Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

Limitée aux activités de prestation de services, la directive 77-249 du 22 mars 1977 se contente de poser un principe de reconnaissance mutuelle de la qualité d'avocat telle qu'elle est définie dans les différents États membres. Une personne habilitée à exercer ses activités professionnelles sous la dénomination “avocat” dans un État peut ainsi exercer cette activité dans un autre État membre (art …

Libre prestation de services.

Limitée aux activités de prestation de services, la directive 77-249 du 22 mars 1977 se contente de poser un principe de reconnaissance mutuelle de la qualité d'avocat telle qu'elle est définie dans les différents États membres. Une personne habilitée à exercer ses activités professionnelles sous la dénomination “avocat” dans un État peut ainsi exercer cette activité dans un autre État membre (art. 2) , en usant du titre professionnel de l'État membre de provenance, avec indication de son organisation professionnelle ou de sa juridiction (art. 3).

La directive tend en particulier à faciliter l'exercice de la profession d'avocat au regard des règles déontologiques en soumettant les activités de l'avocat à des régimes différents selon qu'elles revêtent un caractère judiciaire ou extrajudiciaire. 

Les activités judiciaires (représentation et défense en justice) doivent être exercées dans les conditions prévues pour les avocats établis dans l'État membre d'accueil, à l'exclusion de toute condition de résidence ou d'inscription à une organisation professionnelle dans cet État (art. 4, paragr. 1). Constitue ainsi une restriction à la libre prestation de services le refus des autorités nationales compétentes de délivrer un boîtier de raccordement au réseau privé virtuel des avocats à un avocat dûment inscrit à un barreau d'un État membre, au motif qu'il n'est pas inscrit à un barreau de l'État membre dans lequel il souhaite exercer sa profession en qualité de prestataire de services alors même qu'aucune obligation d'agir de concert avec un autre avocat n'est imposée par la loi . Soumis à une double déontologie dans l'exercice de ces activités, l'avocat non-résident est tenu de respecter tant les règles professionnelles de l'État d'accueil que celles de son État d'origine (art. 4, paragr. 2). Ainsi, l'avocat tenu, au titre des articles 4 et 7 de la directive 77-249 du 22 mars 1977, d'observer les règles déontologiques en vigueur dans l'État membre d'accueil, ne peut se prévaloir des dispositions de cette directive lorsque l'accès à la profession d'avocat lui a été interdit dans l'État d'accueil pour des raisons tenant à la dignité, à l'honorabilité et à la probité . L'État membre d'accueil peut imposer à l'avocat d'être introduit auprès du président de la juridiction et, le cas échéant, auprès du bâtonnier compétent dans cet État, selon les règles ou usages locaux, et d'agir de concert soit avec un avocat exerçant auprès de la juridiction saisie et qui serait responsable, s'il y a lieu, à l'égard de cette juridiction, soit avec un “avoué” ou “procuratore” exerçant auprès d'elle (art. 5) . Une législation nationale ne saurait toutefois imposer à l'avocat prestataire d'agir de concert avec un avocat résident pour les actions judiciaires pour lesquelles l'assistance obligatoire par un avocat n'est pas requise . De même, lorsque le recours à un avocat exerçant auprès de la juridiction saisie est imposé, la disposition nationale qui exclut les frais afférents à la constitution de l'avocat européen du montant à rembourser par la partie ayant succombé, entrave la libre prestation de services. Les justiciables seraient en effet fortement découragés d'avoir recours à des avocats établis dans d'autres États membres s'ils en supportaient les frais quelle que soit l'issue du procès . Enfin, un État membre ne peut interdire aux avocats salariés d'exercer des activités de représentation et de défense en justice dans l'État d'accueil pour leur employeur que si la même interdiction existe à l'égard des avocats de cet État (art. 6).

Pour l'exercice de ses activités extrajudiciaires, l'avocat est soumis aux conditions et règles professionnelles de l'État d'origine. Il obéit également aux règles qui régissent la profession dans l'État d'accueil  dès lors qu'elles peuvent être appliquées à un avocat non établi dans l'État membre d'accueil et que cette application est objectivement justifiée pour assurer, dans cet État, l'exercice correct des activités d'avocat, la dignité de la profession et le respect des incompatibilités (art. 4, paragr. 4). 

Enfin, conformément à l'article 51 TFUE, qui excepte du champ d'application de la liberté d'établissement et, par le renvoi de l'article 62, de la liberté de prestations de services “les activités participant dans [un] État, même à titre occasionnel, à l'exercice de l'autorité publique” , la directive permet aux États membres de “réserver à des catégories déterminées d'avocats l'établissement d'actes authentiques habilitant à administrer les biens de personnes décédées ou portant sur la création ou le transfert de droits réels immobiliers” (art. 1er, paragr. 1, al. 2) . 

Pour un ex. d'application, V. CJCE, 19 janvier 1988, Gullung, aff. 292-86, LawLex200500006986JBJ, affirmant que le ressortissant de deux États membres, admis à la profession d'avocat dans l'un de ces États, peut se prévaloir, sur le territoire de l'autre État, des dispositions de la directive 77-249 tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats.

CJUE, 18 mai 2018, Lahorgue, aff. C-99-16, LawLex201800000694JBJ.

CJCE, 19 janvier 1988, Gullung, aff. 292-86, LawLex200500006986JBJ.

Pour une application, CJUE, 10 mars 2021, VK, aff. C-739/19, LawLex202100000677JBJ, qui précise toutefois que si l'obligation pour un avocat prestataire d'agir de concert avec un avocat exerçant auprès de la juridiction saisie dans un système où ils peuvent définir leurs rôles respectifs, l'avocat établi auprès de la juridiction saisie assistant l'avocat prestataire pour lui permettre de bien représenter son client et exécuter correctement ses obligations auprès de la juridiction, n'est pas disproportionnée au regard de l'objectif de bonne administration de la justice, cette obligation va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif lorsqu'elle ne permet pas de tenir compte de l'expérience de l'avocat prestataire.

CJCE, 25 février 1988, Commission c. République Fédérale d'Allemagne, aff. 427-85, LawLex201000000349JBJ, qui précise que la législation nationale qui impose à l'avocat prestataire de services, sans dérogation possible, de se faire accompagner par un avocat résident s'il rend visite à un détenu et de ne correspondre avec celui-ci que par l'intermédiaire de cet avocat est également contraire à la directive 77-249. V. dans le même sens : CJCE, 10 juillet 1991, Commission c. République française, aff. C-294-89, LawLex201000000350JBJ, qui précise que la règle de l'exclusivité territoriale qui réserve le droit de postuler devant un tribunal aux avocats du ressort de ce tribunal ne saurait être appliquée à des activités de caractère temporaire exercées par des avocats établis dans d'autres États membres, car ceux-ci se trouvent dans des conditions de droit et de fait qui ne permettent pas la comparaison avec celles applicables aux avocats établis sur le territoire de l'État d'accueil.

CJCE, 11 décembre 2003, AMOK Verlags c. A & R Gastronomie, aff. C-289-02, LawLex200500006620JBJ, Europe, 2004, nº 41, obs. IDOT ; JDI, 2004, 594, obs. LUBY.

Notamment celles concernant l'incompatibilité entre l'exercice des activités d'avocat et celui d'autres activités dans cet État, le secret professionnel, les rapports confraternels, l'interdiction d'assistance par un même avocat de parties ayant des intérêts opposés et la publicité.

V. not. CJCE, 21 juin 1974, Reyners c. Belgique, aff. 2-74, LawLex200400003482JBJ, RMCUE, 1974, 473, obs. de DORLODOT ; Gaz. Pal., 1975, 3, 63, obs. DAMIEN ; RTD eur., 1975, 518 ; Rev. crit DIP., 1975, 696, obs. LOUSSOUARN ; JDI, 1976, 221, obs. CONSTANTINESCO, qui considère que les activités les plus typiques de la profession d'avocats telles que la consultation et l'assistance juridique ou la représentation et la défense des parties en justice, ne participent pas à l'exercice de l'autorité publique.

Cette disposition semble tenir compte de l'aptitude reconnue aux solicitors au Royaume-Uni et en Irlande de dresser des actes authentiques, et donc donner la possibilité aux autres États membres de ne pas les autoriser à dresser de tels actes sur leur territoire.

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148. Libre prestation de services.

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