Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

En application du principe de reconnaissance mutuelle, les États membres doivent permettre l'exercice sur leur territoire, tant au moyen de l'établissement d'une succursale  que par voie de prestation de services d'un établissement de crédit agréé d'un autre État membre, des activités énumérées à l'annexe I, à condition qu'elles soient couvertes par l'agrément (Dir. 2013/36, art. 33). Les établiss …

Libre établissement et libre prestation de services.

GRUNDMANN, Le système du droit bancaire européen, RD bancaire et bourse, 1991 nº 26 ; PARDON, Liberté d'établissement et libre prestation de services dans le domaine bancaire, RD bancaire et bourse, 1991, 219 ; ROEGES, L'exercice de l'activité bancaire par la voie d'une succursale après la deuxième directive bancaire, RD bancaire et bourse, 1994, 17 et 113 ; IDOT, La rémunération des comptes à vue et le droit communautaire : à propos de la décision de la Commission bancaire du 16 avril 2002, LPA, 23 octobre 2002 ; STOUFFLET, Rémunération des dépôts à vue. L'affaire de la "Caixa", RD bancaire et fin., 2002, 335 ; AGUILA, Rémunération des comptes à vue : l'arrêt du 5 octobre 2004 de la CJCE, Banque et droit, mars-avril 2005, 3 ; SOUSI, La libre prestation de services, l'agrément bancaire et l'octroi de crédits hypothécaires. Epilogue, D., 2005, 785.

En application du principe de reconnaissance mutuelle, les États membres doivent permettre l'exercice sur leur territoire, tant au moyen de l'établissement d'une succursale  que par voie de prestation de services d'un établissement de crédit agréé d'un autre État membre, des activités énumérées à l'annexe I, à condition qu'elles soient couvertes par l'agrément (Dir. 2013/36, art. 33). Les établissements financiers d'un autre État membre, lorsqu'ils sont filiales d'un établissement de crédit ou filiale commune de plusieurs établissements de crédit, bénéficient également de la liberté d'établissement ou de prestation de services (art. 34) .

L'intention d'établir une succursale sur le territoire d'un autre État membre doit être notifiée par l'établissement de crédit aux autorités compétentes de l'État membre d'origine, la notification étant accompagnée d'un certain nombre d'informations obligatoires (art. 35) . Dans les trois mois de leur réception, les informations sont communiquées par les autorités compétentes de l'État d'origine à celles de l'État d'accueil . Le principe de reconnaissance mutuelle ne prive, cependant, pas l'État d'accueil de tout pouvoir à l'égard de l'établissement de crédit qui établit une succursale sur son territoire. Ainsi, avant que la succursale ne commence à exercer ses activités, et dans les deux mois suivant la réception des informations accompagnant la notification d'établissement, les autorités compétentes de l'État membre d'accueil mettent en place les modalités d'une surveillance auxiliaire de l'établissement de crédit  et précisent, le cas échéant, les conditions d'exercice de certaines activités imposées pour des raisons d'intérêt général . L'établissement peut avoir lieu et la succursale commencer ses activités dès réception d'une communication des autorités de contrôle de l'État membre d'accueil ou, en l'absence de communication, à l'expiration du délai de deux mois.

L'exercice de la liberté de prestation de services par un établissement de crédit sur le territoire d'un autre État membre est soumis à un formalisme allégé : il suffit que l'établissement bancaire notifie aux autorités compétentes de l'État membre d'origine les activités qu'il envisage d'exercer. La notification est communiquée aux autorités compétentes de l'État membre d'accueil dans le mois de sa réception (art. 39). Avant que le principe de reconnaissance mutuelle des agréments ne soit posé par la deuxième directive , la Cour de justice avait précisé les conditions d'exercice de la liberté de prestation de services . Ainsi, la législation d'un État membre qui impose à un établissement de crédit, déjà agréé dans un autre État membre, d'obtenir un agrément pour pouvoir accorder un prêt hypothécaire à l'un de ses nationaux, constitue une restriction à la liberté de prestation de services, à moins que cet agrément s'impose à toute personne ou à toute société exerçant l'activité en cause sur son territoire, soit justifié par des raisons liées à l'intérêt général telles que la protection des consommateurs et soit objectivement nécessaire pour protéger les intérêts que cette législation a pour objet de sauvegarder. Prenant acte de la position du juge européen, les juridictions françaises sont revenues sur la jurisprudence considérant que l'agrément peut être imposé à un établissement de crédit situé dans un autre État membre qui souhaite exercer une activité de prêt hypothécaire sur son territoire selon le régime de la prestation de services, lorsque cet agrément est obligatoire pour toute personne exerçant cette activité sur le territoire en cause . Consacrant le principe de la libre prestation de services, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation a, en reprenant les motifs de la Cour de justice dans son arrêt du 9 juillet 1997, affirmé que l'exigence d'un agrément revient à imposer à l'entreprise seulement prestataire de services, un établissement sur le territoire de l'État membre sur lequel la prestation est rendue, et constitue la négation de la liberté de prestation de services. Une telle restriction va au-delà de ce qui est objectivement nécessaire pour atteindre le but poursuivi, lorsque dans son État membre d'origine, l'établissement de crédit prestataire est soumis à des règles prudentielles et à la surveillance d'une autorité de contrôle, elle-même tenue à une obligation de collaboration avec celles des autres États membres .

La liberté d'établissement ne concerne que les succursales et ne s'étend pas aux filiales, qui, parce qu'elles sont dotées de la personnalité juridique, doivent être agréées dans l'État membre où elles établissent leur siège social. 

L'article 3, I, 22) renvoie pour définir la notion d'établissement financier à l'article 4, paragraphe 1, 26), du règlement 575/2013 qui considère comme tel une entreprise, autre qu'un établissement, dont l'activité principale consiste à prendre des participations ou à exercer une ou plusieurs activités visées aux points 2 à 12 et au point 15 de la liste figurant à l'annexe I de la directive 2013/36/UE, en ce compris une compagnie financière holding, une compagnie financière holding mixte, un établissement de paiement au sens de la directive 2007/64 et une société de gestion de portefeuille, mais excluant les sociétés holding d'assurance et les sociétés holding mixtes d'assurance au sens de l'article 212, paragraphe 1, g), de la directive 2009/138. Ne relève pas de cette notion l'entreprise dont l’activité consiste à prendre des participations dans des sociétés qui n’exercent pas d’activités dans le secteur financier : CJUE, 26 octobre 2023, Lineas – Concessões de Transportes SGPS SA, aff. C-207/22, LawLex202300012701JBJ.

Les informations qui doivent être jointes à la notification sont les suivantes : État membre sur lequel l'établissement est envisagé ; programme d'activités indiquant notamment le type d'opérations envisagées et la structure de l'organisation de la succursale ; adresse à laquelle les documents peuvent être obtenus dans l'État membre d'accueil ; nom des personnes responsables de la direction de la succursale.

Le refus des autorités compétentes de l'État membre d'origine de communiquer ces informations aux autorités compétentes de l'État membre d'accueil doit être motivé et pouvoir faire l'objet d'un recours juridictionnel.

Les articles 40 et suivants de la directive fixent les pouvoirs des autorités de l'État membre d'accueil : remise d'un rapport périodique ou d'informations identiques à celles exigées des établissements de crédit nationaux (art. 40), pouvoir d'exiger que les autorités de l'État membre d'origine prennent toute mesure appropriée pour remédier à une non-conformité aux exigences de la directive (art. 41), possibilité d'adopter des mesures conservatoires (	art. 43), possibilité d'empêcher un établissement de crédit en infraction de commencer de nouvelles opérations sur son territoire (art. 44).

V. CJCE, 5 octobre 2004, CaixaBank France, aff. C-442-02, LawLex200700000037JBJ, AJDA, 2004, 2267, obs. BELORGEY, GERVASONI, LAMBERT ; Europe, 2004, nº 402, obs. IDOT ; JDI 2005, 429, obs. LUBY : estimant que le motif d'intérêt général tiré de la protection des consommateurs contre l'augmentation des services bancaires de base ne saurait justifier la réglementation d'un État membre qui interdit à un établissement de crédit filiale d'une société d'un autre État membre, de rémunérer les comptes de dépôts à vue libellés en euro, dès lors qu'une option peut être offerte entre comptes non rémunérés et comptes rémunérés avec participation plus importante au coût des services ; V. aussi, tirant les conséquences de cet arrêt, Cons. d'Ét., 23 février 2005, Caixa Bank France, LawLex200900003493JBJ.

CJCE, 9 juillet 1997, Parodi SCI, aff. C-222-95, LawLex200500006634JBJ, Europe, 1997, nº 285 ; Journ. trib., 1998, 9, obs. DASSESSE ; Journ. trib., 2000, 11 ; JDI, 1998, 521, obs. LUBY.

V., dans l'affaire Parodi, Cass. com., 20 octobre 1998, LawLex200900003488JBJ et, sur renvoi, Paris, 14 juin 2000, LawLex200900003506JBJ, revenant sur cette solution ; V. aussi, Cass. com., 4 juin 2002, LawLex200900003487JBJ.

V. Cass. Ass. Plén., 4 mars 2005, LawLex200900003492JBJ, JCP E, 2005, 690, obs. BONNEAU, D., 2005, AJ 836, obs. DELPECH ; V. aussi Cass. com., 22 novembre 2005, LawLex200900003486JBJ ; Paris, 14 juin 2000, LawLex200900003506JBJ ; 26 avril 2007, LawLex200900003508JBJ.

Droit européen des affaires

118. Libre établissement et libre prestation de services.(1)

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