Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

Un signe représentant la forme d'un produit peut, en principe, constituer une marque. Un impératif d'intérêt général commande cependant de laisser à la libre disposition de tous les opérateurs économiques les formes purement fonctionnelles. L'article 4, paragraphe 1, e) de la directive 2015-2436  prévoit ainsi de manière limitative trois motifs de refus d'enregistrer un signe constitué exclusiveme …

 Signes constitués exclusivement par la forme du produit.

Un signe représentant la forme d'un produit peut, en principe, constituer une marque. Un impératif d'intérêt général commande cependant de laisser à la libre disposition de tous les opérateurs économiques les formes purement fonctionnelles. L'article 4, paragraphe 1, e) de la directive 2015-2436  prévoit ainsi de manière limitative trois motifs de refus d'enregistrer un signe constitué exclusivement par la forme d'un produit fondés sur : (i) la forme ou une autre caractéristique imposée par la nature même du produit, (ii) la forme ou une autre caractéristique du produit nécessaire à l'obtention d'un résultat technique, (iii) la forme ou une autre caractéristique qui donne une valeur substantielle au produit. Ces motifs sont autonomes : il suffit que l'un d'eux soit rempli pour refuser l'enregistrement .

1) La forme ou une autre caractéristique imposée par la nature même du produit

La demande d'enregistrement peut porter sur la forme de l'emballage du produit plutôt que sur le produit lui-même. Deux types de produits sont alors distingués : les produits possédant une forme intrinsèque, dont la commercialisation ne nécessite pas de leur donner une forme particulière pour permettre leur commercialisation (ex. : des clous) et les produits dépourvus de forme intrinsèque dont la commercialisation exige un emballage (ex. : produits fabriqués sous forme de granules, de poudre ou de liquide). Dans ce dernier cas, l'emballage choisi confère au produit la forme protégeable . 

2) La forme ou une autre caractéristique du produit nécessaire à l'obtention d'un résultat technique

La forme du produit est considérée comme nécessaire à l'obtention d'un résultat technique lorsque les caractéristiques essentielles de cette forme répondent à une fonction technique. Dans ce cas, ce qui importe est la manière dont le produit fonctionne, et non la manière dont il est fabriqué . Lorsqu'un signe est composé à la fois d'éléments fonctionnels et d'éléments arbitraires, les autorités de contrôle vérifient que ces derniers éléments ne sont pas prépondérants dans l'impression d'ensemble produite par la marque avant d'en refuser l'enregistrement . L'existence d'autres formes permettant d'obtenir le même résultat technique n'est pas de nature à écarter le motif de refus ou de nullité d'enregistrement.

3) La forme ou une autre caractéristique qui donne une valeur substantielle au produit

La forme peut conférer une valeur ajoutée au produit (ex. : une coupe particulière apportée à un vêtement). Elle ne se limite pas exclusivement à une valeur artistique ou ornementale, mais concerne toutes les caractéristiques fonctionnelles essentielles, la perception de la forme du produit par le public ciblé ne constituant que l'un des éléments d'appréciation du motif du refus d'enregistrement . La Cour a récemment considéré que le signe qui consiste en une couleur appliquée sur la semelle d'une chaussure à talon haut ne saurait être considéré comme étant “exclusivement” constitué par la forme, lorsque l'objet principal de ce signe est une couleur - le rouge - précisée au moyen d'un code d'identification internationalement reconnu, la marque ne relevant dès lors pas de l'interdiction d'enregistrement des formes .

Un signe constitué par la forme du produit ne peut cependant jamais acquérir un caractère distinctif par l'usage , à la différence des autres motifs de refus d'enregistrement. Dès lors, un signe, constitué à l'origine exclusivement par une forme donnant une valeur substantielle au produit, qui a ensuite et avant la demande d'enregistrement, acquis une notoriété à la suite de campagnes publicitaires, ne peut constituer une marque en raison de l'usage qui en a été fait .  

Chacun des motifs de refus d'enregistrement demeurant indépendant des autres, rien ne s'oppose à l'applicabilité des dispositions relatives au refus d'enregistrement des marques descriptives à une demande d'enregistrement d'une marque tridimensionnelle constituée par la forme d'un produit qui n'est pas refusée au titre de l'article 4, paragraphe 1, e) .

reprenant l'article 3, paragr. 1, e) de la dir. 2008-95.

CJUE, 18 septembre 2014, Hauck & Co., aff. C-205-13, LawLex201400000937JBJ.

V. CJCE, 12 février 2004, Henkel, aff. C-218-01, LawLex200800001953JBJ, s'agissant d'un fabricant de lessives liquides qui avait demandé l'enregistrement en tant que marque tridimensionnelle en couleurs d'une forme correspondant à une bouteille allongée, se rétrécissant vers le haut, avec une poignée intégrée, un orifice d'écoulement relativement petit et un bouchon à deux niveaux, qui peut également servir de gobelet doseur. Dans une telle hypothèse, la forme du produit et celle de l'emballage ont été assimilées aux fins d'appréciation des motifs de refus d'enregistrement.

CJUE, 16 septembre 2015, aff. C-215-14, LawLex201500001090JBJ, Europe 2015, n° 450, obs. IDOT.

CJCE, 18 juin 2002, Koninklijke Philips Electronics c. Remington Consumer Products, aff. C-299-99, LawLex200500008315JBJ, concernant la forme d'un rasoir doté de trois têtes rotatives formant un triangle équilatéral.

CJUE, 18 septembre 2014, Hauck & Co., aff. C-205-13, LawLex201400000937JBJ. 

 CJUE, 12 juin 2018, Louboutin, aff. C-163-16, LawLex201800000903JBJ.

CJCE, 20 septembre 2007, Benetton Group SpA c. G-Star International BV, aff. C-371-06, LawLex200700001412JBJ, Europe, 2007, com. 321, obs. IDOT, s'agissant d'un pantalon G-Star comportant, notamment, une genouillère ovale et deux piqûres allant en diagonale de la hauteur des hanches à l'entrejambe.

CJCE, 8 avril 2003, Linde c. Rado Uhren, aff. C-53-01, LawLex200800001949JBJ.

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