confrontée à des risques d'insolvabilité, voire de sortie de marché, celle-ci ayant annoncé un plan d'action visant à intensifier la concurrence avec les compagnies low-cost.

CJUE, 25 janvier 2022, Commission c. République fédérale d'Allemagne, aff. C-638/19 P, LawLex202200000538JBJ, et sur renvoi, TUE, 2 octobre 2024, European Food SA, aff. T-624/15 RENV, LawLex202400007238JBJ, JDE 2022, 111, note CROISANT.

TUE, 28 février 2024, Scandlines Danmark ApS, T-390/20, LawLex202400001821JBJ.

CJUE, gr. ch., 12 janvier 2023, “ DOBELES HES ” SIA et Sabiedrisko pakalpojumu regulēšanas komisija, aff. C-702/20, LawLex202300000550JBJ, Europe 2023, n° 109, obs. IDOT ; Concurrences 2/2023, 117, obs. STROMSKY.

CJCE, 22 avril 2004, République italienne, aff. C-372-97, LawLex200400000966JBJ.

TPICE, 15 juin 2000, Alzetta, aff. T-298-97, LawLex200200003582JBJ ; 13 décembre 2017, République hellénique c. Commission européenne, aff. T-314-15, LawLex201700002052JBJ.

TPICE, 6 septembre 2006, République italienne, aff. T-304-04, LawLex200600001851JBJ ; 13 décembre 2017, République hellénique c. Commission européenne, aff. T-314-15, LawLex201700002052JBJ : dès lors que la Commission a exposé en quoi les aides litigieuses sont susceptibles de fausser la concurrence et d'affecter les échanges entre États membres, il ne lui incombe ni de procéder à une analyse économique de leurs conséquences potentielles sur les ports concurrents, ni d'identifier le marché géographique pertinent, ni de vérifier si le bénéficiaire a fait ou non usage des aides.

CJUE, 6 octobre 2021, Scandlines Danmark ApS, aff. C-174/19 P et C_175/19 P, LawLex202100005487JBJ.

TPICE, 15 décembre 1999, Freistaat Sachsen, Volkswagen (AG), aff. T-132-96, LawLex200200003605JBJ.

CJUE, 1er octobre 2015, Electrabel (SA), Dunamenti Eromu Zrt c. Commission européenne, aff. C-357-14 P, LawLex201500001177JBJ, Europe 2015, n° 512, obs. IDOT ; LPA 18 avril 2016, 7, obs. ARHEL ; Concurrences 1-2016, 152, obs. DERENNE.

395. Appréciation de l'effet anticoncurrentiel.