Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

L'action en concurrence déloyale est ouverte à toute personne physique ou morale qui subit un préjudice concurrentiel, à l'exclusion des associations de consommateurs . Dès lors, une société de commerce de détail d'alimentation générale est fondée à agir afin d'obtenir la condamnation de ses concurrents qui ne respectent pas les règles du repos dominical . De même, un syndicat professionnel a qualité pour agir en concurrence déloyale parallèlement au Conseil de l'Ordre de la profession , à condition qu'il démontre que les pratiques en cause portent atteinte aux intérêts collectifs qu'il représente . Si les sociétés, qui commercialisent des articles authentiques, bénéficient d'un intérêt à agir en concurrence déloyale contre des contrefacteurs, même en l'absence de clientèle commune , tel n'est pas le cas du fournisseur, qui n'exploite pas directement les produits revêtus des signes et dessins protégés . Le repreneur d'une société dont le droit de préemption a été méconnu est fondé à agir en concurrence déloyale, dès lors que la société absorbée aurait dû devenir “titulaire” des actifs d'un groupe d'une valeur remarquable en termes économiques, financiers, fonciers et concurrentiels . L'intérêt à agir d'une société mère dépend de l'acte de concurrence déloyale poursuivi. Lorsque la qualification de cet acte nécessite l'existence d'une clientèle commune, la société mère d'une filiale dotée de la personnalité morale et juridiquement indépendante ne peut ester en justice pour le compte de celle-ci . Lorsque la situation de concurrence n'est pas une condition nécessaire de l'action, comme dans le cas du parasitisme, la société mère possède en principe un intérêt à agir en concurrence déloyale . Dans ce dernier cas, selon la Cour d'appel de Paris, l'intérêt d'une société mère à la protection des investissements engagés pour un produit et au développement de son activité comme de celle de sa filiale est toutefois insuffisant pour lui conférer qualité à agir . 

L'action en concurrence déloyale s'exerce principalement dans le cadre de relations horizontales et concerne des produits ou services distincts. Mais elle est également susceptible d'être engagée pour un même produit dans le cadre de relations verticales en dépit de leur nature contractuelle. Ainsi, un fournisseur peut agir en concurrence déloyale à l'encontre de son distributeur lorsque celui-ci revend ses produits à perte : dans ce cas, l'action en concurrence déloyale a été jugée plus appropriée que l'action contractuelle dès lors qu'aucune clause du contrat ne prévoyait les conditions matérielles de la revente . Le distributeur agréé d'un réseau de distribution sélective est également recevable à demander réparation du préjudice concurrentiel qu'il subit du fait de la violation par les autres membres du réseau de leurs obligations contractuelles . Un distributeur exclusif peut aussi, même s'il ne dispose pas de droit privatif sur la marque, introduire une action en concurrence déloyale contre l'importateur de produits contrefaisants susceptibles de créer une confusion sur l'origine des produits vendus . Enfin, un tiers au contrat peut agir en concurrence déloyale pour non-respect d'un contrat de distribution sélective dans la mesure où l'inexécution par le distributeur agréé de ses obligations contractuelles lui préjudicie .

Par ailleurs, l'action en concurrence  déloyale, de nature délictuelle, est soumise au régime de la prescription de l'article 2224 du Code civil, de sorte que le délai quinquennal court à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, et non du jour où les faits incriminés ont cessé, le fait que les actes en cause se sont inscrits dans la durée étant indifférent  , à moins que que les faits invoqués ne soient distincts . La recevabilité de l'action est non seulement encadrée par les dispositions de l'article 2224, mais également celles de l'article 2232 du même code, en vertu desquelles le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit . Lorsque plusieurs actes susceptibles de constituer des faits de concurrence déloyale ont été commis, il appartient au juge de faire une application distributive de la règle de la prescription  et de ne déclarer l'action prescrite que pour ceux des actes accomplis par le défendeur dont le demandeur avait connaissance depuis plus de cinq ans au jour de la demande en justice .

Pour une association, V. Cass. com., 15 décembre 1998, LawLex200200001033JBJ ; 18 décembre 2001, LawLex200200000571JBJ ; 12 mars 2002, LawLex200200000546JBJ. Pour un bailleur, V. Paris, 11 février 2000, LawLex200200000449JBJ, qui exclut son intérêt à agir, dès lors que la clientèle appartient à son locataire exploitant et qu'il ne peut en retirer un avantage direct en l'absence de clause recette. Pour un cessionnaire de portefeuille de contrats d'assurances, V. Cass. com., 19 janvier 2001 LawLex201000000110JBJ, absence d'intérêt à agir du cessionnaire auquel l'action en responsabilité n'est pas transmise du fait de la cession. Pour un Comité régional du tourisme, TGI Rennes, 18 décembre 2000, LawLex200200000696JBJ, qui reconnaît son intérêt à agir dans le cadre de sa mission de promotion de la région. Pour un commissaire au plan, Paris, 20 décembre 2000, LawLex200200000692JBJ, qui ne peut agir en concurrence déloyale dès lors que sa mission se limite à l'exécution du plan. Pour des auteurs, Paris, 14 mai 2003, LawLex200300004257JBJ, sur l'irrecevabilité de leur action pour défaut de qualité à agir dès lors qu'ils ont cédé à une société d'édition la titularité de leurs droits patrimoniaux, seule cette dernière ayant qualité à dénoncer les faits de parasitisme allégués.

Cass. com., 30 mai 2012, LawLex201200000812JBJ.

Bordeaux, 31 mars 1999, LawLex200200000139JBJ.

Paris, 2 février 2016, LawLex201600000299JBJ; 25 mai 2016, LawLex201600001002JBJ.

Cass. com., 1er juillet 2003, LawLex200300002729JBJ, D., 2003, 2427, note FERRIER ; JCP E, 2003, 1627, obs. CARON et DECOCQ. - V. égal., Cass. 3e civ., 13 juillet 2010, LawLex201000001178JBJ, pour un tiers au contrat de bail.

Cass. com., 26 février 2020, LawLex202000000299JBJ, cassant Paris, 30 mars 2018, LawLex201800000561JBJ, qui avait retenu que la prescription ne commence à courir que du jour où les faits incriminés ont cessé dans la mesure où la concurrence déloyale et parasitaire constitue un “quasi-délit continu”.

Paris, 11 septembre 2024, LawLex202400006361JBJ.

Bordeaux, 3 juillet 2024, LawLex202400005102JBJ.

Cass. com., 14 juin 2021, LawLex202100003699JBJ, estimant que même si l’ouverture successive, en 2010 et 2013, dans la même ville, de deux établissements sous une enseigne prêtant à confusion avec la dénomination de l'entreprise plaignante, et la mise en ligne en 2015 d’un site internet sous un nom de domaine jouant de cette proximité de dénomination, sont des actes qui s’inscrivent dans la continuité de l’activité exercée par le défendeur depuis 2006, ils n’en constituent pas moins des faits distincts de ceux dont le demandeur avait connaissance depuis 2009 - soit plus de cinq ans auparavant - qui consistaient à utiliser l’enseigne litigieuse afin de créer une confusion dans l'esprit du public entre leurs deux entreprises, de sorte que l’action en concurrence déloyale n’est pas prescrite.

Basse-Terre, 11 janvier 2024, LawLex202400000402JBJ. 

Paris, 6 janvier 1993, LawLex200200001671JBJ, Contrats Conc. Consom., 1993, n° 226, obs. RAYMOND ; Cass. com., 1er décembre 1998, LawLex200200001043JBJ, D., 1999, somm. 331, obs. BORÉ.

Cass. com., 21 juillet 1986, LawLex201000000217JBJ ; 24 novembre 2009, LawLex200900003560JBJ : un syndicat professionnel n'a pas qualité pour agir, lorsqu'il dénonce une campagne promotionnelle qui aurait été constitutive de concurrence déloyale à l'égard de ses membres, au lieu de démontrer une atteinte propre à l'intérêt collectif de la profession ; Paris, 24 juin 2006, LawLex201400002164JBJ, excluant la qualité à agir de la Confédération nationale des buralistes de France, à se prévaloir, dans le cadre d'une action en concurrence déloyale en vue de protéger l'intérêt particulier des buralistes, de la violation de la réglementation en matière de publicité pour les produits du tabac ou dérivés du tabac, que seules les associations dont l'objet statutaire comporte la lutte contre le tabagisme sont recevables à poursuivre ; Cass. com., 24 mai 2016, LawLex201600001006JBJ, AJCA 2016, 397, obs. BRETZNER : le droit d'agir reconnu par la loi aux associations investies de la mission d'intérêt général de lutte contre le tabagisme n'exclut pas l'exercice d'une action en concurrence déloyale par la Confédération nationale des buralistes de France visant l'interdiction de la promotion de la cigarette électronique en vue de protéger l'intérêt particulier des buralistes.

Versailles, 12 février 1990, LawLex200200001887JBJ, D., 1990, somm. 264, obs. SERRA ; Cass. com., 13 décembre 2005, LawLex200600000211JBJ : société exploitante d'une marque, qui, ne disposant pas d'un droit privatif sur le titre de propriété intellectuelle, est recevable à agir en concurrence déloyale, même si les éléments sur lesquels elle fonde sa demande sont les mêmes que ceux que le titulaire de la marque a pu opposer au titre de la contrefaçon. Solution réintérée par Cass. com., 24 septembre 2013, LawLex201300001416JBJ.

Paris, 23 janvier 2002, LawLex200200000468JBJ. Corrélativement, un comportement fautif ne peut être imputé à une société qui n'est que le fournisseur de la société parasite ayant procédé à l'imitation du catalogue qui par ses similarités avec celui de la société parasitée, ne peut qu'induire un risque de confusion ou une méprise sur l'existence de liens entre ces sociétés, Cass. com., 17 mars 2015, LawLex201500000357JBJ, JCP E 2016, chron., 1347, obs. DECOCQ.

Cass. com., 20 septembre 2016, LawLex201600001519JBJ.

Versailles, 19 février 1998, LawLex200200001175JBJ, D., 2000, somm. 131, obs. de LAMY. V. dans le même sens, Cass. com., 8 juillet 2014, LawLex201400000781JBJ, Concurrences 4/2014, 164, obs. DURAND : un groupe n'a pas qualité à se défendre à l'action en concurrence déloyale et parasitaire qui aurait dû viser sa filiale dès lors que ces deux entités constituent deux personnes morales distinctes et qu'il n'exerce aucune activité concurrente de celle de la plaignante, à la différence de sa filiale.  

Cass. com., 7 avril 2009, LawLex200900001613JBJ : une société mère de droit étranger qui ne commercialise pas directement ses productions en France, mais en confie le soin à sa filiale, a intérêt à agir sur le fondement de la concurrence déloyale par agissements parasitaires.

Paris, 2 juin 2016, LawLex201600001053JBJ : précisant que le retour sur investissement escompté d'un produit ne suffit pas à conférer à une maison mère qualité pour agir en concurrence déloyale dès lors que les prestations qu'elle a effectuées dans le cadre de l'élaboration et du développement du produit commercialisé par sa filiale ont été refacturées à cette dernière et qu'elle n'apporte pas la preuve qu'une partie des frais est restée à sa charge.

39. Qualité à agir.